Il semblerait bien que “les fous dirigent l’asile”

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... “Les fous dirigent l’asile”

7 août 2003 — Deux textes qui viennent d’être publiés donnent une idée très réaliste du monde qui s’est créé au sein et autour de l’administration américaine depuis le 11 septembre 2001. Ce monde a de moins en moins de rapports avec le vrai monde, qui est celui de l’alerte générale face aux effets du réchauffement climatique.

• Un texte de Jim Lobe commente des récentes révélations sur le fonctionnement du désormais fameux Office of Special Plans (OSP) mis en place par Rumsfeld pour court-circuiter tous les circuits normaux du renseignement US. Les révélations viennent du lieutenant colonel Karen Kwiatkowski, de l’USAF, qui a quitté son service après avoir travaillé, jusqu’en avril, dans l’équipe de l’Under Secretary of Defence for Policy Douglas Feith, créateur et chef de l’OSP. Kwiatkowski confirme tout ce qu’on supposait, à partir de sources éparses, à propos de l’OSP.

« “What I saw was aberrant, pervasive and contrary to good order and discipline,'” Kwiatkowski wrote. “If one is seeking the answers to why peculiar bits of ‘intelligence’ found sanctity in a presidential speech, or why the post-Saddam (Hussein) occupation (in Iraq) has been distinguished by confusion and false steps, one need look no further than the process inside the Office of the Secretary of Defence” (OSD).

» Kwiatkowski went on to charge that the operations she witnessed during her tenure in Feith’s office, and particularly those of an ad hoc group known as the Office of Special Plans (OSP), constituted “a subversion of constitutional limits on executive power and a co-optation through deceit of a large segment of the Congress”.

» Kwiatkowski's charges, which tend to confirm reports and impressions offered to the press by retired officers from other intelligence agencies and their still-active but anonymous former colleagues, are likely to make her a prime witness when Congress reconvenes in September for hearings on the manipulation of intelligence to justify war against Iraq.

» According to Kwiatkowski, the same operation that allegedly cooked the intelligence also was responsible for the administration's failure to anticipate the problems that now dog the U.S. occupation in Iraq, or, in her more colourful words, that have placed 150,000 U.S. troops in “the world's nastiest rat's nest, without a nation-building plan, without significant international support and without an exit plan”.

» Kwiatkowski's comments echo the worst fears of some lawmakers, who have begun looking into the OSP's role in the administration's mistaken assumptions in Iraq. Some are even comparing it to the off-the-books operation run from the National Security Council (NSC) during Reagan administration that later resulted in the “Iran-Contra” scandal.

» “That office was charged with collecting, vetting, disseminating intelligence completely outside the normal intelligence apparatus,” Rep. David Obey, a senior Democrat in the House of Representatives, said last month.

» “In fact, it appears that the information collected by this office was in some instances not even shared with the established intelligence agencies and in numerous instances was passed on to the National Security Council and the president without having been vetted with anyone other than (the secretary of defence)”. »

• Un autre aspect très intéressant des activités de l’administration GW est la réunion secrète que se tient aujourd’hui à Offut, dans le Nebraska, pour déterminer les doctrines d’emploi et les programmes de nouvelles armes nucléaires permettant un emploi de ces armes dans des conditions classiques (conventionnelles). (Réunion aujourd’hui, c’est-à-dire que l’administration a raté d’un jour l’anniversaire du largage de la première bombe atomique sur Hiroshima.) L’affaire semble avoir été révélée par le groupe “Democracy Now!”, qui détaille cette réunion à partir de documents obtenus par l’activiste Greg Mello, directeur du Los Alamos Study Group. C’est une réunion extraordinaire à plus d’un égard. On retiendra cet aspect, hautement symbolique de la “philosophie” de l’administration GW : l’accès de la conférence n’est pas autorisé aux membres du Congrès, par contre les industriels qui fabriquent les armes nucléaires, les laboratoires, etc, seront là en grand nombre, comme partie prenante à la conférence. Description de la conférence par Greg Mello :

« It's almost unprecedented to bring this many senior decision makers in the executive branch and their contractors together to discuss nuclear policy. On the terms of reference for these meetings are topics like how to frame the discussion in congress. What kind of authority do we need to begin small production runs of special weapons. Is the production complex agile enough to make these special weapons at short notice. What kind of nuclear testing do we need. And of course what are the weapons we want that will be as they put it most likely to be used. It is really a breathtaking agenda and yesterday I learned that those congressional staff members, committee staff members who want to just come and observe are being barred from the meeting. So we have a meeting which is pretty much stacked with contractors and it would be inaccurate not to say just idealogues and congressional oversight is being stiffed at the door. »

La situation devient de plus en plus extraordinaire, à la lumière de l’échec dramatique de l’affaire irakienne. Le centre washingtonien continue à développer ses différents programmes agressifs, notamment nucléaires, pour une guerre générale contre la terreur ou n’importe quoi, au même rythme qu’après le 11 septembre. Les intrigues des néo-conservateurs se poursuivent, comme l’indique Maureen Dowd dans le New York Times du 6 août, en signalant une tentative de “coup d’État” de ces mêmes néo-conservateurs au département d’État.

Les échecs d’Afghanistan et d’Irak n’ont pas entraîné un virage vers une position plus modérée aux USA mais un durcissement encore plus accentué, dans un monde qui perd tout contact avec la réalité. Le virtualisme lui-même est entré dans sa version maximaliste, où le monde virtualiste refuse de s’effacer malgré que la réalité (échec en Irak) ait montré son inexistence, ou la fausseté de sa soi-disant existence. Dans sa dernière chronique du Débat Stratégique, mai-juin 2003, Alain Joxe titrait sa chronique par cette question : « Les fous dirigent-ils l’asile ?» Il semble bien qu’on doive désormais se passer de point d’interrogation.

Post-Scriptum pour se mettre du baume à l’âme

Un dernier point doit être mis en évidence, à partir du constat qu’on peut faire sur la circulation de l’information. La réunion secrète d’Offut a été annoncée, sur Internet, par le site Democracy, Now !, dès le 5 août. Comme on peut le voir avec l’article du Guardian du 7 août, l’information a été très vite relayée dans le domaine du grand public et elle est devenue un fait majeur de l’information aujourd’hui. C’est une fois de plus la démonstration de la puissance des nouvelles technologies de l’information, dans un sens totalement contraire à la poussée de l’information officielle (laquelle aurait beaucoup apprécié que cette réunion d’Offut soit gardée pieusement secrète).

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