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5422• Nous allons traiter du formidable chambard, sur le terrain et dans les nombreuses chancelleries concernées, que le désastre afghan nous donne à penser, à illustrer et à commenter. • Le spectacle qu’offre actuellement l’aéroport de Kaboul est un tribut quasiment hollywoodien rendu au formidable désordre dont sont capables les soldatesque humanitaristes du bloc-BAO, à partir d’une décision extraordinaire d’un président des USA complètement hors des standards. • Pour autant, nous ne quittons pas de l’œil les autres désordres, celui de la crise-Covid avec ses conséquences, notamment cette formidable insurrection des anti-vaxx qui prend garde à ne pas laisser aller quelque désordre que ce soit en son sein. • Là-dessus, nous nous attardons longuement à une référence qui est partout, directe ou indirecte, et qui va à l’extraordinaire penseur de la “servitude volontaire” que fut le Français Étienne de La Boétie. • Sa pensée, particulièrement productrice d’émancipation des peuples confrontés au pouvoir si elle est bien comprise, est détaillée par un excellent vulgarisateur.
22 août 2021 – Ces derniers jours ont vu ce phénomène décisif de ce qui était d’abord la seule “crise afghane” s’amalgamer à la Grande-Crise jusqu’alors limitée à l’amalgame entre la crise-Covid, à la fois sanitaire et psychologique, et la crise culturelle de ce que nous nommons “wokenisme”.
Ces facteurs importants, cette fureur renouvelée de la crise nous invitent à une réflexion d’intégration des événements formidables qui se bousculent, et à une consultation d’un auteur historique largement cité et référencé par ces temps agités.
Ce renforcement de l’ensemble crisique se fait naturellement aux États-Unis prioritairement, le reste (ce qui fait le bloc-BAO) suivant comme il a l’habitude de faire sur le nouveau composant qu’est la “crise de l’Afghanistan”, mais cette fois dans un sens paradoxalement inverti produit de l’étrange situation où nous sommes, – c’est-à-dire, ô surprise, avec des accents de fureur et de rage antiaméricanistes remarquables.
Mais qu’on se rassure : cet antiaméricanisme est essentiellement de l’“antiBidenisme” de circonstance, et souvent dit au nom de la restauration du leadership américaniste qui nous enchaîne si délicieusement à l’exercice des guerres sans fin pour offrir le présent globaliste suprême du modèle-Système enfanté par la politiqueSystème. Par exemple, l’establishment britanniques, maître de l’application pour son compte de la très-fameuse ‘servitude volontaire’, absolument déchaîné de se voir privé de son maître :
« L’ancien chef du Parti conservateur [britannique], Iain Duncan Smith, a fustigé Biden pour sa “précipitation chaotique et sa retraite méprisable”. »
Encore Duncan Smith, espérant récupérer rapidement ses chaînes (voir plus loin) se révèle-t-il finalement tout de retenue pateline, à côté de l’explosion de rage très exemplaire de l’esprit du temps à Londres, d’un parlementaire, monsieur Tugendhat, qui fut militaires et servit en Afghanistan. En l’entendant, on ne peut s’empêcher d’admirer combien les Britanniques sont prompts à passer du registre de la ‘Servitude volontaire’ à celui du ‘Britain Rules the Waves’ sur le mode de l’héroïsme churchillien, d’un Churchill vivant une fiction cauchemardesque, un Churchill qui aurait attendu vainement que ses cousins américanistes vinssent à son secours, et qui n’aurait jamais rien vu venir...
(D’autre part, et cela dit en passant, il ne nous étonnerait pas que Tugendhat ait consulté ses amis des forces armées US, compagnons d’armes de la glorieuse campagne afghane des vingt dernières années, avant de décider d’y introduire l’aspect de cette déclaration extrêmement insultant pour Biden. Nous voulons dire par là qu’on retrouverait alors la ligne “généraux versus Biden”, sous-entendant que les généraux US feraient dire et savoir de tous les côtés ce qu’il faut penser de celui qui leur aurait imposé le retrait d’Afghanistan, – et franchement cet aspect des déclarations du parlementaire britannique, ancien officier en Afghanistan, tendrait à renforcer l’hypothèse exposée dans les deux textes référencés.)
