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2722Robert Parry, cet ancien journaliste d’Associated Press qui reçut tant de distinctions officiels et d’appréciations élogieuses pour son travail d’investigations (l’Irangate de Reagan, l’October Surprise de l’élection présidentielle de 1980, etc.), a créé (en 1995) avec son site ConsortiumNews un asile de haute réputation pour les journalistes, commentateurs, chroniqueurs, etc., de haute qualité qui ne trouvent plus aucun accueil dans une presse-Système US devenue quasi-officiellement un “bras armé” de la communication au service exclusif du Système.
Parry suit avec une plume critique cette presse-Système et les rassemblements d’influence qu’elle suscite, notamment le New York Times qui est devenu, derrière sa prestigieuse apparence, une Pravda-sophistiquée, c’est-à-dire plus perverse et invertie jusqu’à sa nature même fondamentalement plus catastrophique que le modèle. Parry est notamment engagé dans l’identification et l’exposition des moments paroxystiques où les groupes d’influence rassemblés autour de la presse-Système poussent à la guerre à tous prix et de toutes les façopns, sur un mode hystérique devenu une sorte de “norme technique” de la psychologie. Il est manifeste que nous sommes, à Washington, dans un de ces “moments paroxystiques”, comme le montrent l’intervention du groupe VIPS, et l’article du 5 octobre de Parry, évidemment par le canal de ConsortiumNews. Dans cet article, Parry emploie l’expression groupthink utilisée lors de la préparation à la guerre contre l’Irak (« New ‘Group Think’ for War with Syria/Russia ») ; il juge que cette hystérie équivait à celle qui prévalut avant l'attaque de l'Irk en 2002-2003 ; il décrit et dénonce avec une documentation abondante ce “moment paroxystique”.
« Official Washington has a new “group think” that is even more dangerous than the one that led to the Iraq War. This one calls for U.S. escalation of conflicts against Syria and nuclear-armed Russia... [...] Not since the eve of the U.S. invasion of Iraq has Official Washington’s political/punditry class clamored more single-mindedly – and openly – for the U.S. government to commit a gross violation of international law, now urging a major military assault on the government of Syria while also escalating tensions with nuclear-armed Russia. And, like the frenzied war fever of 2002-2003, today’s lawless consensus is operating on a mix of selective, dubious and false information – while excluding from the public debate voices that might dare challenge the prevailing “group think.” It’s as if nothing was learned from the previous disaster in Iraq. [...]
» This more complex reality is completely missing in the new round of political/press hysteria in the United States. The neocons and their liberal-hawk sidekicks only talk about stopping the “barbarism” of the Syrian government and its Russian allies as they try to finally wipe out Al Qaeda’s jihadists and their “moderate” allies holed up in eastern Aleppo. Many of these calls for a U.S. military intervention against the Syrian government (and the Russians) are coming from the same advocates for war who created the misguided consensus for invading Iraq in 2002-2003, voices such as Sen. John McCain, Washington Post editorial-page editor Fred Hiatt, and New York Times columnist Thomas L. Friedman. And, much like the Iraq example, these esteemed opinion-leaders pile up their propaganda arguments in a one-sided fashion designed to silence the few voices that dare raise doubts. [...]
» While it’s always tempting to dismiss Friedman as a nitwit, the sad reality is that he is an influential nitwit who helps shape “elite” American public opinion. He is now contributing to a new “group think” that is even more dangerous than the one he helped construct in 2002-2003 regarding the Iraq War. Today, this new “group think,” which — like the Iraq one — is based on a false or selective reading of the facts, could lead to a nuclear war that could end life on the planet. »
Ce “moment paroxystique” semblable à celui de 2002-2003 pour lancer la guerre contre l’Irak est infiniment plus grave dans ses effets potentiels puisqu’il vise prioritairement la Russie, et qu’un engagement avec la Russie contient la possibilité d’une montrée aux extrêmes dont le terme est l’affrontement nucléaire. On n’a pas ici à donner une appréciation rationnelle, politique et stratégique, de cette possibilité parce que la raison (la “raison loyale à la réalité”) est complètement sous l’empire de l’affectivisme, et techniquement sous le contrôle du système de la communication en mode-Système (« [l]a “communication ”, pour ce cas étant dans cette situation où elle est au service du Système en général, selon une de ses fonctions-“Janus” »).
