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Nous allons développer deux événements remarquables, en apparence sans rapports entre eux, géographiquement, opérationnellement, conceptuellement. Pourtant, nous les regroupons car ils rassemblent deux aspects très différents mais de même essence pour définir la situation de plus en plus difficile des Etats-Unis
• Le premier événement concerne une décision d’urgence prise par le Pentagone de retirer d’Ukraine tous leurs systèmes de défense anti-drones livrés sous leur contrôle à ce pays pour les redistribuer dans un certain nombre des 950 bases dont les forces armées US disposent dans le monde.
• Le second événement concerne la situation à Los Angeles où des incidents graves ont lieu entre des groupes d’immigrants illégaux, soutenus ou manipulés par des groupements d’extrême-gauche US, contre l’intervention de forces fédérales de l’ICE (Customs Enforcement) chargées de la surveillance et du maintien de l’ordre aux frontières et dans les points de regroupement d’illégaux. L’aggravation de la situation à conduit le secrétaire à la défense, sur ordre du président, à ordonner le déploiement de 2 000 soldats de la Garde Nationale à Los Angeles, et éventuellement des Marines des unités régulières de la base de Pendleton. La secrétaire HMS (ministre de l’Intérieur) Kristi Noem et le FBI interviennent également. Le gouverneur de la Californie Newson et la maire de Los Angeles dénoncent cette “usurpation de pouvoir” du gouvernement fédéral. Les troubles révèlent un conflit de pouvoir classique aux USA, entre pouvoir central et pouvoir local, où le pouvoir local, quelle que soit la valeur de sa cause, est loin de manquer de légitimité souveraine.
Nous avons là deux points de tension extrême qui concernent deux situations crisique en pleine et longue éruption, marquant la crise générale de l’américanisme. Ces événements sont très différents mais ils se rapprochent irrésistiblement jusqu’à se ressembler comme deux jumeaux pour affecter la matrice de la GrandeCrise.
L’affaire des systèmes anti-drones que les USA retirent d’Ukraine pour renforcer les défenses de diverses bases US d’outremer dénonce l’extrême fragilité de cet immense système de bases extérieures, au départ mis en place pour assurer la solidité structurelle de l’empire.
Quelques mots sur les circonstances
« Selon l’expert militaire libéral Valeri Chiryaev, après l’attaque du SBU contre l’aviation stratégique russe les États-Unis ont envoyé tous leurs armements antiaériens destinés à combattre les drones en Ukraine vers leurs bases à l’étranger.
» “Soudain, ils ont décidé de ne plus rien donner à l’Ukraine au profit d’unités avancées. Il s’agit principalement de bases américaines à l’étranger. Sans aucune incitation, l’armée américaine a pris conscience de la menace qui pesait sur elle. La doctrine militaire américaine repose sur 950 bases militaires à l’étranger. Et une très grande partie de ces bases militaires sont situées dans des zones de conflit, où les Américains sont ennemis”.
» Chiryaev estime qu’au Moyen-Orient, il est beaucoup plus facile d’organiser une attaque de drones contre des installations militaires depuis n’importe quel bazar oriental.
» “Les Américains ont tout de suite compris. C'est leur véritable réponse. Rien pour l'Ukraine, tout est là pour nous, car nous sommes en danger. Ils ont compris qu'il existait un risque d'attaque par drones contre l'aviation stratégique et toute arme techniquement sophistiquée vulnérable”, a déclaré Chiryaev. »
Le paradoxe est donc bien là : la “solidité structurelle de l’Empire” est gravement menacée par les excès d’une pensée stratégico-terroristes absolument déstructurante, suscitée par ceux-là même qui, à Washington, attendent triomphalement d’affirmer définitivement cette “structure” du Néant et du Rien qui caractérise leur ambition. La présence en Ukraine d’un sénateur Lindsey Graham, qui se trouve au bord d’une procédure d’impeachment pour pousser sa législation (500% d’augmentation de taxes pour ceux qui achètent des produits russes) autant que les offensives absurdes des Ukrainiens. Lindsay agit comme s’il était secrétaire d’État sinon président, en ayant affirmé qu’aux USA le pouvoir du Congrès vaut largement celui du président. Ce sont des affirmations que certains légistes apparentent à une trahison et un abus de pouvoir, et elle symbolise cette complète distorsion “surpuissance égale autodestruction”, surtout lorsque la surpuissance est en train de s’effondrer. Ajoutez à cela que Graham est un républicain qui s’est montré un ferme et puissant soutien de Trump pendant la présidence Biden !
Cette hyperextension de l’Empire qui nourrit désormais la trahison inconstitutionnelle constitue un signe indubitable du processus d’effondrement auquel les USA sont confrontés. Plus que jamais, l’ambition de Trump de cesser les interventions extérieures pour se replier sur ‘America First’ doit absolument être rencontrée pour sauver l’Amérique d’un revers catastrophique, – ici ou là, en Ukraine comme à Taïwan, comme dans une des “950” bases US dans le monde. Bien entendu, un tel événement provoquerait aussitôt des effets encore plus catastrophique sur la solidité structurelle de l’Amérique.