« Tom Tugendhat, président de la commission des affaires étrangères du Parti conservateur, a déclaré dans un discours émouvant prononcé devant les Communes qu'en tant que vétéran militaire ayant servi en Afghanistan, la semaine dernière a été une semaine “qui m’a vu lutter contre la colère, le chagrin et la rage.”... Ce fut “l’abandon non seulement d'un pays mais du sacrifice que mes amis ont fait.
» Il s’en est pris à Biden qui a blâmé les forces de l'armée afghane qui ont combattu aux côtés des Américains.
» “Voir leur commandant en chef”, a déclaré Tugenhadt, en faisant référence à Biden, “remettre en question le courage des hommes avec lesquels j’ai combattu, prétendre qu'ils ont fui, est honteux.” Il a ajouté : “Ceux qui n’ont jamais combattu pour les couleurs qu’ils arborent devraient être prudents avant de critiquer ceux qui l’ont fait.” »
Mais l’on revient à Smith et à un autre aspect de sa déclaration, qui représente, comme nous le signalions, le retour à une ligne raisonnable de l’establishment, regagnant le havre de sécurité de La Boétie : « Prévenant que la Chine profiterait de la catastrophe pour faire pression sur Taïwan, Smith a déclaré que “l’Amérique doit revenir” à sa position de leader mondial. »
Cela est d’une logique implacable : les amis-américains sont mauvais comme des cochons (comme ils n’ont jamais cessé d’être depuis le Vietnam, et d’ailleurs depuis en-deça) ; par conséquent, selon la logique américaniste-occidentaliste, prions pour qu’ils retrouvent vite leur position dirigeante pour que nous puissions à nouveau l’être nous-mêmes (“mauvais comme des cochons”).
On ne terminera pourtant pas ce chapitre anglo-saxon sans évoquer les relations sur place, à HKIA (‘Hahmid Kharzai International Airport’), entre les troupes US et leurs amis britanniques (et français).
« Le général de division Christopher Donahue a demandé au commandant du 22e régiment du Special Air Service (SAS) de l’armée britannique de mettre fin à leurs opérations au-delà du périmètre de l'aéroport international Hamid Karzai (HKIA), car elles “embarrassent l’armée américaine en l’absence d’opérations militaires américaines similaires” a affirmé vendredi le chroniqueur Tom Rogan du Washington Examiner.
» “Je crois savoir que l’officier britannique a fermement rejeté la demande”, précise Rogan. [...]
» Selon les médias, des commandos britanniques et français se sont aventurés dans Kaboul pour transporter des groupes de leurs ressortissants de la ville à l’aéroport, alors qu’aucun effort de ce type n’a été entrepris par les troupes américaines.
» Rogan a imputé la situation à un “bras de fer bureaucratique entre le département d'État, le Pentagone et la Maison Blanche” et a déclaré que les relations avec les gouvernements britannique, français et d'autres alliés à Kaboul étaient aggravées par l'incapacité des États-Unis à “communiquer de manière adéquate, ou dans certains cas, à communiquer tout court, sur leurs intentions et leurs actions”. Cependant, ils admettent tous que seule l’armée américaine pourrait assurer la défense de l’aérodrome et le contrôle du trafic aérien actuellement à HKIA. »
‘ZeroHedge.com’ a noté avec une certaine surprise et un zeste d’applaudissements admiratifs combien la réaction du président Macron avait été nette de directe, sinon menaçante pour des dangers à pévoir, venus d’un Afghanistan soudainement privé de ses tuteurs humanistes et démocratiques comme un Alexandre le Grand en devenir qui aurait perdu son Aristote collectif. Les conservateurs US et associés ne manquent pas de montrer le dépit que leur inspire le comportement de l’administration Biden, – même lorsqu’ils sont en général opposés (comme l’est ‘ZeroHedge.com’) à toutes ces guerres aventurières, illégales et sanglantes qu’enfante la politiqueSystème depuis trois décennies. Toute posture martiale les comble d’aise, même si cela n’engage personne ni rien en aucune façon.
