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Article : L'extraordinaire mémo BHO

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purge

Oscar

  30/11/2012

A peut-être mettre en relation avec la purge actuelle de l’état major US. Exemple : le remplacement du général Carter Ham par David Rodriguez à la tête de l’Africom. Exemple parmi d’autres mais qui concerne plus particulièrement la politique étrangère de la France (si elle en a encore une en propre) puisque cela implique la situation au Sahel (nord Mali).
La thèse de la paranoïa de l’administration renforce bien sûr votre théorie de l’autodestruction du système. Cependant, et sans tomber dans le complotisme exacerbé des sources que vous citez dans votre article, il y a certainement aussi une véritable opposition quant à la direction du “leadership mondial des Etats-Unis”.
Le caractère public de cette directive montre peut-être l’extension du domaine de la lutte dans les diverses structures administratives jusqu’aux niveaux subalternes. Tentative de se prémunir d’un retour de bâton suite à ladite purge en cours ?

24h chrono

ZC

  30/11/2012

mais tout est dans cette serie!!!
Hollywood a tout inventé et il est dommage que la réalité ne rejoigne pas la fiction;

Qui serait l'insider

Jean-Paul Baquiast

  30/11/2012

Très important article, que toute la presse européenne devrait reprendre, si elle jouait son rôle de whistle blower.
Reste la question de savoir 1/ si les auteurs de cette circulaire ont des menaces en vue, suffisamment fortes pour justifier de telles mesures, et si oui quelles sont ces menaces (les hawks d’Israël, des comploteurs militaro-républicains extrèmes plutôt que l’Iran, bien improbable)  ou 2/ si ceci ne prépare pas une prise de pouvoir dictatorial venant de l’inside du système, se sentant de plus en plus menacé par les peuples ne supportant plus la crise provoquée en partie par eux.

Je reformule ma question

Jean-Paul Baquiast

  30/11/2012

Il est important de signaler le plus largement possible cet article de Dedefensa qui signale un grave problème, nous concernant aussi en Europe: quelles sont les menaces intérieures contre lesquelles la Maison Blanche veut mobiliser les forces de répression:  des militaires, des hawks israéliens infiltrés, des trotskystes (comme on aurait dit jadis)? Je ne crois guère pour ma part à l’Iran non plus qu’à des terroristes islamistes, malgré leur danger potentiel.

Mais on doit tout autant se demander si ce n’est pas avec cette campagne le Système néolibéral manipulant la Maison Blanche qui prépare sa propre conquête dictatoriale du pouvoir, aux USA et chez les “alliées européens”, face à des peuples révoltés par lui?

pourquoi pas !

olivier taurisson

  30/11/2012

A lire votre article , je ne peux m’empêcher de soupçonner le Système de créer encore une fois un “complot terroriste” fantôme
( avec tout le décorum habituel) pour taper en plein dans le monde Orwellien… Ah ces fanatiques !!

Informez nous de la suite...

Jean-Paul Baquiast

  01/12/2012

Dans la mesure de vos possibilités, (qui sont plus grandes que les nôtres) please dear Philippe Grasset, tenez nous informés des suites que pourraient avoir cette extraordinaire affaire.
Comme prévu, pas un mot nulle part la dessus sur les médias français.

Une explication possible

Michel DELARCHE

  01/12/2012

Vu le ton pompeusement bureaucratique de ce document, il a dû être pondu par un quelconque comité d’ “experts” travaillant pour le Dpt de la Sécurité Intérieure, sans doute sur la base d’une commande faisant suite à l’affaire WikiLeaks (les avocats du soldat Bradley Manning, auteur des fuites, on d’ailleurs dénoncé les conditions particulièrement dures de sa détention sur la base de Quantico, VA), et puis cette prose a fait son petit bonhomme de chetmin dans les replis intestinaux de l’appareil washingtonien avant d’être récemment excrété.

Amener le système à s'autobloquer

Dedef

  03/12/2012

Je rappelle que l’objectif d’Assange avec Wikileaks n’était pas de faire des révélations, mais d’amener le système à s’autobloquer en cherchant à se protéger.

Ca progresse.

Dans une telle situation tout système bureaucratique a 3 priorités, dans l’ordre:

1 - se protéger des espions des autres services.
2 - espionner les autres services.
3- faire le travail qu’il est censé faire. Ceci n’est que sa 3ème priorité

en conséquence le désordre opérationnel va en effet augmenter.

Frédéric lordon et la corruption psychologique institutionnelle.

GEO

  05/12/2012

Il s’agit dans ce cas de la science économique et de la presse qui lui est liée.
(Le texte d’origine présente une ouverture théorique “spinoziste” qui vaut aussi le détour.)

http://blog.mondediplo.net/2012-11-21-Economistes-institutions-pouvoirs

(…...)

si l’on est enclin à penser ce qu’on est institutionnellement déterminé à aimer penser —, alors c’est ce bonheur de penser ce qu’on pense, parce que cela procure toutes sortes de joie, qui est au principe pour chacun du sentiment de la parfaite bonne foi, du parfait accord avec soi-même, et de la complète indépendance, de la complète « liberté » de penser.

