En assistant à l’effondrement infini de l’empire...

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En assistant à l’effondrement infini de l’empire...

21 novembre 2003 – La semaine fut épuisante à Londres pour les duettistes Tony & George, — le mois aussi, et le trimestre pas moins, — et l’année, ne m’en parlez pas... La situation semble comme un vertige, dans les deux sens qu’on peut donner au mot, le vacillement de l’esprit et l’enchaînement irrésistible des situations. On peut être sûr que ceci explique cela et inversement. (Je soupçonne l’Histoire de profiter de notre folie générale pour faire avancer les choses plus vite qu’il ne faudrait. L’Histoire va vite, aujourd’hui.)

Au-delà de la semaine, du mois et du trimestre, et de l’année, nous sommes invités, presque simultanément à notre réalisation de l’événement, presque “historiquement” en un sens puisque nous l’interprétons à l’instant où il se fait, — nous sommes invités à assister à l’effondrement de l’empire. Cela se passe dans les sables irakiens et cette circonstance géographique et stratégique mesure la dérision de cet empire, autant que la dérision des commentaires de ses zélateurs acharnés et stipendiés en mesure la puissance. Le problème est de ne pas se laisser emporter par cet effondrement qui ressemble à une outre pleine qui se vide, à un soufflé tiède qui s’affaisse...

Certaines descriptions des opérations de l’U.S.Army en Irak, dans le cadre de la nouvelle tactique dite get-tough, laissent absolument rêveurs sur la façon d’être et la façon d’agir de la plus puissante force militaire du monde, et la façon dont elle se prépare effectivement à perdre cette guerre picrocolinesque. Ces scènes irakiennes achèvent de confirmer le jugement de dérision qu’on ne peut qu’avoir sur ce phénomène, qui est celui d’une fausse puissance dont la seule capacité est celle de la démonstration, comme fait un voyageur de commerce en vadrouille dans une ville du Middle West (avec la différence que ceux-là, ils tuent). Disons, pour panser quelques plaies d’experts dont c’est la lumière de l’esprit de parler avec émotion de cette puissance qui les met en transes, type derviches tourneurs, que c’est la dérision la plus chère du monde ($400 milliards par an). Cela fait plus sérieux et cela permet au secrétaire général de l’OTAN d’avoir des trémolos dans la voix avant de partir à la retraite.

Depuis la proclamation publique, par fuites interposées, que la CIA allait désormais jusqu’à envisager une “défaite” américaine, une sorte d’ivresse négative s’est emparée des esprits. D’autres rapports surgissent, prédisant encore plus précisément cette issue. A Washington, aujourd’hui, la perspective d’une “défaite” est à la mode. Elle ferait presque valser à la hausse l’indice Dow Jones. On danse sur le volcan et il faut bien dire que le rythme est endiablé, type Michael Jackson et Neverland.

Le plus poignant, le plus surréaliste, c’est sans doute le coup de l’incendiaire, dont les comiques Tony & George, avec hier matin l’acolyte Jack Straw (secrétaire au Foreign Office) sont des spécialistes régulièrement récidivistes, et qui nous a été évidemment rejoué avec la Turquie. Après chaque vague d’attentats, rendue évidemment possible par leur intervention qui crée d’une façon extraordinairement efficace un centre terroriste au centre du Moyen-Orient, ils viennent vous dire, gravissimes, menton à la Churchill : nous vous l’avions bien dit, la menace est grave. Sur le pourtour de la Méditerranée, quand on prend un pompier qui met le feu à la forêt pour pouvoir s’engager sur le sentier de la guerre et avertir le monde que l’incendie gronde, on le met en cabane. Leur reconversion est toute trouvée. Ils iront surveiller les pompiers fous et, avec eux, ils joueront aux pyromanes. Bientôt les pompiers fous redeviendront sains d’esprit et s’enfuiront, épouvantés, en criant : “Au feu, ils sont fous !”. La boucle sera bouclée.