Macron est donc brandi comme un exemple, ce qui est un comble pour tout Français courant qui a à subir les pirouettes sans fin sur le rythme du “En même Temps” du personnage et son bilan catastrophique dans tous les domaines, notamment et particulièrement les domaines sécuritaires et migratoires. Qu’importe, chacun subit à sa façon et selon ses espérances utopiques, le charme et l’efficacité de la dialectique sans cesse répercutée par l’extraordinaire puissance du système de la communication, comme si cette dialectique décrivait le vrai, et le vrai de l’acte accompli.
« Le premier dirigeant européen à lancer un avertissement a été le président français Emmanuel Macron, qui, dans des commentaires étonnamment directs lundi, a prévenu que l'Afghanistan était sur le point de redevenir un “sanctuaire pour le terrorisme”. C’est sa déclaration sur l’acceptation par l'Europe des “flux migratoires irréguliers” qui a immédiatement suscité le plus de controverse :
» S’exprimant lundi dans une allocution télévisée depuis sa résidence d'été, Macron a décrit la situation en Afghanistan comme un “défi important pour notre propre sécurité”.
» “Nous devons anticiper et nous protéger contre des flux migratoires irréguliers importants qui mettraient en danger les migrants et risqueraient d'encourager les trafics de toutes sortes", a-t-il déclaré. »
On ne cachera d’ailleurs pas que ce discours a été bien accueilli dans les milieux disons sécuritaires français, dans la “communauté de sécurité nationale”. A entendre Macron, on croirait qu’il s’agit (la France) d’un pays souverain et indépendant, disposant d’une stratégie propre et de moyens autonomes à mesure ; et le seul pays à distinguer le terrible danger que recèle un Afghanistan sans troupes américanistes-occidentalistes pour y maintenir le désordre, – cela est justement dit : une mission de maintien du désordre accomplie sur vingt années dans la foulée.
Nous avons tellement évolué de simulacre en simulacre, chaque fois saupoudré de mensonges et de mensonges comme autant de grain de poivre et de sel, qu’on est entraîné par un impitoyable déterminisme-narrativiste. Un personnage comme Macron développe sa “politique” dans le seul champ de la communication, c’est-à-dire simulacre du Rien en situation de Vide, rempli à volonté d’exhortations sécuritaires sans concession et d’appel guerrier à la fermeté, de douceurs humanistes-affectivistes et de ferveurs communautaristes proches du wokenisme, tout cela appuyé sur une basse-continue évidemment globalisante.
Alors, habitués à ce théâtre des ombres-simulacres, n’imaginant pas une seconde qu’il puisse exister une vérité-de-situation qui vaille de s’interroger et d’enquêter, on applaudit Macron, Ron-Ton-Plon... Rien de nous-mêmes ne change, l’effondrement se poursuit à son rythme d’accélération exponentielle et dans une sorte de douceur silencieuse pendant que braillent et geignent les foules dirigeantes de notre “arrière-monde” en pleine crise de déchirement interne.
Pour ce qui concerne l’Europe (l’UE), il n’y a aucun mouvement réel, structuré, de révolte contre ce qui serait perçu comme une hégémonie US insupportable dans le fait qu’elle précipiterait l’Europe dans ces difficultés nouvelles. L’Europe suit, en rechignant certes, voire en critiquant les USA-Biden ; d’autre part, elle suit parce que, dans ce jeu où la puissance perçue selon les lois de la communication triomphe, elle ne saurait où aller, ayant endommagé gravement (comme lors d’une inondation sauvage de sanctions) tous les ponts avec l’axe Russie-Chine ; or, l’axe Russie-Chine tient la clef de relations directes autres que de simulacre de l’Afghanistan-taliban avec l’UE.
