dedefensa.org et le “désordre généralisé”

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dedefensa.org et le “désordre généralisé”

S’adressant directement au capitaine, malgré son grand âge et l’épuisement qui va avec, un de nos lecteurs (voir le 9 août 2014) nous interroge sur ce qu’il nomme notre “thèse du désordre généralisé”. Bien que nous ne voyons pas la chose sous la forme d’une “thèse”, nous acceptons pour la facilité du propos cette façon d’aborder la problématique impliquée, ainsi exposée par le lecteur ...

«Je sais que vous privilégiez la thèse d'un désordre généralisé dans lequel Washington se débat plutôt que l'hypothèse d’un plan de déstabilisation global destiné à contrer l'émergence du Bloc concurrent Brics-OCS. Mais je dois avouer que je suis partagé entre les deux et, comme on dit, la vérité est peut-être au milieu...

»Voici en tout cas un court papier de Voltaire.org qui soutient la thèse inverse à la vôtre, et qui est relativement convainquant, même s'il est toujours facile d'assembler les morceaux a posteriori j'en conviens. Néanmoins une petite critique de la chose de votre part ne serait pas inutile à vos lecteurs me semble-t-il, et en tous cas à moi égoïstement...»

Nous allons faire quelques remarques d’ordre général à partir de la problématique qui nous est soumise, en tentant (c’est beaucoup nous demander mais nous tenterons de nous y tenir) de ne pas aller trop aux détails pour ne pas accabler nos lecteurs. Néanmoins, tout cela doit être évoqué au moins sur la longueur où ça l’est ci-dessous, en sachant, en plus, qu’il existe sur le site des “montagnes de références” permettant d’expliciter ces rapides évocations pour mieux situer le problème qu’évoque notre lecteur selon nos véritables sources et nos raisonnements complétés. Voici donc ces remarques :

1) La “thèse du désordre généralisé” ne concerne pas les USA seuls, ni même peut-être le “bloc BAO” seul selon la terminologie que nous employons, mais bien la situation générale qui dépend du Système, dont l’influence est générale et touche donc tous les acteurs, et influe donc sur le comportement de tous les acteurs. Pour autant, on peut employer le terme “les USA” dans le cours de ces écrits, tant le rôle de cette puissance est important, mais il est impératif d’avoir à l’esprit qu’il ne s’agit en aucun cas, dans notre esprit, ni du deus ex machina, ni de l’inspirateur. (De même, c’est-à-dire selon la même logique de pensée, on ne peut songer aux USA comme à un “empire” selon le sens historique traditionnel du terme. Dans notre conception, sa position de puissance est dès l’origine, de par la similitude des occurrences historiques, dépendante du Système ; les USA sont la chose centrale du Système...)

2). Par conséquent, nous n’opposons pas les USA avec leur “plan de déstabilisation globale” des BRICS/OCS, aux BRICS/OCS parce que la situation n’a certes pas cette simplicité lorsqu’il s’agit d’entités humaines. (Système versus antiSystème, c’est plus simple mais c’est une autre logique opérationnelle.) Comme l’on sait, les BRICS et l’OCS (cette dernière dont on ne parlait plus du tout il y a encore un mois, et qui fait soudain sa réapparition à cause du désordre généralisé, en l’espèce la crise ukrainienne) sont composés de pays qui ne peuvent être considérés comme des ennemis absolus du Système, ni même des USA, qui sont du type “un pied en-dedans, un pied en-dehors” (dans le Système). La Russie, le pays le plus en pointe contre le Système dans le chef des USA, l’est contrainte et forcée (non par la politique extérieure des USA qui est un phantasme qui a disparu depuis longtemps, mais par la politique-Système), – et même il n’est pas complètement contre le Système. Poutine continue à dire qu’une coopération (avec les USA, à l’intérieur du Système, avec le Système) est toujours possible. “Un pied en-dedans, un pied en-dehors”, avec le nombre d’orteils variant, – cela, jusqu’au moment où tel ou tel événement décisif, dont nul ne sait rien, conduira à l’épisode décisif, – lequel ne peut être, nous l’avons si souvent écrit, la victoire de X, Y ou Z (Russie, BRICS, SCO, etc.) sur les USA/ le Système, mais qui sera l’effet décisif des événements sur le Système, faisant basculer décisivement son propre fonctionnement (du système) de la surpuissance à l’autodestruction sans retour. Comment et quand cela se passera, ce n’est pas de notre capacité de prévision, notre seule ligne de conviction étant la suppression du “si” (“si cela se passe”), car cela nous semble inéluctable, et très rapidement. (Il nous paraît impossible et insensé de raisonner d’une façon acceptable au-delà des deux années qui viennent, – et cela, encore, en nous forçant à allonger la prospective.)