Quel rapport avec la Californie ? Celui d’un lien de cause à effet, là aussi avec une menace structurelle existante à l’intérieur, et qui s’ajoute à la contrainte extérieure. Ce qui se passe à Los Angeles est le premier affrontement important entre les démocrates, et leurs diverses courroies de transmission (du gouverneur Newson à la manipulation des illégaux par les ‘Antifa’) et l’administration fédérale républicaine.
L’administration Trump ne fera aucun cadeau, comme l’indique la tonalité des menaces du secrétaire à la défense Hegseth, poursuivant en cela une politique générale extrêmement ferme aux frontières de la secrétaire à la sécurité intérieure Kristi Noem. Hegseth a clairement agité la menace de l’entrée en action de troupes de première ligne du Corps des Marines si les Gardes Nationaux ne suffisent pas à rétablir l’ordre.
« Le secrétaire américain à la Défense, Pete Hegseth, a évoqué la possibilité d'envoyer des Marines à Los Angeles, suite aux manifestations contre une opération du gouvernement américain visant à retrouver les immigrants en situation irrégulière.
» Plus tôt, une opération menée par l'Immigration and Customs Enforcement (ICE) des États-Unis pour identifier les immigrants sans papiers dans le centre-ville de Los Angeles a dégénéré en affrontements avec les manifestants. Karoline Leavitt, attachée de presse de la Maison Blanche, a déclaré qu'une force de 2 000 hommes de la Garde nationale serait déployée à Los Angeles pour soutenir les forces de l'ordre fédérales à Los Angeles.
» “Le département de la défense mobilise IMMEDIATEMENT 2000 Gardes Nationaux pour aider à l’application de la loi à Los Angeles. Et, si les violences persistent, les Marines d'active de Camp Pendleton seront également mobilisés ; ils sont en état d'alerte maximale”, a déclaré Hegseth sur X.
» La Californie est traditionnellement considérée comme un bastion démocrate, et Trump l'a critiquée à plusieurs reprises. Le mois dernier, il a menacé de couper le financement de l'État suite à la participation d'un athlète transgenre (le mouvement LGBT est considéré comme extrémiste et interdit en Russie) à des compétitions. L'administration a déjà annulé 126,4 millions de dollars de projets de prévention des inondations et critiqué la gestion des incendies de forêt par la Californie.
» Samedi, le gouverneur de Californie, Gavin Newsom, a évoqué la possibilité de l’arrêt du paiement des impôts fédéraux en réponse à d'éventuelles coupes budgétaires fédérales massives de la part de l'administration Trump. »
On peut donc le voir, la tension politique est très forte entre Newson et Trump. Le gouverneur de Californie dit toute sa frustration du fait que Trump a déployé 2 000 Gardes Nationaux californiens en “fédéralisant” ces troupes qui sont normalement sous l’autorité du gouverneur. On en revient aux sempiternels affrontements entre les deux pouvoirs, qui sont porteurs de pressions sécessionnistes et de mise en cause du pouvoir central. Bien entendu, ces affrontements qui sont vaguement évoqués dans la Constitution, – signe que l’on se trouve devant un nœud gordien que nul n’a jamais tranché (sauf en 1861-1865 ?), – se règlent en temps normal avec des arrangements entre gens aussi bien complices qu’affranchis ; mais nous ne sommes pas dans des “temps normaux”.
Le parti démocrate ne s’est pas (encore ?) relevé de l’échec catastrophique de Harris suivant la présidence effroyable et pitoyable de Biden, alors que l’on approche de l’échéance électorale des ‘mid-terms’. Que peut-il faire pour profiter de l’usure du pouvoir chez Trump ? Assouplir et adoucir son discours ? Piètre choix car sur ce terrain Trump et les populistes sont intouchables et une telle voie servirait Trump aussi bien qu’eux-mêmes. Alors, aller en sens contraire, suivre toutes les voies de l’insoumission et lancer des contestations tournant au désordre pour torpiller le principal objectif de Trump qui est de rétablir une Amérique “normale”, ‘Great Again’ sans excès ni perversion ?
Les démocrates ont l’arme des illégaux, qui remplissent les grandes villes proclamées “villes sanctuarisées”, c’est-à-dire prétendant échapper aux contraintes des nouvelles lois sur le contrôle des illégaux. Ils dirigent à peu près la moitié des États (gouverneurs, maires) et sont majoritaires dans nombre de ces grandes villes ; ils peuvent donc suivre la voie ouverte par Newson qui a choisi pour l’instant une politique d’affrontement larvé grosse d’une aggravation dramatique. Si ce choix est fait, voire s’il est imposé aux démocrates par leur aile gauche particulièrement remuante, s’installe la possibilité d’un désordre qui oscillera entre le chaos et les appels à la sécession. On le voit à Los Angeles, où le chaos de l’affrontement règne tandis que certains groupes d’illégaux brandissent des drapeaux mexicains (ce qui ne fait pas nécessairement l’affaire de Newson).
Là aussi, l’“Empire” tremble, comme il tremble en Ukraine et dans sa myriade de bases extérieures... Stupeur et tremblement ? Il y a longtemps que nous sommes habitués à la stupeur et des tremblements inquiétants ne nous stupéfieraient nullement.
Mis en ligne le 8 juin 2025 à 19H00