Les Russes mènent une farouche “guerre de l’information”, contre cette attaque du Système via l’hystérie washingtonienne et de la presse-Système. Eux-mêmes emploient donc les méthodes de cette guerre, avec une tactique à mesure, qui implique un engagement complet en faveur des thèses russes. Il n’empêche que, lorsqu’on a écarté ces scories du système de la communication où les approximations et les arguments subjectifs et engagés, y compris selon le technique de la propagande également chez les Russes, ne manquent pas, on en arrive à l’essentiel qui est l’affrontement Système-antiSystème, où les Russes sont par logique contradictoire, les représentants de l’antiSystème. De leur côté se trouvent des vérités-de-situation comme simple conséquence directe de la construction déterministe-narrativiste qui règne à Washington. Ce qui est remarquable chez eux (chez les Russes), c’est que cette “guerre de l’information, n’interfère en rien dans leur action politique au sens large, et notamment leur action militaire à retombées politiques sur le terrain de l’affrontement, en Syrie, notamment autour et à Alep.
L’offensive totalement hystérique de la presse-Système à propos de la “barbarie russe” à Alep, aux USA mais aussi en Europe et en France où il ne peut être question de manquer d’afficher glorieusement, à chaque occasion, l’extraordinaire stupidité caractérisant les élites-Système du monde de la communication, cette offensive n’a nullement entamé la détermination russe. (Sur Alep et la “barbarie”-des-Russes en cours, dont les groupes sponsorés par les organismes US/Système et qui montrent eux-mêmes une association originale de la barbarie originelle avec sa cruauté visible et de la “barbarie intérieure” postmoderne [voir Mattei] avec sa force d’entropisation, voir l’article de Patrick Bahzad sur le site Sic Semper Tyrannis, le 1er octobre : « Showdown in Aleppo ».) Cette détermination des Russes est illustrée par exemple par la constance et la puissance de leur offensive aérienne en soutien des Syriens, comme le rapporte un texte du 5 octobre FortRuss.News, traduit de Rus Vesna.
Plus important, selon nous, parce qu’impliquant l’introduction d’une facteur technologique de premier plan dans l’affrontement de communication Russie et USA, et un facteur de trouble extrême à l’intention des psychologies exacerbées dans le Moment paroxystique que connaît Washington, le déploiement en Syrie (officiellement dans les bases russes, pour protéger ces bases russes) de systèmes sol-air S300 de la dernière version, les S300V4 “Antey-2500”.
Il est important d’observer que les autorités officielles russes ont plus ou moins directement confirmé, sans tapage excessif, “à la russe” méthode-Poutrine, les bruits de déploiement en Syrie d’un lot de S300V4 “Antey-2500”, effectivement version très-avancée du S300 original, supérieure en capacités (sauf pour la portée) aux S400 Triumf déjà déployés en Syrie. L’intervention officielle s’est notamment faite d’une manière très business as usual, sous la forme d’un communiqué du porte-parole du ministère de la défense, la major-général Igor Konachenkov, selon l’argument convenu et qui ne trompe personne, – et qui est d’ailleurs destiné à surtout ne tromper personne pour qu’on ne s’y trompe pas, – qu’il ne s’agit que d’une arme défensive : « Le S300 est un système uniquement défensif et il ne constitue en rien une menace pour quiconque. » Des officiels du Pentagone ont bien entendu noté que les capacités du S300V4 “Antey-2500” ne s’appliquaient nullement aux conditions du conflit sérieux et officiel en cours en Syrie, dans la mesure où les forces terroristes, et notamment Daesh, qui sont les adversaires officiels sinon officiellement exclusifs des Russes, n’ont pas de forces aériennes. Tout cela est un jeu convenu dont on comprend bien la logique masquée qu’il recouvre.