Il est donc probablement inutile d’aller chercher même les économistes de service sur le terrain de la corruption formelle : leur corruption est d’une autre sorte. Elle est de cette sorte imperceptible et pernicieuse qui laisse en permanence les corrompus au sentiment de leur parfaite intégrité, dans leur pleine coïncidence avec les institutions qui, dirait Bourdieu, les reconnaissent parce qu’ils les ont reconnues.

Les effets d’harmonie sociale qui accompagnent les normalisations institutionnelles réussies rendent donc superflue la thèse formelle du conflit d’intérêt. De ces économistes qui, ignorant tout de l’idée de critique, rejoignent ouvertement le camp des dominants, il n’y a pas même à dire que ce sont des vendus, car ils n’avaient pas besoin d’être achetés : ils étaient acquis dès le départ. Ou bien ils se sont offerts avec joie. La thèse du conflit d’intérêt d’ailleurs, à sa lettre même, est vouée à rester impossible à établir. De tous les arguments, où le misérable le dispute au ridicule, avancés par exemple par le cercle des économistes (en fait certains de ses membres) pour sa défense, il n’y en a qu’un qui soit un peu robuste : tous ces gens-là mettront quiconque au défi de « prouver » le conflit d’intérêt. Et on ne le prouvera pas ! On ne le prouvera pas, non pas parce qu’on aura du mal à mettre la main sur les pièces à conviction décisives, mais parce qu’il n’existe pas.

Si je me suis livré à ce bref détour théorique en introduction, c’est précisément pour rappeler qu’il existe bien d’autres modes de l’alignement des discours que le conflit d’intérêt, et qu’en lieu et place de la transaction monétaire explicite et consciente, il est une myriade de transactions sociales implicites et le plus souvent inconscientes qui concourent bien plus sûrement au même résultat, avec en prime le superbénéfice de la bonne conscience pour tout le monde, ce supplément heureux de toutes les harmonies sociales.

(….)

la question n’est pas seulement celle des économistes supplétifs de la mondialisation, mais aussi celle des médias qui en sont les complices, solidaires, et qui les ont imposés sur un mode quasi-monopolistique — tout ce petit monde vantant par ailleurs les stimulants bienfaits de la concurrence non distordue… Car à la fin des fins, qui a promu ces individus, dont certains sont des olibrius ? Qui les a poussés sur le devant de la scène ? Qui, par exemple, s’est porté partenaire avec empressement, il y a une dizaine d’années, de cette navrante pantomime qu’est le « prix du jeune économiste » — dont Antoine Reverchon dans un numéro récent du Monde Economie n’hésite pas à faire un modèle de pluralisme, on croit qu’on rêve…

Comme on sait, cet effet d’imposition a été d’autant plus puissant qu’il a été le fait de la presse dite de gauche, je veux dire de fausse gauche : Le Monde, Libération, Le Nouvel Observateur, France Inter, et jusqu’à France Culture — la honte… —, et ceci depuis des décennies. La complicité organique de ces médias avec ces économistes a passé les seuils où toute régulation intellectuelle a disparu. Avec ce sens très particulier de l’évidence qui est l’un des charmes de la bêtise, un article de ce même numéro du Monde Economie s’interroge en toute candeur : « Qui n’a jamais apporté ses conseils à une société privée ? A une banque ? A un gouvernement ? » Mais enfin, bien sûr ! Quel économiste n’a jamais fait ça ?... Mais il faudrait faire l’analyse complète de ce numéro décidément remarquable du Monde Economie, comme d’ailleurs de toutes ces opérations en mode damage control de cette presse auto-commise à la défense des experts organiques de l’ordre néolibéral, Dominique Nora pour le Nouvel Obs , ou l’inénarrable Eric Le Boucher pour Slate , journalisme de service au service des économistes de service.

(….....)

la science économique dominante, de son propre mouvement, en suivant ses seules pentes « intellectuelles » (si l’on peut dire… ) et ses orientations théoriques, a donné son aval avec enthousiasme au tissu d’âneries dont les mises en pratique ont conduit à la plus grande crise de l’histoire du capitalisme. Je vous propose alors l’expérience de pensée suivante — c’est une contrefactuelle : période 1970-2010, soumissions aux revues, avec toutes les déclarations d’intérêt en bonne et due forme, des papiers de Fama, Jensen, Merton, Scholes, Summers, Schleifer, etc. Taux de rejet pour cause de collusion trop manifeste avec des intérêts privés ? Zéro, évidemment. C’est donc, là encore, toute une configuration institutionnelle, celle du champ de la discipline, qui a produit cet état dans lequel le discours de la science économique dominante est devenu si adéquat aux intérêts des dominants que se faire payer pour dire quelque chose qu’on a spontanément et « scientifiquement » pensé ne peut pas porter à mal.