3). Par conséquent encore, nous n’avons jamais écarté la possibilité d’un «plan de déstabilisation global destiné à contrer l'émergence du Bloc concurrent BRICS-OCS». Ce plan existe, comme il en existe des myriades d’autres, des “Grands Jeux”, des “grands desseins”, des “complots”, des “manipulations”, des false flag, des montages, des démontages, etc., dans tous les sens et de toutes les façons possibles. (Ne pourrait-on dire, par exemple, qu’il existe un plan de déstabilisation permanent du Système, via la NSA et la CIA, contre l’Allemagne, et ne chuchote-t-on pas que l’un ou l’autre service tient Merkel par l’un ou l’autre “coup fourré” ? Laissons chuchoter...) Jamais il n’y a eu autant de manipulations, de “complots”, de “coups fourrés”, de désinformation, etc., – et l’on pourrait dire finalement que ce qu’on nomme encore “politique” n’est, du fait des acteurs-sapiens, pratiquement fait que de cela. C’est justement pourquoi leur “politique” est si complètement promise au désordre, puisqu’elle finit par se résumer à la politique-Système qui, elle, par sa nature même de production du Système, ne peut engendrer et n’engendre que le désordre.

3bis). Nous ne rechignons nullement à nous faire l’écho de ces diverses manigances, voire d’en suggérer d’inédites lorsque la chose est plaisante et originale, et surtout lorsqu’elle s’inscrit parfaitement dans une situation dont l’effet général évident et démonstratif est effectivement d’alimenter, comme toute autre manigance de cet ordre, le “désordre généralisé”. (Encore tout récemment : voir le 9 août 2014 [“Kiev la folle”] et le même 9 août 2014 [“MH17 et avion de Poutine”].) Les questions diverses à se poser à l’égard de toutes ces machinations sont de cet ordre, pour nous dans tous les cas : “Produisent-elles l’effet attendu ?”, “Sait-on exactement l’effet qu’on attend d’elles ?”, “Jusqu’où est-on capable de les contrôler ?”, “Ne se contredisent-elles pas constamment les unes les autres, s’autodétruisant par conséquent, même lorsqu’elles viennent de services ou d’agences en théorie ‘du même côté’ ?” “Leur utilité n’est-elle pas finalement, au travers de leurs contradictions et de leurs interférences, de participer au renforcement et à la rapidité du désordre généralisé dont personne ne sait rien ni de l’origine, ni de l’issue si l’on s’en tient au seul facteur humain ?”... Et ainsi de suite, et l’on devine dans quel sens vont nos réponses : dans le sens qui nous paraît évident, qui nous paraît un renforcement constant du “désordre généralisé”. Y a-t-il une tendance d’importance, un événement capital qui, depuis la fin de la Guerre froide, et en mode-turbo depuis 9/11, n’ait contribué puissamment au “désordre généralisé” ? A-t-on encore assez de mémoire pour se rappeler l’hégémonie absolue, y compris, de la façon soft et stabilisée qui importe, qu’exerçaient les USA/le Système en 1989/1991, sur la quasi-totalité du monde, y compris sur un Saddam ou sur un Assad, ce qui impliquait surtout qu'il n'y fallait rien changer ? Qui a, au contraire, lancé toutes initiatives déstabilisantes, c'est-à-dire les tendances au “désordre généralisé” depuis ces 25/15 dernières années, sinon les USA/le Système, y compris avec 9/11 et les manigances qui l’ont accompagné ? Qui dira la stupidité extraordinaire, alors que la Russie conduite par Eltsine-vodka et le capitalisme sauvage importé des USA était toute entière soumise au Système, d'avoir lancé en 1992-1993, dans le chef des USA bien entendu, une politique d'expansion de l'OTAN qui accoucha d'un Poutine et de la résurgence russe des années 2000 ? Qui, enfin, peut écarter l’enseignement évident que le principal producteur du désordre généralisé est bien l’ensemble USA/Système, et par conséquent idem pour toutes les manigances développées ?

