SitRap-USA2025 : Bye bye Tulsi, – No no, Come back !

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SitRap-USA2025 : Bye bye Tulsi, – No no, Come back !

On saluera dans cet article le courage et le caractère superbe de Tulsi Gabbard qui s’est fait un honneur et une gageure d’affronter le Monstre du Loch Ness, version 2025. Depuis ces mots extrêmement brutaux prononcés dans son ‘Air Force One’, et répétés avec délice, on ne donnait pas cher de sa peau :

CNN : « Vous avez toujours dit que vous ne pensiez pas que l’Iran devrait se doter de l’arme nucléaire. Tulsi Gabbard a témoigné en mars que l’Iran ne fabriquait pas d’arme nucléaire. »

Trump : « Je me fiche de ce qu’elle a dit. Ils étaient très proches d’obtenir l’arme nucléaire à ce moment-là. »

Cette introduction marque simplement une appréciation personnelle et admirative de notre part, qui n’a quasiment jamais faibli depuis que Gabbard est entré dans “la grande politique” washingtonienne, en 2015. Toutes les remarques, méprisantes, venimeuses, sous-entendues, diffamatoires, insultantes, etc., qui sont venues depuis pour réduire son rôle et son parcours politiques ne nous ont jamais vraiment intéressés. Nous parlons de faits et pouvons imaginer le courage nécessaire qu’il faut pour tenir dans cette jungle marécageuse et puante qu’est la capitale de “l’Empire”-de-la-gangrène en train de pourrir sur pied à une vitesse stupéfiante.

Donc, Gabbard devait être virée après cette leste réponse du président, qui lui était soufflée par ses “conseillers” neocon type-Graham. Mais, dit le proverbe trouvé dit-on par le roi Macron Ier, récemment méchamment réprimandé et conchié en marge du G7 :

« Souvent Trump varie, bien fol est qui s’y fie » (“Trump often varies, so you are crazy to trust him.”)

Ainsi apprend-on dans les couloirs,
1) qu’effectivement Graham avait mené une campagne-neocon auprès de son pote-président pour obtenir le départ de Gabbard ;
2) qu’il semble bien qu’entretemps le vent ait tourné et que, toute réflexion faite, Gabbard est fort bien là où elle est, et de fort bon conseil, et qu’il n’est donc plus question de la pousser vers la sortie tandis qu’on repousse de deux semaines la décision de se joindre à l’attaque de l’Iran par Israël. Diable ! Triste retard qui nous prive d’une belle tranche de bombardements “indiscriminés dans la précision”, et des glapissements joyeux de Netanyahou qui s’ensuivent.

Alexandre Douguine résume ainsi l’épisode, nous apprenant au passage que Trump est revenue à de très bons termes avec l’hyper-‘America First’ Steve Barron, autre adversaire impitoyable de la bande de folles qui accompagne Graham.

« Aujourd'hui, les néoconservateurs Lindsey Graham et Tom Tillis (reconnus comme terroristes en Fédération de Russie) sont hystériques face à la décision de Trump prise de retarder de deux semaines son choix de participer (ou non) à l’attaque de l’Iran. Les gens de MAGA, de leur côté, considèrent cette situation comme une victoire importante. Après le déjeuner amical de Trump avec Bannon, des informations ont commencé à circuler selon lesquelles Trump avait renoué les relations avec Tulsi Gabbard, dont les néoconservateurs réclamaient le limogeage de son poste de directrice du Renseignement nationalCeci est aussi intéressant : si MAGA est l'illibéralisme (populisme) de droite, il y a aussi des opposants à l'interventionnisme à gauche, des populistes de gauche - Bernie Sanders, Alexandria Occacio-Cortez, etc. »

Ci-dessous, on fait suivre ces diverses observations sur les innombrables batailles en cours à ‘D.C.-la-folle’ d’un texte d’un commentateur italien, Davide Malacaria, où Tulsi Gabbard tient déjà une place non négligeable alors que la réflexion  date d’avant l’attaque de l’Iran par Israël et des accrocs, raccommodés semble-t-il, entre Trump et Gabbard. Le texte est en effet du 11 juin, la traduction française étant du 19 juin., et le sujet principal, d’ailleurs avec des références appuyées à des commentaires d’Alastair Crooke, est bien entendu l’Ukraine et pas du tout, ni Israël, ni l’Iran. Mais le spectacle est bien le même : la (les) bataille(s) fait (font) rage à Washington D.C.