La déclaration du chef de la diplomatie européenne confirme une fois de plus l’absurdité de la démarche UEsque : ayant sans aucun doute essuyé indirectement une sévère défaite en Afghanistan, l’UE continue à exiger toutes sortes d’attitudes des talibans, au niveau sacré et sacramentel du sociétal-progressiste avec l’inclusion de l’humanitaire et du terrorisme. Cette approche qui est une accroche au sens publicitaire, qui se veut “opérationnelle et humanitaire”, apparaît, dans une telle crise, totalement inféconde et stérile, en maintenant l’UE au rang d’acteur secondaire hors de la nature du nœud central de la crise. On ne voit pas ce que l’UE pourrait être d’autre, étant donné ce qu’elle est ontologiquement. Cela n’empêche pas qu’elle parle, et qu’elle parle juste et ferme, – Sgron-gnon-gnon !
Voici quelques mots sur la chose dits au lendemain du désastre, aussi excitants qu’un plat d’endives singulièrement épuré de tout accompagnement pouvant servir à l’épicer et à relever sa tristesse de goût, c’est-à-dire l’insignifiance de son action. Tous ces grognements habituels chez nous mis à part, il reste que monsieur Borrell a affirmé en paroles une position singulièrement réaliste, dépouillée des anathèmes bienpensants ; nos “grognements” expriment simplement le complet scepticisme où nous sommes d’envisager qu’un tel discours se traduise par une politique concrète se démarquant de l’habituelle soupe à la grimace impuissante coutumière des européistes. “Paroles, paroles” : paroles elles sont, paroles elles resteront... Ils sont en effet vingt-sept derrière Borrell, prêts à le démentir en tous points et à rejeter la cause de la catastrophe sur un complot russe ou une manigance russe.
« “Les Taliban ont gagné la guerre. Donc, nous devrons parler avec eux, afin d’engager un dialogue aussi vite que nécessaire pour éviter une catastrophe humanitaire” en Afghanistan, a déclaré le chef de la diplomatie de l'Union européenne (UE) Josep Borrell, lors d 'une conférence de presse, ce 17 août. “Ce dialogue devra aussi se concentrer sur les moyens d’empêcher le retour d’une présence terroriste étrangère en Afghanistan”, alors que les relations toujours fortes entre les Taliban et le groupe terroriste Al-Qaïda alimentent l'inquiétude, a insisté Josep Borrell.
» Il a également précisé que de telles discussions n'impliquaient pas pour autant une prompte reconnaissance officielle des nouvelles autorités talibanes par Bruxelles.
» Josep Borrell s’exprimait devant la presse à l'issue d'une réunion en visioconférence des ministres européens des Affaires étrangères, à l'heure où plusieurs États membres de l'UE renforcent leurs efforts pour accélérer l’évacuation des ressortissants occidentaux et de personnels afghans depuis l’aéroport de Kaboul. »
On notera encore, et encore à l’avantage de Borrell, qu’il ne s’est nullement embarrasser de langue de coton pour attaquer directement et sans ambages les USA :
« Même l’UE en vient à condamner le comportement US sur l’aéroport : “Le plus haut diplomate de l'UE a déclaré qu’il était “impossible” pour l’Europe d’évacuer tous ses alliés afghans de Kaboul d'ici la fin du mois d'août. Josep Borrell a reproché aux troupes américaines stationnées à l’aéroport de la ville d'empêcher les personnes évacuées de partir”. »
On ajoutera, cerise charmante sur le gâteau, les à-propos si bienveillants de la première intervention du gracieux Premier ministre canadien, Trudeau Junior, auprès de ses amis américanistes à propos de l’Afghanistan. Ce sémillant PM canadien est un bon wokeniste, blanc déblanchisé à l’Ajax, parfaitement bienpensant.
Le charme significatif de la cerise est que cette première intervention qu’il veut manifestement subtilement “officielle”, Trudeau l’a réservée à Hillary Clinton, désignée dans le texte comme “secrétaire d’État” sans “ex-” ou “ancienne”, comme si elle l’était encore du temps béni des Obama. Bien entendu avec Trudeau, il s’agit du problème géostratégique élevé sur les hauteurs palpitantes de la dialectique progressiste-sociétale. Il pense aux femmes et jeunes filles afghanes.