Voilà alors que, par une espèce de tropisme du pire, le système français, pris de décalcomanie institutionnelle, se met à imiter ledit modèle étasunien. Et la recherche est désormais en proie au fléau des fondations. Dans son ouvrage, Laurent Mauduit fait de curieuses différences en parant PSE ( Paris School of Economics) de tous les mérites, pour réserver à TSE (Toulouse School of Economics) le rôle du vilain. Plutôt que de se perdre dans des différences secondes, c’est le principe premier lui-même, celui de l’organisation par fondation, qu’il faudrait questionner. Car en voilà une autre harmonie sociale, institutionnellement équipée, et là aussi, tout s’y emboîte à merveille : la science-scientifique la plus consacrée a pris le pli de dire d’elle-même des choses qui se trouvent n’offenser en rien les puissances d’argent (et je parle par litote) ; assez logiquement les puissances d’argent commencent à se prendre de passion pour une science si bien disposée et se proposent de « l’aider », comme une sorte de devoir citoyen sans doute…

Mais qui peut sérieusement croire un seul instant qu’Exane, Axa, Boussard et Gavaudan Gestion d’Actifs (puisque ce sont les « partenaires » de PSE) pourraient ainsi offrir de larges financements si ces généreux mécènes n’étaient pas de quelque manière assurés d’avoir à faire à une institution qui, majoritairement, ne viendra à aucun moment défier sérieusement leurs intérêts fondamentaux sur le plan intellectuel ? Voici donc ce qu’on peut lire sur le site de PSE : « Le rôle des partenaires privés est central : leur engagement contribue au décloisonnement entre recherche académique et société civile ». On notera d’abord que ces décloisonnements s’effectuent toujours dans la même direction, et ensuite que c’est là très exactement l’argument sans cesse rabâché par le Cercle des économistes pour justifier ses agissements : « si nous sommes dans les banques et les conseils d’administration, c’est pour sortir de notre tour d’ivoire, aller au contact de la réalité, et parce que nous avons le goût du terrain »…

(…..) il faut construire autre chose (…) Autre chose qui ne nous défende pas seulement contre la corruption par les pouvoirs constitués, mais qui nous protège aussi de l’asservissement au pouvoir diffus de ce qui se donne à un moment donné comme le cercle des opinions légitimes, à l’intérieur duquel sont enfermées les seules différences tolérées. On ne prend conscience de cet effet particulièrement pernicieux qu’à l’occasion de grands événements qui déplacent d’un coup les frontières tacites du dicible et de l’indicible, du pensable et de l’impensable, choc massif de délégitimation qui laisse soudainement à découvert les amis de l’ancienne légitimité.

A cet égard, l’effet de la crise financière présente aura été des plus amusants, en tout cas des plus spectaculaires. Ainsi a-t-on vu quasiment brandir le poing, parfois même dire « capitalisme », des économistes qui en quinze ans n’avaient rien trouvé à redire ni à la mondialisation, ni à la financiarisation, ni à l’Europe libérale — contestations alors extérieures au cercle de la légitimité, où il fallait impérativement se maintenir si l’on voulait continuer d’avoir tribune régulière au Monde ou à Libération, droit d’être invité à donner conseil au Parti socialiste, et peut-être plus tard de toucher la main d’un ministre.

(…......)

Dans sa lettre 30 à Oldenburg, Spinoza écrit ceci : « si ce personnage fameux qui riait de tout vivait en ce siècle, il mourrait de rire assurément ». On voudrait vraiment que le rire ne soit pas la toute dernière chose qu’il nous reste face à ces gens sans principe, ces opportunistes, et ces demi-retourneurs de veste qui sont le fléau de la pensée critique — dont c’est normalement la fonction de penser contre un air du temps, et d’en assumer le risque de minorité. Mais en parfaits individus libéraux, tous ces gens sont de petites machines procycliques.

C’est le déséquilibre de nos institutions qui détruit les régulations de la décence et permet que soient à ce point foulées au pied les valeurs intellectuelles les plus élémentaires. On peut donc dire à quelques années d’écart une chose et son contraire, mais sans un mot d’explication, ni le moindre embarras de conscience — et toujours au nom de la science !

Ce ne sont pas des chartes qui nous délivreront de ça, voilà pourquoi il importe de construire autre chose. Autre chose qui affirme qu’une pensée vouée à la simple ratification de l’ordre établi ne mérite pas le nom de pensée. Autre chose qui élise la vertu contracyclique de la critique comme notre forme de la vertu. Autre chose, en somme, qui, par l’effet de sa force collective institutionnalisée — donc en extériorité — nous attache à cette vertu en nous déterminant à aimer penser autrement.