Destinée russe

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Destinée russe

6 mai 2014 – Nous avons choisi deux textes qui nous paraissent très significatifs de deux visions de la Russie totalement opposées. On comprendra aisément de quel côté penche notre propre vision, mais sans aucun doute selon d’autres références que celles qui sont manifestées dans ce cas, – mais là n’est pas le propos immédiat, on y viendra plus loin. Ces deux visions ont le mérite de situer l’ampleur de la bataille conceptuelle de hauteur métahistorique qui se déroule autour de la “question russe” dans le cadre de la crise ukrainienne.

Le premier de ces textes est plutôt tourné vers le passé, – le passé soviétique de la Russie, – et présente une complète récriture du passé de la Russie (l’URSS) au cours du XXème siècle, pour permettre de mieux présenter la perception de la Russie actuelle, celle de Poutine, et situer sa position par rapport aux conceptions du Système. Cette présentation, sans doute sans le vouloir expressément, est finalement un excellent exemple de la situation actuelle du Système, et du bloc BAO qui le représente opérationnellement, dans ses ambitions et dans ses exigences par rapport au reste du monde, à tous ces territoires (dont la Russie en premier lieu certes) qu’il entend faire figurer dans ses schémas. Il s’agit d’un éditorial du Guardian du 2 mai 2014, dont le sous-titre est particulièrement intéressant : «Vladimir Putin has taken Russia back to pre-Soviet nationalist attitudes. Tanks may yet roll across the Ukrainian border.» (Les chars se font attendre.)

L’édito nous emmène donc au cœur du bouillonnement ukrainien, en jugeant que le moment est capital, et qu’il pourrait aboutir à des pseudo-référendums (selon l’esprit du texte) dans les régions orientales du pays, avec aussitôt un appel à des forces russes du “maintien de la paix” (les fameux chars qui traversent déjà la frontière). Dans cette citation, on se permet de souligner de gras le membre de texte qui importe. «This may or may not be the breaking point, but that point seems closer. It comes just a day after more than 100,000 people, some bearing banners with sentiments such as “Putin is right” and “Be proud of our country” marched through Red Square on May Day, the first such parade in the square since 1991. This extraordinary throwback is an indication of how far Russia has regressed under President Putin. Next week tanks and missiles will roll through the square in the annual military show, by which time it is possible they may have rolled, or be preparing to roll, over the Ukrainian border.»

Comme on a vu, il est aussi question tout de même des chars, des vrais, – ceux qui traverseront en grondant la Place Rouge, le 9 mai prochain, pour célébrer la victoire universelle de 1945 contre le nazisme. On pourrait comprendre cette célébration autrement qu’en une référence oblique à ces autres chars cauchemardés dont on vous annonce qu’ils ne tarderont pas à franchir la frontière ukrainienne, c’est-à-dire en rappelant, comme ça, en passant, que la Russie (et non l’URSS) laissa 27 millions de morts dans cette guerre et en fut sans aucun doute, – les historiens au standard-BAO ont à en apprendre à cet égard, entre deux célébrations du D-Day du 6 juin 1944, – bien plus la force victorieuse, contre ce que nous enseigne l’historiographie anglo-saxonne, que toutes les forces anglo-saxonnes réunies pour l’occasion. Pourtant non, ce cliquètement des chenilles des chars suggère une tout autre idée à l’éditorialiste du Guardian ; il lui suggère qu’aujourd’hui, la Russie est bien plus rétrograde, dictatoriale, archaïque que l’URSS du XXIIème Congrès du PC de l’URSS organisé en février 1956 par Krouchtchev pour dénoncer les crimes de Staline, – acte qui aurait correspondu à une avancée progressiste, libérale, internationaliste, contre l’hypernationalisme de Staline... (Encore notre souligné en gras.)