« Le Canadien Justin Trudeau n’a pas encore parlé avec Biden, mais lors d’une conférence de presse mercredi [il a précisé] qu’il avait eu un appel téléphonique cette semaine avec la secrétaire d'État Hillary Clinton.
» Le premier ministre a déclaré qu’elle “partage notre préoccupation pour les femmes et les filles afghanes”.
» “Elle a salué nos efforts et a exhorté le Canada à poursuivre son travail”. »
Intéressant, sans nul doute... Avec un pouvoir de cette trempe, certes, une révolte selon un La Boétie mal compris a toutes les chances de s’engluer dans un mélange de barbe à papa et de mélasse arc-en-ciel parcourue de limaces qui se seraient trompés d’étage.
Il faut voir La Boétie autrement. Il faut le voir selon ce qu’il dit.
En effet, qu’avons-nous vu dans tout cela sinon le désarroi profond, extraordinaire, furieux et impuissant des diverses directions et ÉlitesSystème du bloc-BAO, tuteur et légataire de cette “jolie petite guerre” de vingt ans, entreprise pour libérer les femmes de l’obscurantisme médiéval, pré- et hors-modernité ? C’est donc vers elles, vers ces élites au sens le plus large (élitesSystème et leurs complices), que se tournent les conseils et remarques de La Boétie, si souvent cité par les temps qui courent, comme nous avons fait ci-dessus à propos des Britanniques et en forme de parabole pour qualifier leur comportement dans leur alliance pleine d’une exceptionnelle ‘servitude volontaire’.
En effet, puisque nous parlons de La Boétie et de ses œuvres, si souvent sollicités ces derniers temps, nous proposerons d’abord cet amalgame de deux citations de lui, qui constitue notre façon de le comprendre, qui définit si bien notre époque :
• ses dirigeants transis de trouille d’ils ne savent quoi, et de servilité au service d’ils ne savent qui ;
• ses complotistes acharnés à trouver chez nos dirigeants tant de maîtrise machiavélique dans des plans de conquête de ce qu’ils (nos dirigeants) possèdent déjà, à savoir leur empire sur les masses endormies et ô combien volontairement serviles ;
• ses croyants du suprémacisme américaniste-occidentaliste (bloc-BAO) fustigeant ceux des rebelles qui s’acharnent à ne pas croire à la légitimité et à la bonté de leur empire [des croyants] sur eux [les rebelles] :
« Méfiez-vous de tout le monde et en particulier de ceux qui [vous] conseillent de vous méfier »...
« Car le feu qui me brûle est celui qui m’éclaire. »
C’est avec La Boétie, nous semble-t-il, que l’on peut poursuivre ce récit (plutôt qu’une analyse, tant la démarche logique et uniquement rationnelle est aujourd’hui complètement dépassée pour rendre compte d’une vérité-de-situation). C’est certainement l’une des références les plus souvent citées pour accompagner, commenter, pimenter les incroyables mouvements de protestation et les extraordinaires événements de désordre qui secouent le bloc américanistes-occidentalistes (bloc-BAO).
Voir des pays du même cercle idéologique dans leurs directions et leurs élitesSystème s’enflammer pour des circonstances aussi différentes et aussi désordonnées que la crise-Covid transformée en crise anti-vaxx et la débâcle afghane (pourtant ces deux crises si différentes sont totalement similaires et consanguines et ne se comprennent que pare les mêmes causes) ;
voir des dirigeants aussi différents et exotiques qu’un “gamin-devenu-roi” vêtu d’un tee-shirt et d’une arrogante suffisance, et un vieillard sénile balbutiant et trébuchant en ignorant où il se trouve (le second tendrait finalement à être moins antipathique que le premier);
voir des initiatives massives de rééducation tendre naturellement et avec un empressement significatif vers l’extrémisme de l’ultime bêtise dans le chef théoriciseur et idéologisateur de différents membres du club-ReSet ;
voir ceci, voir cela et bien d’autres choses défiler à ce rythme ébouriffant... Effectivement, il vaut mieux prétendre à un récit qu’à une analyse...