4). Mais au-delà de tout ce qui a précédé, voici l’essentiel. Il doit être compris que notre méthodologie privilégie l’idée d’une période métahistorique (voir la dimension métahistorique), où nous jugeons l’action humaine comme négligeable pour l’essentiel, sinon comme l'outil au service de tendances générales qui dépassent manifestement cette action. (Voir Joseph de Maistre, maître de cette méthodologie : «On a remarqué, avec grande raison, que la révolution française mène les hommes plus que les hommes la mènent... [...] Les scélérats mêmes qui paraissent conduire la révolution, n'y entrent que comme de simples instruments...») Nous envisageons évidemment qu'un certain nombre de lecteurs se méfient ou refusent cette logique, ou n’en tiennent aucun compte. Nous comprenons parfaitement ces réticences ou ces fin de non-recevoir, mais nous demandons pour nous, non, nous exigeons une attitude rationnelle. Lorsque nous parlons d’un “désordre généralisé”, nous ne soumettons pas ce diagnostic à une raison qui se cantonnerait aux seules actions humaines. Nous demandons à la raison d’envisager autre chose, en lui signalant qu’il y eut d’autres temps où des êtres humains qui n’étaient pas des illuminés destinés à l’asile psychiatrique (parmi nos amis et certes sans prétendre à leur hauteur, Platon, Plotin, Dante, Pascal, Maistre, etc.) utilisaient leur raison de cette façon. En d’autres termes, l’appréciation de “désordre généralisé” ne peut être soumise à la seule sanction de l’activité humaine, et même l’action humaine que la raison trahissant ainsi sa mission originelle (ce pourquoi nous la disons raison subvertie) classerait arbitrairement selon une maîtrise et un plan ordonné, peut devenir un élément de ce “désordre généralisé” ; comme on l’a vu plus haut, tous les événements actuels peuvent être appréciés de cette façon, – essayez donc, vous verrez, votre raison vous en sera reconnaissante sans que vous ayez à vous coiffer d’un entonnoir...

5). Bref, nous faisons appel à une logique qui n’est pas celle des seuls événements humains et nous refusons que cette logique soit condamnée au nom de la logique des seuls événements humains. Face à ce qui est un impératif de notre conception rationnelle à nous, à dedefensa.org, donc un impératif de notre méthodologie, il reste toujours la possibilité de zapper, et de laisser dedefensa.org à ses phantasmes... Auparavant, on répondra à cette question : tous nos commentaires, toutes nos analyses, toutes nos explications, toutes nos observations, découlent de cette “logique qui n’est pas celle des seuls événements humains” et utilisent la méthodologie qui va avec ; le résultat, – c’est-à-dire nos commentaires, nos analyses, nos explications, nos observations, – est-il celui de la folie ou du déséquilibre mental, et par conséquent sans intérêt sinon comme objet de laboratoire, – à l’heure où nombre d’esprits rationnels mais inquiets s’interrogent justement à propos du bien-fondé et de la pertinence de nombre de productions des laboratoires ?

 

Mis en ligne le 13 août 2014 à 12H08

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