«In the process Russians have been stripped of the hard-won wisdom about nations and nationalism that they had learned during the last decades of Soviet rule. It is quite an achievement to have taken Russia back to a stage in which attitudes towards nationalism are actually less progressive than in Soviet days. Nearly 60 years ago, Nikita Khrushchev revealed at the 20th party congress that Stalin had wanted to deport the whole of the Ukrainian nation after the second world war, but had to be content with only half a million because there were just too many Ukrainians even for him to envisage displacing. Khrushchev's speech repudiated this barbarism but did not otherwise lead to any immediate improvement. Moscow's policies veered from an assimilationist emphasis on the merger of nationalities to the idea that a creature called “Soviet man” would emerge.»

On n’insistera pas trop sur l’évocation hypothétique qu’aurait pu faire le même éditorialiste si un Cameron, un Obama, un président-poire, s’était trouvé devant une foule de “plus de 100 000 personnes” l’acclamant et criant en même temps sa fierté de sa patrie. Il faut savoir ce que “démocratie” veut dire. Quant au monstrueux nationalisme dont le très britannique Guardian charge les Russes, il est vrai que ces Britts, volens nolens et Right or wrong, my country, en connaissent un rayon, – mais qui vaut d’abord pour eux-mêmes, certes. Passons outre, comme disait Jeanne à ses juges...

Cet édito du Guardian, misérable petit tas de mots convenus, nous donne un stupéfiant exemple d’une récriture de l’histoire d’un temps passé (par définition) à partir d’une situation présente. Ce n’est pas de l’Orwell, c’est de l’Orwell transmuté par l’inversion chronologique au service d’une narrative d’une contre-histoire, du révisionnisme installé comme façon d’être. Le Guardian nous invite donc à penser que l’URSS devenue stalinienne fut une forteresse du nationalisme russe, que Krouchtchev commença à saper grâce à son libéralisme-progressisme, que Gorbatchev acheva d’abattre, et sur les ruines de laquelle Eltsine fit pousser les Cent-Fleurs du capitalisme enfin autorisé à prospérer ; puis vint Poutine et l’Âge de l’Ombre néo-stalinien retomba sur la traîtresse Russie (“traîtresse” puisque plus de 80% des Russes soutiennent aujourd’hui Poutine). Ce résumé nous donne à penser sur le caractère hallucinatoire qui marque aujourd’hui l’esprit “bloquiste” (se dit du bloc BAO, ou esprit-Système). L’“Ouest” aura tout fait à la Russie, puisque c’est elle qui lui donna le communisme déstructurant et ennemi juré de la Nation, via Marx et Lénine dans son wagon transitant au cœur de l’Allemagne, et qui aujourd’hui reconstruit à l’image de sa propre schizophrénie l’histoire de cette infamie.

S’il est une des choses qui choquent le plus les Russes, c’est l’assimilation que les esprits du bloc BAO, – incultes et ignares à la fois, c’est-à-dire réfugiés dans le “grand Now” (voir le 29 janvier 2014), sans passé, sans avenir, sans rien du tout, – font du communisme (et du soviétisme, et du marxisme-léninisme, et du stalinisme), et de la Russie. Le communisme est une des grandes catastrophes du XXème siècle et sa première victime est la Russie elle-même. Le but du marxisme-léninisme puis du stalinisme fut d’éradiquer tout sentiment national, – celui de la Russie comme celui des nations agglomérées, – au nom d’une idéologie bureaucratique et transformiste (homo sovieticus comme il y a eu et comme il y a encore de l’autre côté le projet sur l’homo americanus), essentiellement par le moyen de la terreur policière. Cette phase fut interrompue par réflexe de survie, fin juillet 1941, lorsque Staline, psychologiquement effondré à cause de l’avance allemande et ayant quitté Moscou, fit son discours fameux où il s’adressa à ses compatriotes (“Petits frères, petites sœurs”) en exaltant la nations russe, en rappelant les grands anciens comme Koutouzov, en ressuscitant le patriotisme russe et sa vertu pérenne. Tchaïkovski a raconté l’étrange soulagement, presque la joie qui s’étaient emparés des Russes avec ce retour de la vérité russe, alors que, pourtant, l’invasion nazie les pressait partout, parce qu’ils (les Russes) étaient délivrés du mensonge obligatoire de la monstrueuse idéologie transformiste et qu’ils pouvaient exprimer le fond et la force même de leurs âmes. C’est cette nation-là, la Russie et non l’URSS, qui gagna la Grande Guerre Patriotique.