Mais pourtant, convoquer La Boétie, est-ce bien nécessaire et surtout bien utile ? Certes, si on l’entend bien et justement.
Il nous semble qu’il y a beaucoup d’interprétations intéressées de La Boétie, notamment celle qui dit et dénonce une populaces abruties acceptant de se soumettre à des pouvoirs passés maîtres dans l’art de la manipulation et disposant de perspectives triomphales grâce à des plans qui les placent en position de maîtrise des foules moutonnières. Dans cette interprétation si commune, la remarque vient aussitôt : pourquoi ces populaces moutonnières et ces foules abruties ne se révoltent-elles pas, pourquoi ne prennent-elles pas l’Élysée comme l’on prit la Bastille il y a deux siècles et un tiers de siècle ? Pourtant, La Boétie les y exhorte !, est-on poussé à conclure... Ce en quoi l’on se trompe.
C’est dans tous les cas ce qu’on comprend souvent (“La Boétie nous exhorte à la révolte !”) lorsqu’on cite le nom de La Boétie en référence sans l’avoir beaucoup et vraiment lu, et surtout compris. C’était un peu notre cas (“sans l’avoir beaucoup et vraiment lu”), mais nous estimons néanmoins nous être beaucoup reconnus, donc l’avoir compris par rencontre de jugement, dans ses incitations à dire “non” sans prôner une révolte inutile, parce qu’aussitôt récupérée par un autre tyran ; sans préparer un nouveau programme révolutionnaire pour “le jour d’après”, qui ne serait qu’idéalisation in-concrète servant à démontrer notre impuissance ; sans nous rendre complice du pouvoir en voulant l’abattre, ce qui revient à lui donner le moyen de se légitimer. Nous estimons nous être reconnus dans notre volonté de le laisser seul, par la pression de notre seul “Non” sans révolte brutale, qui le délégitime en l’exacerbant, – le laisser seul devant cette inéluctable formule “surpuissance-autodestruction”. La Boétie ne prône pas autre chose lorsqu’il écrit :
« Or, ce tyran seul, il n’est pas besoin de le combattra, ni de l’abattre. Il est défait de lui-même. Il ne s’agit pas de lui ôter quelque chose, mais de ne rien lui donner... »
Nous avons trouvé notre affaire sur ce site créé en 2018 par Charles Robin, professeur “particulier“ de philosophie à Montpellier : “Le Précepteur, – donner matière à penser” où il explique les conceptions des philosophes qui parsèment notre civilisation. Nous trouvons une excellente “matière à penser” pour mieux comprendre La Boétie dans sa vidéo « La Boétie, ‘La servitude volontaire’ », mise en ligne le 4 février 2021.
Nous donnons ici quelques extraits de la présentation du ‘Précepteur’...
« Être libre, c’est cesser d’obéir, mais est-ce que nous comprenons bien ce que cela veut dire, “cesser d’obéir” ? Selon La Boétie, nous comprenons mal ce que signifie “ne pas obéir”. Parce que nous sommes tellement accoutumés à notre servitude que nous imaginons que pour être plus libres que nous ne le sommes, nous devrions nous battre. Nous imaginons que la liberté s’obtient par des actes. Or, “cesser d’obéir”, ce n’est pas agir, c’est au contraire cesser d’agir. Désobéir, ce n’est pas faire quelque chose, c’est cesser de faire quelque chose.
» Remarquez combien notre imaginaire est façonné par l’idée d’une liberté conquise par la lutte. Remarquez comme la liberté est associée dans notre esprit à des images de violence et à des scènes d’insurrection. Constatez à quel point les éléments de langage défendus par les prétendus défenseurs de l’émancipation sont automatiquement liés à une mythologie du combat...