Il reste que nous sommes bombardés de détails sur les capacités du S300V4 “Antey-2500”, notamment dans un texte de Sputnik.News du 5 octobre : « Russia deployed the S-300V4 “Antey-2500” anti-ballistic missile system to Syria to provide additional cover to the Russian Aerospace Forces taking part in Moscow's counterterrorism offensive in the war-torn country, experts say. Victor Ozerov, head of the Federation Council's Defense and Security Committee, told RIA Novosti that this move could have been “necessary to prevent incidents similar to the Su-24 downing from happening.” The Russian senator was referring to the incident that saw the Turkish Air Force shot down the Russian Su-24 bomber in northern Syria on November 24. This episode sent cordial relations between the two countries into a deep freeze for several months.
» Defense analyst Vladimir Evseev maintained that Russia could have deployed the S-300 to Syria in a bid to boost its defenses specifically against missile attacks. "Unlike other air defense systems, say the S-400 Triumf, the S-300VM has additional capabilities against missile attacks. It is capable of intercepting warheads traveling at a speed of up to 5 kilometers per second and destroying them at a maximum altitude of 30 kilometers," he explained.
» As a result, the S-300 is capable of defeating subsonic missiles like the Tomahawk, as well as ballistic missiles, he added. Lieutenant General Aitech Bizhev indirectly confirmed this assessment. The Antey-2500, he said, is primarily tasked with "countering a massive cruise missile airstrike on administrative, industrial or military objects, as well as our forces." He also told Svobodnaya Pressa that the S-300V4 is better at intercepting cruise missiles than the more advanced S-400. The S-300V4, an upgraded version of the S-300VM, is "a highly automated and extremely efficient weapon," Bizhev said, adding that its readiness time is five minutes.
» Anatoly Tsyganok, head of the Center for Military Forecasts, pointed out that the Pentagon has significantly more warplanes close to Syria. "According to different sources, the Russian Aerospace Forces have deployed somewhere between 20 and 40 planes to Syria. The US has two air groups stationed on its aircraft carriers in the region. In other words, they have 140 aircraft. This is why Russian service personnel in Syria need additional protection form aerial attacks," he explained. »
Le S300V4 “Antey-2500” qui porte la désignation OTAN SA-23 Gladiator est donc décrit plus précisément vomme une arme défensive conçue pour l’identification, l’interception et la destruction des missiles balistiques de courte et moyenne portée, de missiles aérobalistiques (balistiques lancés d’avions) et missiles de croisière, en plus d’un large éventail d’aéronefs et de leurs capacités (avions de combat classiques, avions de contre-mesures électroniques [CME], plates-formes aériennes pour le tir de munitions guidées de grande précision à autonomie importante [100-200 kilomètres]). L’autonomie du S300V4 “Antey-2500” est d'autour de 400 kilomètres, ce qui lui permet de prendre en charge quasiment tout l’espace aérien syrien à partir des deux bases russes où ils sont déployés, sur la côté méditerranéenne de Syrie. Les capacités de repérage et de suivi d'un S300V4 “Antey-2500” portent sur 24 avions de combat ou 16 missiles avec des combinaisons intermédiaires entre ces deux extrêmes. L’essentiel de cette documentation, son aspect évidemment “politique”, concerne les capacités antimissiles du S300V4 “Antey-2500”, essentiellement contre les missiles de croisière et les munitions de haute précision tirées de loin par des avions de combat. Une autre cible importante pour le système concerne les avions CME, pour détruire les possibilités d’interférence adverses dans l’intervention du système.
Cet aspect très technique est le point de blocage du débat, dans un contexte général de communication où les systèmes sol-air russes, et la série S300/S400/S500 en particulier, ont la réputation d’être les meilleurs du monde. C’est une concession unanimement faite, même parmi les spécialistes occidentaux les plus huppés dont nombre ne cachent pas un certain mépris traditionnel sinon traditionnellement un mépris certain pour les capacités technologiques des Russes : seuls les systèmes sol-air russes échappent à ce tropisme. On a pu voir ces dernières années les effets de cette réputation, avec les hypothèses de livraison de S300 en Iran et en Syrie notamment, déclenchant des manœuvres stridentes du côté de bloc-BAO, notamment d’Israël. Nous n’en sommes plus là et les Russes ne prennent plus de gants ; de ce fait, le déploiement du S300V4 “Antey-2500” constitue d’abord un événement de communication à effets politico-stratégiques de la plus grande importance. (“Guerre de communication, c’est-à-dire : que la réputation des S300 soit justifiée ou pas n’importe pas. Ici, c’est la réputation et la pression d’influence qu’elle implique qui comptent.)
