La vraie guerre de Saakachvili

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La guerre de Saakachvili, d’une façon effective et ouverte à partir du 7 août et, bien entendu, au-delà du 12 août, a été une guerre de propagande à destination des médias. Le but de cette guerre a été d’impliquer les “alliés” occidentaux, les USA au premier chef, dans le conflit. C’est la thèse du Dr. Gordon M. Hahn, universitaire spécialisé dans le terrorisme et la propagande, à l’Université de Monterey en Californie. Dans un long article publié sur le site War is Boring, le 3 septembre, Hahn offre un récit complet, point par point, des diverses affirmations de Saakachvili et de toute sa bande, tout au long du conflit; il met en parallèle les informations telles qu’elles sont disponibles, pour nous permettre de faire une comparaison.

«The five-day Georgian-Russian saw Georgian President Mikheil Saakashvili and other Georgian officials waging an aggressive propaganda campaign and, in many ways, a disinformation war in the Western mass media. This media offensive was the result either of a carefully planned disinformation war or a rush by Western governments, mainstream media, and think tanks to get the Georgians’ side of the story and their side only. Either way, the Georgians were able to wage an effective and constant barrage of propaganda and disinformation against the Russians.

»In some 40 appearances in the Western media and at Western think tanks, Georgian President Mikheil Saakasahvili and his ministers made numerous statements in their effort to convince the West that it was obliged to defend Tbilisi from Russia’s incursion. The following is a review of Georgia’s official version of events and a comparison of their claims with the facts as we know them as of late August and early September 2008…»

Bien, la chose n’étonnera personne. Saakachvili fut à bonne, à très bonne école; pur produit de l’école d’influence américaniste, passé par les canaux habituels du système, le monde universitaire, le monde juridique, avec les bourses officielles qui vont bien, il est rompu à l’action de la communication. A cet égard, la Géorgie a effectivement pris le dessus sur la Russie pendant la phase initiale puis la décade qui a suivi le cessez-le-feu. Depuis, les Russes ont tenté de figurer dans cette sorte d’affrontement dont ils négligent en général l’importance, avec un succès certain d’ailleurs.

Quoi qu’il en soit, la puissance de cette sorte d’activité de la part des Géorgiens montre combien cette “guerre” est très particulière dans ses composants. Même si la “guerre médiatique”, ou “guerre de propagande médiatique” (ce n’est pas de la propagande pure qui s'adresse directement aux populations mais de la propagande recyclée dans les médias sous forme d'information “objectivée”) a existé depuis longtemps, si pas depuis toujours dans notre histoire sous une forme ou l’autre, elle a joué un rôle fondamental dans cette occurrence, notamment pour faire passer la perception de la crise, à l’“Ouest”, d’un simple conflit régional à une crise d’affrontement de haut niveau, avec la Russie en accusation. Le revers de cette transformation, à laquelle d’autres facteurs ont contribué, est qu’elle a permis à l’action militaire de la Russie de figurer dans les conditions qu’on voit par ailleurs, c’est-à-dire comme une affirmation de puissance à l’échelle du continent qui grandit le statut de la Russie.

Il n’est pas du tout assuré que la supériorité de Saakachvili dans la “guerre médiatique” se soit finalement concrétisée en un succès; il y a eu des succès tactiques, mais cela aboutit-il à un succès stratégique ? (Grande interrogation figurée dans l’histoire de la guerre par le plan Schlieffen de 1914, venant échouer à la Marne.) Saakachvili a impliqué les Occidentaux, mais nullement avec l’intensité et sous la forme qu’il aurait voulues. D’autre part, en haussant le conflit au niveau “Ouest”-Russie, il a provoqué des effets imprévus qui ne lui sont pas favorables. La “guerre médiatique” est effectivement redoutable de puissance pour qui la lance et la conduit, mais elle n’est pas toujours contrôlable dans ses effets.


Mis en ligne le 4 septembre 2008 à 17H53