Aux USA, après l’automobile l’acier et ses exigences protectionnistes

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L’industrie du système, ou ce qu’il en reste, prend goût à l’interventionnisme de la puissance publique aux USA. On comprend cela, puisque cet interventionnisme se chiffre en $milliards, directement ou indirectement. Au reste, ce n’est que proclamer ouvertement ce que les USA pratiquent d’une façon à peine dissimulée depuis 1945, notamment au niveau de l’armement. En bref pour 2008, – après l’automobile, c’est l’acier.

L’industrie de l’acier demande à son tour une aide de l’administration fédérale, mais de façon indirecte, en imposant aux grands programmes de travaux que l’administration Obama veut lancer une clause de “buy American”, qui inclurait évidemment et prioritairement l’acier. L’industrie de l’acier aux USA a toujours eu des revendications très protectionnistes et, cette fois, elle les applique au plan de “grands travaux” (le soi disant new New Deal d’Obama), qui devrait comprendre des routes, des ponts, des bâtiments, etc., tout cela grand consommateur d’acier.

Selon Reuters, ce 2 janvier 2009:

«The ailing U.S. steel industry is pressing President-elect Barack Obama for a public works plan that could be worth $1 trillion over two years to boost flagging demand for U.S.-made steel, the New York Times reported in Friday's editions. Daniel DiMicco, chairman and chief executive of Nucor Corp, a giant steel maker, told the paper the industry was asking the incoming administration to “deal with the worst economic slowdown in our lifetime through a recovery program that has in every provision a ‘buy America’ clause.”

»The industry supports building mass transit systems, bridges, electric power grids, schools, hospitals and water treatment plants – all of which would require large amounts of steel. “We are sharing with the president-elect's transition team our thoughts in terms of the industry's policy priorities,” Nancy Gravatt, a spokeswoman for the American Iron and Steel Institute, was quoted as saying.

[…]

»Since September, U.S. steel output has plunged about 50 percent to its lowest point since the 1980s, largely because construction and auto production have fallen sharply. The fall-off in production of appliances, machinery and other electrical equipment has also reduced steel orders, sending the price of a ton of steel down by half since late summer.»

Les importations d’acier comptent pour 30% de la consommation d’acier aux USA, aux dépens des producteurs US. Dans le contexte actuel, le marché de l’acier tend à se réduire fortement, affectant autant les producteurs US que les producteurs étrangers. L’argument des producteurs US est que, dans cette conjoncture de crise, il est impensable que les dépenses publiques envisagées pour relancer l’économie profitent en partie à des industries étrangères. L’argument est en nickel, sinon en bon acier US. On doute qu’Obama puisse y résister, s’il en a même l’idée.

Une clause de “buy American” dans ce contexte, pour un secteur ou pour un volume de dépenses publiques, devrait inévitablement attirer des revendications dans le même sens d’autres secteurs, selon la même logique inattaquable. Nous sommes en temps de crise et la logique protectionniste, dénoncée par tous les théoriciens économistes bon chic bon genre, a désormais de beaux jours devant elle. Elle complète d’une façon naturelle la vague d’interventionnisme de la puissance publique née à l’automne dernier.

La question est grande importance. Elle constitue notamment un point important d’affrontement, en Europe, entre les Français (Sarkozy) et les Britanniques (Brown), par ailleurs d’accord sur de nombreux autres points. Elle heurte de plein fouet l’un des dogmes fondamentaux des institutions européennes et de leur “pensée” économique. Si Obama suit les producteurs d’acier et le reste, s’il ajoute effectivement à son programme interventionniste un volet protectionniste (auquel les démocrates sont en général plutôt favorables), il se heurte directement aux institutions européennes et conforte les Français qui veulent une protection affirmée de l'Europe. C’est-à-dire que toutes les perspectives d’entente et de coopération saluées par avance avec fièvre et enthousiaste, avec l’arrivée de la nouvelle administration, commencent à apparaître largement compromises. Idem pour les projets ambitieux et originaux de Gordon Brown d’une “nouvelle alliance” avec les USA, fondée sur les thèses de la doctrine GSD, ou Global Social Democracy, appuyée sur l’idée d’un recyclage du capitalisme avec un interventionnisme massif pour permettre de lui donner une “face humaine”, avec maquillage social, mais en conservant impérativement une situation de libre-échange aussi complète que possible.

C’est-à-dire: le protectionnisme, voilà l’ennemi; ce qui signifierait: Obama, voilà l’ennemi?


Mis en ligne le 2 janvier 2009 à 17H28