Les acteurs sont toujours les mêmes, y compris avec la directrice nationale du renseignement Gabbard et le secrétaire à ladéfense Hegseth, et l’adversaire étant plus que jamais le sempiternel DeepState, ou l’habituel CMI (complexe militaro-industriel) si l’on veut. Il est intéressant pour la chronique des classements idéologiques que des plans de réductions de dépense du Pentagone décidés par Hegseth soient décrits comme une “guerre avec le CMI”, – et, pour nous, de constater que la remarque ci-dessous aurait bien convenu, si les tremblements du World Trade Center du lendemain l’avaient permis, au discours du 10 septembre 2001, de Donald Rumsfeld :

« Ce plan, développé par Hegseth, fait l’objet d’un article dans Responsible Statecraft, dont le titre est évocateur : “Le Secrétaire à la Défense déclare la guerre au complexe militaro-industriel”. »

Pour rappel et pour souvenir, nous avions présenté ainsi ce discours du 10 septembre 2001, qui est là pour nous rappeler que la guerre interne de Washington D.C ., bien plus que celle d’Ukraine ou celle d’Israël est “la mère de toutes les ‘Long Wars’”, avec pour point de mire l’effondrement de la civilisation pourrie par quatre-cinq siècle de modernité :

« C’est assez rare pour être souligné : voilà un discours officiel qui mérite d'être lu et relu tant il a de significations profondes. Il s'agit du discours de Donald Rumsfeld, le 10 septembre 2001 au Pentagone. Un tel discours pourrait avoir été prononcé par Mao à la veille de la révolution culturelle, ou par Gorbatchev sur le point de lancer sa glasnost. Les références à la guerre froide ne manquent d'ailleurs pas dans le discours de Rumsfeld : la bureaucratie monstrueuse du Pentagone est une sorte de dinosaure rescapé de la guerre froide, et une structure aussi archaïque et paralysante que la bureaucratie de l'Union Soviétique à la veille de la chute de l'empire soviétique. »

Terra Incognita à ‘D.C.-la-folle’

La présentation de cet article de Davide Malacaria, qui nous permet de renforcer l’idée de l’importance de Tulsi Gabbard dans l’actuelle “guerre de D.C.”, nous indique également combien l’essentiel se joue aux USA, à Washington, bien plus qu’ailleurs. Pour nous, ce n’est que répéter la même anthième, y compris d’un paragraphe à l’autre, puisque nous ne cessons de situer la matrice, le cœur et le caractère fondamental de la bataille suscitée par la GrandeCrise à Washington D.C. Ainsi le veut l’article de Malacaria, qui semble dépassé par les événements survenus depuis le 11 juin, mais qui ne l’est pas du tout, car tous ces événements depuis tant et tant de temps, depuis Rumsfeld, depuis l’assassinat de JFK, depuis la Grande Dépression et FDR, depuis la Guerre de Sécession, etc., etc., – constituent la même mise en cause de ce monstre mis à bas en même temps que la Grande République de Jefferson-Washington, et qui n’a cessé de dévorer depuis toutes les ambitions et les espérances des Founding Fathers, en faisant triompher la modernité.