Quant au XXIIème Congrès, le Guardian peut garder pour d’autres occasions, – il n’en manque pas pour ces esprits féconds, – l’étiquette de “progressiste”. Krouchtchev s’en est longuement expliqué, notamment lors d’entretiens avec le diplomate US Harriman, dont le compte-rendu fut publié en 1959 : c’est la peur qui gouverna la politique de déstalinisation, la peur de tous ces dirigeants qui avaient vécu dans la terreur de leur propre liquidation arbitraire sur un simple geste de Staline. Krouchtchev expliquait que tous les dirigeants, après la mort de Staline à laquelle ils avaient sans doute prêté la main, avaient conclu que jamais plus on ne permettrait une telle situation en donnant de tels pouvoirs discrétionnaires à un dirigeant. Le XXIIème Congrès suivit et, en même temps, entama la décadence du communisme privé de la sève même de son fonctionnement, – la terreur policière arbitraire. Transcrire tout cela selon les poncifs qui règnent aujourd’hui dans notre “grand Now” a quelque chose d’infiniment grotesque dans sa petitesse, et d’obscène pour tous ceux qui souffrirent et moururent dans ces temps-là, et dont le grand patriote russe et mystique Soljenitsyne fut le grand témoin. Au-delà et bien pire que l’esprit d’Orwell, qui implique une manipulation consciente des mots pour leur donner un sens inverse, il s’agit d’une inversion à la fois inconsciente et totalitaire d’esprits totalement infectés par une psychologie totalement subvertie par le Système. (L’emploi répétitif des mots de la racine “total” est bien entendu volontaire : ces esprits sont les prisonniers du Système et sous son empire total dans cette phase paroxystique de la crise d’effondrement du Système. Leur fonctionnement a complètement échappé à l’intelligence qui prétend les caractériser.)

... Par conséquent, cette démarche implique un blocage complet dans une tentative éventuelle de comprendre le comportement russe, la politique russe, etc. Les esprits “bloquistes”, typiquement les Anglo-Saxons, sont bloqués dans les stéréotypes, que ce soit celui du mépris arrogant de la conscience russe définie comme rétrograde et incivilisée, que ce soit celui de la démonisation de Poutine. Cet éditorial ne nous dit rien de vrai de la Russie sinon l’air de la calomnie chanté sur un sifflet faussaire et il nous dit tout de la subversion et de l’inversion des élites du bloc BAO. Il témoigne de la réduction de la démarche de la compréhension aux stéréotypes imposés par le Système.

• Le deuxième texte maintenant. C’est une interview à Novosti le 30 avril 2014, de Avigdor Eskin, un Russe juif, devenu Israélien et vivant en Israël, et d’une réputation assez peu convenable pour notre appréciation du conformisme-Système : ultra-conservateur, membre de groupes israéliens ultra-conservateurs qui, pour un peu, feraient de Netanyahou une sorte de modéré... Eskin a pourtant (importance du “pourtant”, pour la biendisance de nos salons) des jugements qui nous paraissent, à nous, d’un très grand intérêt. Il considère les sanctions du bloc BAO comme une bénédiction pour la Russie, pour leurs vertus de mobilisation derrière une direction recueillant l’adhésion populaire massive, et comme une matrice de réformes novatrices de l’économie russe...

« “Notably, the level of political approval to those in power, and hence the political stability, is unprecedented in the face of Western sanctions. This is sort of a gift to President Putin and it is up to him now to use it wisely,” [Eskin] said, explaining that this kind of national accord was unthinkable just a little over a year ago. [....]

