Reconnaissance de la Palestine à l'ONU : le décompte continue

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Reconnaissance de la Palestine à l'ONU : le décompte continue

La reconnaissance de la Palestine en tant qu'état par l'ONU est d'une actualité brûlante. Dans les jours à venir M. Abbas, chef de l'Autorité palestinienne, déposera une demande de reconnaissance officielle le 20 septembre auprès de l'Assemblée générale, rien ne semblant arrêté quant à un dépôt auprès du Conseil de sécurité.

Sur ce dossier, l'Union européenne se démarque quelque peu des USA, Obama ayant déjà assuré de mettre son veto si la demande était déposée auprès du Conseil de sécurité et répétant sa préférence pour des négociations préalables à toute évolution statutaire. L'UE, qui comme toujours a bien du mal à parler d'une seule voix, était cependant présente le week-end dernier au Caire. Mme Ashton a ainsi rencontré M.Abbas, le chef de la diplomatie égyptienne puis la Ligue arabe pour présenter la position européenne, comme le rapportait hier le journal Libération (le 13 septembre 2011) :

« La direction palestinienne a confirmé son intention de présenter une telle demande le 20 septembre, mais elle doit encore annoncer si elle choisit de passer par le Conseil de sécurité ou par l'Assemblée générale.

« Les Etats-Unis ont menacé d'opposer leur veto à cette initiative au Conseil de sécurité, disant favoriser une reprise des négociations de paix au point mort depuis un an.

« Les Européens, qui tentent de parler d'une seule voix, cherchent à convaincre M. Abbas de renoncer à l'option du Conseil de sécurité afin d'éviter une “confrontation” avec Washington, selon des sources diplomatiques européennes. L'UE pourrait proposer à la place aux Palestiniens de soutenir à l'unanimité à l'Assemblée générale leur accession au statut d'Etat non-membre.

« “Il n'y a pas de résolution sur la table pour le moment, par conséquent il n'y a pas de position”, a déclaré Mme Ashton à l'issue d'une rencontre avec le chef de la diplomatie égyptienne, Mohamed Kamel Amr. “Ce qui est très clair pour l'Union européenne, c'est que les négociations constituent le moyen d'avancer” vers un “règlement juste” de la question israélo-palestinienne, a-t-elle ajouté.

« Mme Ashton a participé pendant un moment à la réunion du comité de suivi de la Ligue arabe pour informer les ministres de la position de l'UE sur le projet de demande palestinienne devant l'ONU.»

Une précision ici s'impose : la reconnaissance par l'ONU de l'existence d'un état palestinien n'implique pas l'attribution automatique d'un statut de membre. A ce jour, l'Autorité palestinienne n'a que le statut d'observateur au sein de cette organisation. Pour devenir membre à part entière, il faudrait qu'elle obtienne d'une part une majorité des 2/3 à l'assemblée ET une recommandation du Conseil de sécurité. Pour une reconnaissance d'un état sans attribution d'un statut de membre, une majorité simple suffit. Si le veto américain annoncé interdit cette évolution statutaire pleine et entière, la première condition peut être considérée comme déjà remplie, comme le signale le site Ria Novosti à l'occasion de la reconnaissance de la Palestine par le Belize.

Les jours où Israël pouvaient attaquer impunément les territoires palestiniens sont donc comptés. De surcroît les négociations tant prônées par l’Occident se feront selon un rapport de force totalement différent. Il y aura inévitablement quelques heurts et de nombreuses plaintes palestiniennes auprès de l'ONU car l'étape suivante sera la définition d'une frontière acceptée par les différents protagonistes (les frontières de 1967, seule base de discussion existante, ne pouvant plus être retenues du fait des nombreuses colonies). Point important : cela n’est valable que pour la Cisjordanie. En effet pour la bande de Gaza le tracé actuel date de 1949 et le gouvernement d’Ariel Sharon a fait déménager les 9000 colons qui s’y étaient implantés en août 2005 puis a conféré au tracé un statut de frontière internationale fin 2005.

Ce statut de frontière internationale combiné à la reconnaissance de l’Etat palestinien va conférer automatiquement à celui-ci des eaux territoriales au large de Gaza dont l’état israélien ne pourra guère contester que les limites (comme c’est le cas avec le Liban). La déclaration du premier ministre turc, M. Erdogan, évoquée par Dedefensa ce jour prend dès lors un nouveau sens et une toute autre portée : la Turquie, en annonçant qu’elle répondra à toute agression de la marine israélienne en dehors des eaux territoriales israéliennes, se pose d’ores et déjà en protectrice de la Palestine et de Gaza en particulier. Netanyahou devrait donc regretter l’absence d’excuses.

La situation humanitaire dans la bande de Gaza devrait fort heureusement rapidement évoluer, les flottilles de la paix se succédant rapidement et les investissements de la Turquie et des pays arabes se multipliant sans qu’Israël ne puisse y faire quoique ce soit…

Par contre la situation en Cisjordanie restera délicate du fait des probables réticences d’Israël à relâcher son contrôle de la partie Est de la province (les nombreuses restrictions à la circulation des Palestiniens ont transformé cette province en un archipel).

A moins que les nombreuses crises mondiales et régionales n’obligent Israël à un retrait précipité, bien moins glorieux que le pragmatique retrait de la bande de Gaza en 2005…

Bilbo