La question de Sarkozy

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La question de Sarkozy

Dans la biologie des mammifères, le Soi se construit par l’élaboration d’une tolérance aux ‘self antigènes’

La question que posait Sarkozy, élu Président de la République de France, sur l’identité nationale, sa définition, son champ d’application, la légitimité de s’en revendiquer relève de ce qui fonde la sienne propre et fait resurgir la possibilité d’une congruence entre ses origines, hongroise et ottomane, son aspiration à l’américanisme et sa fonction actuelle.

Qu’est-ce qu’être français ?

Qu’est-ce donc de nos jours être de France ?

S’il a échoué à y répondre pour son propre compte et celui de son électorat présomptif, c’est bien que ses milles caractéristiques ne viennent pas à bout de cette francité mutante et élaborée au fil de siècles.

Cette interrogation pointe le désarroi dans lequel est plongé l’homme porté par le vote de millions de Français, parlant le français parfois même de manière aussi approximative que lui et résidant (ou ayant lien avec) dans ce territoire aux frontières fixées en 1962, par la perte du département algérien et non en 1945 quand est annexée de nouveau l’Alsace.

Elle parle de son vertige de n’avoir pas ressenti l’imprégnation de son corps premier par celui de la communauté qui l’a investi. La fonction pour laquelle il a interprété avec talent et ambition des textes commis par d’autres n’a pas sécrété l’organe, la voix qui parlant par sa bouche aurait dû justement incarner cette identité au plus haut, celle de tous les Français. La problématique de la double nature christologique débattue par la scolastique transposée dans la double corporalité du Roi a échoué ici dans cet aveu sarkozien qui interpellant ses concitoyens sur qui ils sont dit qu’il l’ignore lui-même à jamais.

De sorte qu’en s’octroyant un chef de fortune qui ne la reconnaît pas puisqu’il lui intime l’ordre de s’effeuiller, se démembrer, se contorsionner, se contourner et se mirer, cette communauté constituée des gens de France affirme sa décohésion.

Couronnée fille aînée de l’Église, son passé chrétien ne la distingue pas au sein de l’Europe.

Son détachement de l’ensemble continental romain germanique, elle le doit à sa géographie qui l’enserre dans un écrin limité de plicatures alpines. Plus tard vint la langue, d’où se furent expulsés les accents d’oc et l’unité d’une pratique religieuse épurée de ses Purs, Cathares et Albigeois. Pendant que le servage stabilisait la façon nouvelle du devenir agricole de l’humain sous mode de la féodalité, les monastères dessinaient son paysage, déforestant et asséchant les marais, et livraient du travail gratuit à la communauté naissante.

L’être au monde sarkozien n’est pas colinéaire à cette histoire.

Pas non plus à sa suite.

S’il s’aventure à bomber le torse et se rehausser de ses talonnettes pour dire, l’État c’est Lui, il y est entendu qu’il est entré dans la petite histoire par les antichambres du ministère de la Police qu’il détient par devers lui des fiches sur tout un chacun. En aucun cas, il ne témoigne de vision de la collectivité supérieure à une gestion du chapardage des sacs des vielles dames Il ne trouve comme cause nationale que la promesse solennelle de réprimés quelques criminels plus fous que crapuleux.

De ci, de là, quelques faussaires montent en tribune et déploient la ritournelle des droits de l’Ohm. Leurs voix de faussets ne masquent pas le cliquetis des armes lourdes et meurtrières expédiées en Afghanistan, au Tchad, en Côte d’Ivoire et en Libye et n’en disent pas le prix à la communauté livrée à sa fragmentation. Pour eux, l’histoire du monde et de la France commence avec l’accord de Munich en septembre 1938 qui a scellé la disparition de la Tchécoslovaquie. Le concours accordé sans contrepartie par Louis XV pour l’annexion par Frédéric II de la Silésie a fait rentrer la France une guerre de Sept Ans qui l’a opposée au Royaume Uni. Elle perd 200 000 hommes, nombre de ses comptoirs en Inde, de ‘ses’ terres américaines et se ruine. Quel Voltaire dira qu’en Afghanistan et en Libye, nous faisons la guerre pour un certain roi de Prusse ?

La nation sans âme est invitée à se pâmer devant les écrans plats des seuls champions qui les occupent, footeux et pipoles.

Elle est dépressive, livrée au tittytainment amputée de tout impetus.

Le carrosse roule sans sa cinquième roue, laissée dans le coffre en cas de déraillement.

Les individus laissés sans leur polarité propre s’ordonnent selon le seul champ d’orientation disponible, la volonté d’un autre.

Les guerres de l’Afghanistan, d’Irak, du Pakistan et de la Libye dans cet apparent désordre divertissent, aliènent mais répondent aux intérêts d’une petite clique de gangsters et de violeurs bien en place à Washington et à Tel Aviv.

Eux disposent de tous car mus par un impetus.

Ainsi en va-t-il avec la fin de l’idée de nation française?

Pour la nation des Us(a),il n’y a pas d’acte de décès à dresser.

A-t-elle seulement existé un jour, ce truc fait d’un conglomérat d’hommes d’affaires qui a bâti fortune sur un génocide et une énergie gratuite? D’abord un esclavage d’une nature sans précédent, ressource quasiment inépuisable, payée quelques colifichets, le seul coût en a été l’acheminement des esclaves depuis l’Afrique, puis une énergie fossile abondante et jusqu’à peu n’était pas un facteur limitant.

Les centres de pouvoir qui se disputent les décisions politiques sont de moins en moins nombreux, le pôle industriel détruit a laissé la souveraineté au pôle financier, assurément sans assise territoriale et donc sans identité nationale.

Badia Benjelloun