»“I wouldn’t want to speculate about possible further sanctions, but the current ones are, essentially, a ‘cure’ for Russia’s longstanding economic illness,” Eskin said. “Russia has been lacking a mobilization factor much needed to reform the resource-driven and export-oriented economy into a system focused on manufacturing and services. The Western actions and what Ukraine is doing would be that necessary mobilization factor,” he said, stressing that history has shown countries have been able to emerge out of isolationist attacks stronger and more resilient.

»Speaking on more specific consequences of the sanctions, Eskin mentioned the return of Russian capital into the country as a way to offset capital flight from risk-averse foreign investors. “This would also make for appropriate circumstances for the return of capital to the country, as no Russian businessman is currently confident in what is to happen to their money abroad, which would re-direct capital back into Russia,” he said.»

L’enjeu métahistorique

En définissant la vérité de la situation par la méthode du contraste complet et de l’antagonisme irréductible des jugements qu’impliquent ces deux commentaires, nous entendons proposer une vision des enjeux en cours, au travers des perceptions et de leurs effets que dispense le système de la communication. Cette vision et ces enjeux ne sont pas de simples jeux de l’esprit mais constituent justement d’excellentes références opérationnelles pour comprendre la vérité de la situation dans la phase paroxystique de l’affrontement en cours entre le Système et le bloc BAO qui l’opérationnalise d’une part, et la Russie d’autre part. Selon ce rangement, la Russie est ici totalement perçue comme antiSystème quelles que soient la politique de sa direction et le sentiment général de la population russe concernant cet affrontement.

Nous prétendons en effet, de ce point de vue, que ni cette direction, ni le peuple russe, n’ont une conscience précise de cette fonction d’antiSystème qu’ils occupent actuellement, notamment parce que leur politique et leur sentiment ne les détachent pas complètement du Système dans nombre d’aspect de cette politique et de ce sentiment, notamment à cause de la perception de faire malgré tout partie d’un ensemble d’une organisation générale (il s’agit du fait et des effets de la “globalisation” que nous subissons tous). Mais ce qui nous intéresse dans ce cas, comme dans le cas du bloc BAO, c’est la puissante réalité inconsciente de la situation des esprits. La Russie répond dans sa plus intime constitution d’elle-même à des principes structurants, dont la patriotisme affichée, expression à la fois des principes d’identité et de légitimité, ce patriotisme qui est perçu comme une vertu autant par sa direction que par sa population. Dans les circonstances actuelles, ce patriotisme-là n’implique en rien une molle solidarité renvoyant à des “valeurs”-Système de convenance et de conformisme comme ceux qui forment l’essentiel de l’“intelligence” en cours actuellement dans le bloc BAO, mais bien une force tragique que résument implicitement, et peut-être là aussi inconsciemment qu’importe, les propos d’Eskin.

On trouve justement dans ces propos le mot de “mobilisation”, dont on comprend évidemment son importance capitale. Eskin l’applique aux matières économiques, ce qui est en faire un usage assez restrictif et somme toute médiocre par rapport à l’ampleur implicite du concept. En fait de “mobilisation”, même si elle pourrait sembler toucher l’économie russe selon les caractères de l’isolationnisme, – jugement d’ailleurs extrêmement relatif et loin de la réalité probable dans les événements à venir, la Russie étant loin d’être isolée, – mais c’est un autre débat, – nous devons parler, nous, de la mobilisation des esprits et des intelligences. Nous devons parler de cet aspect fondamental dans le contexte spirituel qui caractérise ce qu’on nomme l’“âme russe”, – la même qui se manifesta en juillet 1941, lorsque Staline abandonna l’affreuse dialectique transformiste pour exalter la dialectique pérenne du patriotisme de la nation russe, avec les résultats qu’on a vus. C’est évidemment cette mobilisation-là qui est en cours, qui est une force souterraine, ou bien une force haute et suprahumaine, qui est en train de donner un sens collectif opérationnel et très puissant aux Russes.