» Ce que dit La Boétie, c’est que la liberté on ne l’obtient pas par des actes. On ne se débarrasse pas d’un fardeau [l’oppression du pouvoir] en le combattant, on s’en débarrasse en le lâchant. Être libre, ce n’est pas vociférer aux oreilles des dirigeants, ce n’est pas mettre le feu aux poubelles, parce que de toutes les façons, les poubelles, c’est nous qui allons les payer. Être libre, c’est dés-obéir. Être libre, c’est cesser d’agir conformément à la volonté du pouvoir.
» Et c’est cela qui fait dire à La Boétie que dès lors qu’on cesse d’obéir au pouvoir, sans violence, sans agressivité, juste cesser d’agir selon sa volonté, alors le pouvoir est nu, le pouvoir est démuni. Parce que le pouvoir a besoin de notre participation active, et parce que combattre le pouvoir c’est encore le nourrir, c’est le légitimer comme pouvoir, c’est le valider comme pouvoir. Combattre le pouvoir, c’est se placer dans la situation de l’opprimé qui réclame au pouvoir les miettes de sa liberté. Le pouvoir ne peut opprimer que des opprimés consentants, le pouvoir ne peut [se faire ressentir] comme esclaves que des esclaves volontaires. Mais dès lors qu’il n’y a plus d’opprimés, il n’y a plus d’oppresseurs. Et ce n’est pas en faisant disparaître les oppresseurs qu’on cesse d’être opprimés, c’est en cessant de se conduire en opprimés qu’on fera disparaître les oppresseurs.
» Et c’est ce raisonnement qui conduit La Boétie à écrire cette célèbre phrase qui résume tout : “Soyez résolus à ne plus servir et vous voilà libres”.
» La théorie de l’émancipation de La Boétie tient en un raisonnement simple, un raisonnement qui annonce, trois siècles en avance, ce que Hegel appellera “la dialectique du maître et de l’esclave”, et qui consiste à mettre en lumière ce fait que l’oppresseur est davantage dépendant de l’opprimé que l’opprimé ne l’est de l’oppresseur. En d’autres termes, le pouvoir a davantage besoin de nous que nous n’avons besoin de lui. Et c’est ce qui fait que, paradoxalement, le recouvrement de notre liberté ne passe pas par l’action révolutionnaire mais par le retrait de l’action servile. »
La Boétie n’est pas pour autant un pacifiste impénitent et impuissant, ni un anarchiste déconstructeur, certes pas. Sa conception ne l’empêche pas d’admirer les héros antiques qui luttèrent pour la liberté, qui habillèrent la vertu antique passant de l’usage héroïque des armes... Il y a des “exceptions qui confirment la règle” (*), et il peut y en avoir beaucoup, certes ! Ce dont il nous parle, c’est d’une situation normative qui peut aller aux extrêmes de l’oppression, – et, certes encore ! Nous y sommes aujourd’hui, où fleurit cette oppression et où une “prise de pouvoir” par la force est devenue, selon notre appréciation de longue date du fait de la puissance de la communication, une entreprise presqu’absurde du fait de la dilution et de la puissance indirecte de ce pouvoir ; mais où l’épuisement du pouvoir (du Système) jusqu’à son autodestruction par une opposition impossible à comprendre et qui refuse son incarnation politique est tout à fait envisageable sinon inéluctable.
Une révolte est souvent nécessaire, mais elle peut prendre des aspects différents, selon les circonstances, pour se ranger selon les conseils éclairés de La Boétie. Il faut parfois prendre les armes, mais il faut surtout chercher une formule telle que, par exemple et exemple dans tous les esprits mais exemple encore mal compris, – celle des ‘Gilets-Jaunes’ à leur début : pas de revendication précises, pas d’offres d’alternatives, pas de slogans politiques marquées, pas de hiérarchie ni de représentants, simplement “dire ‘Non’”.
Il suffit de rappeler de la panique des bienpensants durant les deux derniers samedis de novembre avant que ne commencent à intervenir les BlackBlocks bien à point, provocs’ de circonstances, comme toujours alliés “objectifs” du pouvoir tyrannique sans qu’il soit besoin de contrat ou d’instructions. “Mais qui sont ces gens ? Que veulent-ils ? Qui les représentent ?” s’écriait-on sur les plateaux-TV stupéfaits, privés de critiques bienpensantes propres à être absorbées et digérées par le pouvoir.
