Israël pas à l'aise avec le JSF

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On relève une inquiétude renvoyant à plusieurs domaines, en Isaël, concernant le JSF. Israël est officieusement/officiellement engagé dans le programme pour acheter soit 75 exemplaires, soit 100 exemplaires de l'avion de combat US. (Dans tous ces cas, les sources diffèrent, sans que rien d’officiel n’ait été fixé d'une façon convaincante. Les informations sur les paramètres de base, prix et nombre d'exemplaires vendus, sont très incertains. Sur les prix, par exemple, une informatiin du 5 octobre 2008 donne les 75 JSF israéliens à $15,2 milliards, ce qui met le JSF à un prix unitaire proche de $200 millions.)

Deux articles du Jerusalem Post, à sept jours d’intervalle, exposent les préoccupations israéliennes à propos du JSF. Le 7 février, il s’agit de la question des prix; le 15 février, il s’agit de la question du transfert des technologies, ou plus précisément de l’adaptation de technologies israéliennes aux JSF livrés à Israël.

• Pour la question du prix, le Jerusalem Post affirme que la force aérienne israélienne, qui a pris en compte l’annonce officielle de l’augmentation (US) du coût du JSF vers un prix poche des $100 millions, estime que ce coût dépassera finalement les $100 millions. Dans ce cas, Israël se trouvera dans une situation difficile pour concrétiser l’engagement pour acheter 75 exemplaires du JSF aussi rapidement qu’il a été prévu “pour des raisons opérationnelles”.

«Last month, the Pentagon acknowledged for the first time that earlier predictions that the plane would cost $50 million-$60 million were inaccurate and that the real cost of the plane would be closer to $100m. […]

»The IDF source, who is familiar with the project and the necessary budget, said the IDF believed the cost would pass the $100m. mark, making it very difficult for Israel to follow through with its initial intention to purchase 75 aircraft. He said that if not for operational considerations, the IDF would have preferred to wait several years and then order the aircraft once the price goes down.»

• Sur la question du transfert des technologies, l’article du 15 février se montre extrêmement pessimiste. Le Pentagone montre clairement son intention de ne pas accepter certaines demandes israéliennes d’adaptation et d’intégration de systèmes israéliens dans les JSF qu’Israël acquerrait. Cette question est abordée de manière beaucoup plus précise par le Post et est finalement beaucoup plus importante que la question des prix.

«An American refusal to permit the installation of Israeli-made defense systems in the Joint Strike Fighter (JSF) may postpone the planned delivery of the fifth-generation stealth jet beyond the target date of 2014, senior defense officials told The Jerusalem Post on Sunday. According to the officials, defense industries such as Rafael, Elbit and Israel Aerospace Industries subsidiary Elta have protested the decision with Defense Ministry Dir.-Gen. Pinchas Buhris who last month made a lightning visit to Washington DC to discuss the issue with the Pentagon.

«The officials said that the new Obama administration would likely make a decision on the issue in the coming months. Israel and the US are scheduled to sign a Letter of Agreement by the end of the year. Negotiations on the integration of Israeli technology began several years ago after Israel paid $20 million to receive the low-level status of a Security Cooperation Participant in the JSF program. […]

»Last week, in an interview with Aviation Week, Maj.-Gen. Charles Davis, executive officer of the JSF program, said that Israel would not be allowed to put its own systems in the JSF, also known as the F-35. “They [Israel] are going to buy aircraft that have basically the same capability as all the others,” Davis told Aviation Week. “They are trying to do a requirements analyses for future missions. That [customization] is doable through software. It is not doable by Israelis sticking boxes in the airplane. [Elbit and Elta being involved] is not an option,” he says.»

L’article sur la question de l’intégration des systèmes israéliens précise que la procédure des contacts avec le Pentagone, jusqu’ici, consistait en une pré-négociation sur l’intégration de ces systèmes; une fois l’accord réalisé, alors avait lieu la négociation sur la commande (sur les prix), puis la commande elle-même. Ce fut le cas avec les F-15I et les F-16I. Cette fois, le Pentagone a exigé de suivre la procédure inverse: d’abord négociation sur la commande, puis la commande elle-même, ce qui semble avoir été acquis en octobre dernier. Puis les négociations sur l’intégration des systèmes ont commencé, et il semble qu’elles soient dans une impasse. Seules les sources industrielles israéliennes montrent un optimiste prudent (“les négociations sont dures mais elles aboutiront”); mais on comprend que l’intérêt de ce secteur est qu’effectivement les négociations aboutissent, quelles qu’en soient les conditions, pour récupérer des commandes annexes et un volume de travail.

Il semble que la situation d’Israël dans cette affaire soit assez difficile. Le Pentagone a adopté une procédure de pression qui ne fait que refléter le durcissement de la situation, particulièrement dans le cas du programme JSF: des restrictions budgétaires sur les grands programmes avec l’administration Obama, et une situation très tendue du programme JSF, avec peut-être une réduction budgétaire dès l’années FY2010. Le côté US a obtenu d’Israël une commande de 75 JSF, sans aucune garantie de quoi que ce soit, alors que l’intention israélienne initiale était de s’en tenir à 25 exemplaires dans les 5-6 prochaines années, avec chez certains (état-major général) l’idée de ne pas aller au-delà. Mais le Pentagone et Lockheed Martin ont un besoin impératif de bonnes nouvelles qui renforcent le statut du JSF, notamment auprès des autorités du Pentagone et de l’administration Obama, pour tenter de le protéger. Dans ce cas, il n’est plus question d’accommodements, même avec les Israéliens.

La procédure choisie est cruelle: un engagement d’achat sans aucune garantie de prix (de ce côté, toutes les perspectives peuvent être envisagées), ni aucune garantie de souveraineté d’Israël sur ses avions. On reconnaît la marque de fabrique du JSF, qui est extraordinairement restrictive, qui persiste malgré les difficultés du programme et alors que cette politique restrictive est notablement contre-productive pour obtenir engagements et soutiens. C’est donner une mesure de la position de fermeté de la bureaucratie à cet égard. Le Pentagone refuse toute intégration des systèmes israéliens parce qu’il entend n’autoriser aucun accès aux Israéliens (comme aux autres) à la structure et à la technologie du JSF (ce qui est inévitable pour y intégrer de nouveaux systèmes). Les obligations de contrôle des technologies US, notamment les technologies furtives, sont absolument impératives; c’est une question, si l’on veut, de “souveraineté technologique” (US), qui a absolument prééminence sur les souverainetés nationales (des acheteurs du JSF). Israël n’échappe pas à ce rouleau-compresseur, d’autant plus écrasant qu’il y a (refrain) la crise par ailleurs.

Paradoxalement, cette crise, qui pousse le Pentagone à resserrer toutes ses prérogatives, va contribuer à renforcer les exigences de ce même Pentagone, rendant ainsi plus difficile la confirmation du “choix” des utilisateurs “choisis”, alors qu’on recherche au contraire des soutiens et de l’argent extérieur. Mais il faut se rappeler que le Pentagone considère l’entrée dans le programme JSF et la commande qui doit automatiquement suivre comme un privilège pour le client, plutôt qu’un engagement quelconque pour le vendeur.


Mis en ligne le 17 février 2009 à 15H02