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• Le “plan de paix” de Trump pour Gaza n’est pas l’effet d’une négociation, c’est un diktat. • S’asseoir à une table et négocier un résultat qui sera ce que les Etats-Unis ont déjà décidé qu’il sera. • Par ‘Anonymous’.
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Depuis l’annonce du plan de 20 points pour Gaza par le Président Donald Trump le 29 septembre 2025, beaucoup parlent de « cessez-le-feu » et de « transition politique ». Pourtant ce plan ne mérite pas ce nom : il réintroduit un modèle de négociation imposée, où le parti fort dicte les conditions au faible. Dans un discours prononcé le 23 septembre 2025, le leader iranien a averti que si l’on « s’assoit à la table de négociation avec les États-Unis et que le résultat des discussions est ce qu’ils ont décidé qu’il doit être », ce n’est plus une négociation c’est un diktat. Ce propos s’applique directement à la dynamique du plan Trump pour Gaza.
Le plan Trump exige que le Hamas se désarme, remette tous les otages dans les 72 heures, cède le contrôle de la bande de Gaza à un gouvernement de transition supervisé par une autorité internationale, et coopte Israël dans la définition des garanties sécuritaires. Israël accepterait de se retirer progressivement si le Hamas accepte ces conditions. En échange, des promesses de reconstruction, d’aide humanitaire et de réintégration de l’Autorité palestinienne sont avancées. Mais nul rôle significatif n’est laissé aux acteurs palestiniens autonomes dans ce scénario, et le mécanisme de transition est explicitement sous supervision américaine (et connexe à la feuille de route des leaders occidentaux). Ce schéma est clairement celui d’un pouvoir imposé plutôt que d’une diplomatie mutuelle. AP News détaille le plan
Face à ces conditions, le Hamas a refusé le plan, condamnant son caractère unilatéral et le risque d’effacement de sa légitimité et de sa capacité de résistance. Les responsables militaires de Gaza considèrent le plan comme un piège pour éliminer l’organisation, et non un cadre viable pour la paix. Reuters rapporte le rejet du plan par le Hamas
Ce que le discours du 23 septembre révèle, c’est une conscience claire qu’un effacement de l’initiative palestinienne au profit d’un ordre imposé est le cœur même du projet américain. Le leader iranien n’a pas nommé ce plan, mais sa critique du modèle de négociation imposée éclaire la situation :« ce n’est plus une négociation ; c’est une imposition. »
Conséquence première : la dépossession politique des Palestiniens. En leur ôtant la capacité de statuer sur leur avenir et en subordonnant toute autorité au contrôle américain, le plan traduit l’instrumentalisation d’un cessez-le-feu comme levier de domination. Un « cessez-le-feu » imposé n’est jamais durable, car il repose sur la capitulation plutôt que le consentement. Dans cette logique, toute résistance future est prévisible.
Deuxième conséquence : l’effondrement du rôle du Hamas est aussi un coup porté au « système de résistance » dans la région. Si le Hamas est neutralisé politiquement et militairement, c’est tout le paradigme de l’axe de résistance entre l’Iran, le Hezbollah, les factions yéménites et les groupes irakiens qui est fragilisé. Ce déplacement du rapport de force risque de servir directement les ambitions israéliennes sur la Cisjordanie et le Liban, tout en accentuant la dépendance régionale à l’alliance américano-israélienne.
Troisième conséquence : le plan Trump s’inscrit dans un moment charnière où le monde évolue vers une multipolarité marquée. Les Etats-Unis veulent revenir en force, mais leur volonté de dicter les termes d’une paix sans partage est en décalage avec l’aspiration croissante des pays du Sud à plus de justice et de voix libre. Le rejet du plan chinois-russe de report du mécanisme snapback à l’ONU est un signal que l’ordre institutionnel international reste fortement sous contrôle occidental. Le plan américain pour Gaza réaffirme cette volonté de maintenir l’initiative au centre.
Mais cet ordre imposé est vulnérable. Premièrement, la Palestine n’est pas un sujet abstrait : elle est faite d’un peuple à l’esprit de combat et à l’histoire collective. Les populations de Gaza ont déjà montré qu’elles ne se contenteraient pas d’un destin décidé à leur place. Toute tentative de gouvernance imposée sera rejetée ou contournée par des stratégies souterraines de résistance.
Deuxièmement, l’expérience historique montre qu’un pouvoir imposé ne tient que s’il dispose de coercition soutenue. Mais s’agissant de Gaza, l’obstacle externe l’armée israélienne et le soutien américain pourraient susciter une mobilisation régionale plus vaste. Toute tentative de mettre en place un gouvernement de transition dirigé par l’Occident pourrait réveiller des dynamiques de conflit non contrôlées.
Troisièmement, ce plan remet en cause l’idée de légitimité internationale basée sur le consentement. Si Washington croit pouvoir redéfinir l’ordre au Moyen-Orient par la seule puissance, cela renforcera les critiques selon lesquelles les institutions multilatérales sont devenues des instruments de contrôle plus que des garants d’équité.
Au bout du compte, le plan Trump pour Gaza n’est pas une solution c’est une répétition du même vieux mécanisme d’imposition par la puissance. Il reproduit la logique que le leader iranien a dénoncée comme antidémocratique et coercitive. Ce qui est appelé « négociation » dans ce cadre n’est plus qu’un vernis légitimant une domination.
La paix véritable ne peut émerger que d’une négociation respectueuse, incluant les Palestiniens comme acteurs égaux, avec une reconnaissance de leurs revendications historiques, et non d’un plan où leur destin est écrit sans leur consentement.
La planification d’un cessez-le-feu imposé par un acteur externe risque de semer davantage le chaos que d’apporter la stabilité. Ce qui est en jeu n’est pas seulement le sort de Gaza, mais la capacité du monde à résister à l’arrogance des puissances hégémoniques.
Trump peut écrire les conditions, mais ce sont les Palestiniens, aujourd’hui comme hier, qui écriront l’histoire.