On conviendra que les anti-vaxx reprennent le flambeau et la formule, et que cela n’a rien à voir avec le “passe-sanitaire”, et tout avec un “Non” sans autre explication lancé au visage enfantin du pouvoir. Dans ce cas, l’infantilisation évolue du côté de Macron, tandis que les “commentateurs” de l’opposition “alternative-officielle” exhortent les foules à un nouveau 1789 (exemple superbe de la réussite révolutionnaire) qui seul les libérerait de leur mornitude moutonnière. Grotesque interprétation, alors que les anti-vaxx n’ont qu’à poursuivre, grossir, exprimer leur fuyreur sans autre mot que leur “Non” !
Ainsi le commentateur de La Boétie poursuit-il :
« Mais le fait est que cette lecture des rapports de domination avec d’un côtés les opprimés et de l’autre les oppresseurs a tendance à nous faire oublier cette dialectique de l’interdépendance oppresseurs-opprimés qui nous invite à dés-essensialiser notre état de servitude, à ne plus le considérer comme une fatalité donné à notre naissance mais comme une façon d’être que l’on peut accepter ou refuser....
» “Or, ce tyran seul [écrit La Boétie], il n’est pas besoin de le combattra, ni de l’abattre. Il est défait de lui-même. Il ne s’agit pas de lui ôter quelque chose, mais de ne rien lui donner. ... C’est le peuple qui s’asservit et qui se coupe la gorge ; qui, pouvant choisir d’être soumis ou libre, repousse la liberté et prend le joug ; qui consent à son mal, ou plutôt qui le recherche. ... Mais si on ne leur fournit rien, si on ne leur obéit pas, sans les combattre, sans les frapper, ils restent nus et défaits et ne sont plus rien, de même que la branche, n’ayant plus de suc ni d’aliment à sa racine, devient sèche et morte”.
» Ce que prône La Boétie, c’est la réappropriation par le peuple de la force. Non pas de la force comme violence, non pas de la force comme agressivité, [mais] de la force comme résolution, de la force comme fermeté de l’âme, de la force comme capacité à simplement dire : “Non”. Pas à s’énerver, pas à crier et à gesticuler dans tous les sens, juste dire : “Non”. [...]
» Le problème du peuple qui se plaint de sa servitude, c’est son absence de réalisme, son absence de pragmatisme. C’est cet idéalisme qui fait croire qu’il suffirait d’informer les dirigeants qu’ils asservissent le peuple pour qu’aussitôt ils cessent de l’asservir. Ou qu’il faudrait théoriser un modèle politique vertueux pour qu’aussitôt les dirigeants se mettent à l’appliquer. Mais enfin, vous pouvez dessiner le plus beau modèle politique sur un tableau noir, tant que vous n’avez pas le pouvoir, ce n’est qu’un dessin... »
(*) “Exceptions qui confirment la règle” ? Voici ce que nous rappelle le Wiki de la chose, cette fois-ci sans crainte que l’idéologie bienpensante n’intervienne trop lourdement.
« “L'exception qui confirme la règle” est une expression courante, le plus souvent mal comprise donc mal utilisée. Elle signifie que la présence d'une exception peut confirmer la présence d'une règle générale (puisqu’il ne peut pas y avoir d’exception à une règle qui n'existe pas), et non pas que la présence d'une exception confirme la validité d'une règle (en recherche scientifique, il serait par exemple inconcevable d'énoncer que des mesures qui s'écartent d'une règle ou d'une loi confirment cette règle ou cette loi ; ce serait naturellement le contraire).
» Cette expression provient de la sentence de droit latin “Exceptio probat regulam in casibus non exceptis”, c'est-à-dire “L’exception confirme la règle dans les cas non exclus”, souvent raccourcie en “Exceptio probat regulam”, qui peut se comprendre comme “l’exception doit être traitée comme le prévoit la règle, sauf si elle appartient à la liste des exceptions explicitement mentionnées”. »