«Quoiqu’on pense des vertus théoriques et structurelles de l’américanisme, il faut observer que, dès l’origine, la Grande République est marquée par des tares qui n’ont jamais été réduites. La fameuse lettre de Jefferson à Washington, au printemps 1791 (cette lettre est une référence du parti démocrate qui sera créé plus d’un demi-siècle plus tard) dénonce déjà la corruption des élus, l’interférence des groupes d’intérêt, etc. Cette situation ne cessera jamais. A sa mort, en 1824, les derniers mots du même Jefferson sont : “Tout, tout est perdu”. La corruption de l’administration Lincoln pendant la guerre de Sécession est connue, avec un ministre de la Guerre mettant en place une stratégie de transport par chemin de fer alors qu’il reste un membre actif de la plus importante société de chemin de fer. Quinze ans plus tard, la corruption du président Grant est un des sommets du système. L’action des grands trusts, des archi-millionnaires qui contrôlent le gouvernement, de Wall Street, de Hollywood, etc, tout cela parcourt l’histoire des USA. Finalement, GW et Enron ne font que suivre la tradition. De ce côté, il n’y a pas vraiment décadence puisqu’au départ il n’y a pas vertu.» (notre article du 3 décembre 2012)

Voyez le titre du texte de Malacaria sous forme d’une question,, – mais qu’importe cette questions sempiternelle, sans réponse puisque la réponse ne peut être que l’anéantissement de ‘D.C.-la-folle’ et tout ce qui suit pour laisser la place à un nouveau cours de la métahistoire, une terra incognita qu’Hollywood n’a jamais osé envisager dans ses scénarios de ‘blockbusters’.

 

« La politique étrangère des États-Unis est-elle hors du contrôle de Trump ? 

« Voici la réalité de ce qui est en jeu, de ce que nous affrontons aujourd’hui, car pendant que nous sommes ici, plus que jamais, nous sommes tout proches de l’annihilation nucléaire, tandis que les guerres de l’élite politique alimentent imprudemment la peur et la tension entre les puissances nucléaires. » C’est ainsi que Tulsi Gabbard s’est exprimée dans une vidéo inhabituelle, publiée sur YouTube après sa visite à Hiroshima, où elle appelle les peuples à faire entendre leur voix pour arrêter cette dérive.

Gabbard sait de quoi elle parle, puisqu’elle dirige le renseignement national américain et a accès aux informations les plus confidentielles des agences fédérales. Ce n’est pas une plaisanterie de mauvais goût, mais la réalité dramatique, qui s’est encore accentuée après l’attaque contre les bombardiers stratégiques russes la semaine dernière.

Cette attaque cache des arrière-plans inquiétants, au-delà des motifs évoqués que j'ai évoqués dans une note précédente, à savoir faire échouer le processus de paix d’Istanbul prévu pour le lendemain, et déclencher une réaction russe pour amorcer un conflit direct avec l’Occident.

Alastair Crooke en parle dans un article publié sur le site du Ron Paul Institute, où il décrit ces arrière-plans. La première, qui découle du fait que les Ukrainiens ne pouvaient pas mener une opération aussi sophistiquée en solitaire, est que c’est l’Amérique qui a coordonné l’opération, évidemment en collaboration avec la Grande-Bretagne (Londres dirige également l’Union européenne, en tirant les ficelles des marionnettes placées au sommet de l’UE et de l’Allemagne).

Ce contrôle extérieur de l’attaque est évident, mais Crooke explique que peut-être Trump a donné son feu vert en croyant à ce que lui ont rapporté ses conseillers, selon lesquels la Russie était proche de l’effondrement, et qu’en augmentant la pression — par des attaques stratégiques visant à dégrader le moral russe — Moscou serait contrainte de céder.

Dans ce cas, Trump aurait été victime du manque de réalisme de ses conseillers, perdus dans leurs rêveries et incapables de comprendre la véritable force économique et militaire de la Russie. Crooke ne le précise pas explicitement, mais en citant un tweet de Trump — « Des choses terribles, si ce n’était pas moi, des choses VRAIMENT TERRIBLES arriveraient à la Russie » — il est clair que, si cette approbation existait, elle aurait été limitée.