C’est dans ce sens caractérisant l’actuelle situation russe que nous parlons de la Russie comme antiSystème, c’est-à-dire aussi la Russie comme point de ralliement évident de tout ce qu’il y a aujourd’hui d’antiSystème, exprimé ouvertement ou en position de latence dont la puissance potentielle ne demande qu’à s’exprimer. On voit alors que nous quittons le domaine des spécificités nationales, des affrontements de type historique courant, pour toucher au domaine de la métahistoire. Ce n’est pas réduire la Russie, ce n’est pas nier la grandeur de son destin ni les vertus de son âme, qu’observer alors qu’elle n’est qu’un acteur désigné par le puissant affrontement du Système contre l’antiSystème, qui est un affrontement nécessairement et absolument métahistorique. Les caractères de la Russie tels que nous les avons identifiés et désignés restent ce qu’ils sont, et valent aussi bien notre respect et notre reconnaissance, mais ils ne sont également que des outils pour conforter cette position d’antiSystème ordonnée par la puissance métahistorique, et assignée pour ce cas à la Russie. Par conséquent, les choix évidents dans ce raisonnement ne constituent pas un parti-pris, une prise de position pro-russe, quelque chose qui entraverait notre liberté de jugement en quoi que ce soit, même s’il s’agit de cela dans la chronique courante des événements perçus du point de vue historique courant, dans le moment historique présent ; ces choix évidents sont, de façon très différente, la conséquence évidente du simple constat, pour le moment en cours, de l’assignation à la Russie de ce rôle métahistorique d’antiSystème.

A notre sens, c’est de cette façon qu’il importe de raisonner : même si c’est l’être dans la recollection et le commentaire des faits courants du moment historique, ce n’est en aucune façon être partisan du point de vue métahistorique. Puisque la métahistoire a choisi, en le faisant métahistorique, cet affrontement en cours comme la bataille peut-être suprême et dans tous les cas s’approchant de ce moment suprême, entre Système et antiSystème ; puisqu’elle a choisi la Russie pour porter ce fardeau écrasant et sublime de l’antiSystème, – alors le choix s’impose sans qu’il fasse de vous en aucune façon un partisan selon les termes grossiers, vulgaires et obscènes de la pensée-Système (voir le Guardian). Notre propos n’est en effet en rien d’être partisan de quelque façon que ce soit, il est de se battre contre ce phénomène que nous nommons Système, né du déchaînement de la Matière, déstructurant et dissolvant jusqu’au but suprême de l’entropisation (voir la formule dd&e), qui est prédateur de toute forme harmonieuse et équilibrée de toute civilisation possible, et destructeur absolument déterminé du monde.

L’enjeu de la crise ukrainienne en cours de développement accéléré et dans tous les sens, et de toutes les façons, est désormais, à n’en pas douter pour notre compte, un enjeu métahistorique. C’est peut-être même l’enjeu métahistorique suprême, ce qui explique, sans nul doute à notre avis, des comportements extrêmes, grossiers, bizarres sinon complètement extravagants, stupides jusqu’à l’ébahissement. (Ces comportements, notamment et principalement, dans le chef des agitations extraordinaires dans le champ du système de la communication, avec les narrative, les aveuglements, les erreurs grotesques et les interprétation surréalistes, les jugements et les positions extrêmes et qui n’ont plus aucun souci de correspondance avec la vérité de la situation, le caractère étrange d’incontrôlabilité de la crise, la sensation non moins inédite d’un événement qui semble complètement inarrêtable, qui semble vivre de lui-même.) La grande crise générale se déroule sous nos yeux, heure par heure, soumettant les esprits qui s’en tiennent à leurs seules capacités, à la torture de tenter de donner des explications rationnelles à des comportements qui le sont si peu puisqu’issus de raisons subverties et directement influencées par des facteurs métahistoriques. Il importe de faire l’effort, qui est aussi bien une hypothèse acceptable qu’une audace salvatrice de l’esprit, d’inclure dans notre observation de cette agitation sauvage le facteur métahistorique, qui devient alors le grand ordonnateur de cette folie apparente qui n’est plus du tout désormais une “folie ordinaire”.