Il est bien évident que les S300V4 “Antey-2500” sont destiné aux USA, d’abord comme avertissement. Les Russes savent bien ce qu’ils visent. Ils savent la réticence d’Obama pour autoriser une attaque, et la quasi-certitude qu’au cas où il donnerait son autorisation, ce serait pour une attaque essentiellement sinon exclusivement faite par des missiles guidés (missiles de croisière, munitions guidées, etc.) pour éviter les pertes humaines ; ce n’est pas pour rien qu’Obama a tant fait usage de drones dans ses diverses interventions depuis plusieurs années. Les militaires US sont assez proches de cette position, eux aussi complètement acquis à la technologie pour la guerre aérienne. L’on comprend alors le rôle du S300V4 “Antey-2500”, avec ses capacités antimissiles, qui rend la possibilité d’une attaque US dont on connaît le schéma (profusion de missiles de croisière) extrêmement aléatoires. Dans ces conditions, une attaque comme devait être celle de 2013 risquerait de se terminer en échec opérationnel, ce qui constituerait effectivement une déroute politique et stratégique totale.
...Mais si les USA n’interviennent pas dans cette situation qui a été créée de toutes pièces par une politique aveuglément extrémiste, et sans qu’on en saisisse, au milieu de la jungle des théories complotistes, le véritable but stratégique où le risque pourrait prétendre être à hauteur de l’enjeu, ce sera également une déroute totale lorsqu'Alep tombera complètement aux mains des Syriens d'Assad et de leurs alliés. C’est dans tous les cas la façon dont l’ancien diplomate indien Bhadrakumar, sage par définition, voit le développement de l’affaire syrienne, qui prend ainsi une allure de calvaire pour les USA, dont les répercussions devraient se faire sentir au sein de la direction-Système et des divers centres d’influence à Washington même... L’affectivisme est à cet égard impuissant à rassurer les esprits et à apaiser les âmes meurtries. (Bhadrakumar, le 5 octobre dans Asia Times [via Russia Insider].)
« Theoretically, Obama can order missile attacks on the victorious Syrian government forces. But that will be like pouring oil on fire. On Saturday, Russian Defense Ministry warned Pentagon that any US military intervention to remove Assad would result in “terrible tectonic shifts” across the region. The threat was left vaguely suspended in the air. But on Sunday, the powerful advisor on foreign affairs to Iran’s Supreme Leader, Ali Akbar Velayati, was pretty much blunt, warning Washington that any direct US intervention would be a “suicidal action” and will only turn out to be “their (American) third military defeat in the region after Afghanistan and Iraq, and it will be a stronger defeat”.
» However, if Obama decides against the war option, three other reasons can also be attributed. One, Washington’s equations with Ankara and Riyadh are hugely uncertain at the moment and both regional allies are key partners in Syria. The US-Turkish ties remain volatile not only due to the attempted coup in July but also because of the US’ tie-up with Kurds and growing Turkish suspicions regarding its intentions in Syria. On the other hand, Riyadh is mulling over the best way of drinking from the chalice of poison that the US Congress prepared for King Salman in the form of the ‘sue-the-Saudis-for-the-9/11’ bill.
» Two, President Recep Erdogan is unlikely to gamble another confrontation with Russia when Turkey’s legitimate interests in Syria can be secured by working in tandem with President Vladimir Putin at the negotiating table. In fact, Putin is visiting Ankara shortly. Iranian Foreign Minister Mohammad Javad Zarif also visited Turkey last week. Above all, Turks are realists and their excellent intelligence apparatus inside Aleppo would have reported back by now that the fall of the ancient city is a fait accompli.
» Third, most important, Obama is unlikely to lead his country into the vicious war zone without any clear-cut objective to realize when the curtain is coming down on his presidency. In the current state of play, Assad stands between the West and the deluge. But what rankles is that Russian victory in Syria marks the end of western hegemony over the Middle East, and historians are bound to single it out as the defining foreign-policy legacy of Obama’s presidency... »
Mis en ligne le 6 octobre 2016 à 09H54
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