La seconde hypothèse plus crédible, selon Crooke, est que « peut-être ses conseillers, involontairement ou délibérément, ont ‘trompé’ Trump et son programme de normalisation des relations avec la Russie ». L’initiative d’attaquer les bombardiers russes aurait été prise à l’insu du président, et justifiée par la suite sous le prétexte que « la CIA a simplement agi en fonction d’une vieille directive présidentielle autorisant des attaques en profondeur à l’intérieur du territoire russe. »

Au-delà de nos considérations, selon Crooke, dans les deux cas, ce qui s’est passé signifie « une seule chose : que Trump n’a pas le contrôle ». Il précise son éclairage en expliquant qu’un objectif stratégique de l’attaque — qui a réussi et a prouvé qu’elle était « réalisable » — est que cela a « imposé à Trump la dure réalité de ne pas avoir le contrôle de la politique étrangère des États-Unis […]. Le Deep State collectif lui a fait comprendre cela. »

À ce propos, il cite le général Michael Flynn, qui explique : « L’État profond agit désormais en dehors du contrôle de la direction élue de notre nation… les hommes de l’État profond s’efforcent de provoquer la Russie pour ouvrir un affrontement à grande échelle avec l’Occident. »

L’alerte lancée par Gabbard, sous une forme si inhabituelle, semble confirmer les difficultés de Trump, qui aurait pu lui demander de prendre cette initiative surprenante.

Crooke explique aussi que l’attaque contre la Russie a exploité une vulnérabilité du Traité Salt-Start sur les armes nucléaires, en particulier l’article XII du traité START qui exige que les puissances signataires « exposent visiblement » tous les bombardiers lourds à l’intérieur de leur base aérienne. Ceci afin qu’ils puissent être surveillés par des satellites ennemis pour empêcher tout “first strike” d’une des parties.

L’attaque contre les bombardiers russes fragilise donc un des piliers de l’accord sur la dissuasion nucléaire mutuelle, avec toutes les conséquences qui en découlent.

Selon Crooke, la Russie préparerait une réaction différente de celles qu’elle a déjà menées, qui s’est traduite par une intensification des attaques conventionnelles en Ukraine, mais cela pourrait ne pas être le cas.

Il est évident que Trump, lors de l’appel apaisant avec Poutine, lui aurait demandé d’être patient, de répondre de manière mesurée pour ne pas le mettre entre les mains de ses ennemis (des ennemis extérieurs pour le tsar, des ennemis intérieurs pour le président américain).

Et, en même temps, il lui aurait assuré qu’il ferait tout pour éviter de telles initiatives. Il est probable que Poutine ait accepté, conscient des marges de manœuvre limitées de son interlocuteur et de la nécessité de ne pas le livrer aux ennemis communs.

Mais Trump doit agir rapidement pour changer les choses s’il veut prendre le contrôle d’un système géré par d’autres. Un petit, mais non négligeable, signal vient du nouveau programme de financement de la Défense élaboré par le Secrétaire de ce ministère, Pete Hegseth, l’un des rares hommes fidèles à Trump dans son administration (lui aussi a dû lutter pour être confirmé par le Congrès, tout comme Tulsi Gabbard).

Ce plan, développé par Hegseth, fait l’objet d’un article dans Responsible Statecraft, dont le titre est évocateur : « Le Secrétaire à la Défense déclare la guerre au complexe militaro-industriel. » En expliquant les coupes dans la défense, Hegseth a déclaré que certaines grandes industries de l’armement pourraient faire faillite en un ou deux ans. Le texte prévoit également une réduction de l’aide directe à Kiev…

En réalité, il ne s’agit pas d’un affrontement direct avec une des composantes du Deep State, et il ne semble pas, du moins pour le moment, que l’Ukraine reste totalement sans aide made in USA, mais cela signale une inversion de tendance qui inquiète beaucoup ces cercles, car ils ne supportent aucune limitation.

Il reste que le texte doit être approuvé par le Congrès, où de nombreux membres ont plus ou moins ouvertement des liens avec l’industrie militaire. L’approbation sera très difficile, et il est probable que le plan subisse des modifications pour le rendre moins désagréable, voire même plus acceptable pour ceux qui profitent des guerres (déclarées ou non) faites par les États-Unis. »


Mis en ligne le 20 juin 2025 à 18H45