Éloge de Trump

Les Carnets de Dimitri Orlov

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Éloge de Trump

Aujourd’hui marque le 80e anniversaire du suicide d’Adolf Hitler. Selon des archives russes récemment rendues publiques, son cadavre, qui n’avait pas été complètement brûlé, a pu être identifié grâce à ses soins dentaires coûteux (il avait des dents horribles). C’est quelque chose qui mérite d’être célébré !

Dans un registre beaucoup moins important, aujourd’hui marque également la fin des 100 premiers jours du second mandat de Trump à la présidence. Dans la politique américaine, sans raison valable, cette période est considérée comme la fin de la « lune de miel » : une période pendant laquelle le nouveau président, bien que traditionnellement détesté par près de 50 % de l’électorat, est censé bénéficier du bénéfice du doute. Les sondages d’opinion montrent que la lune de miel ne s’est pas bien passée ; sa cote de popularité a chuté de 18% depuis son investiture. Il n’est pas non plus très populaire auprès de ses amis : après sa proposition maladroite d’annexer le Canada, 64% des Canadiens considèrent désormais Trump comme un ennemi. Une manœuvre similaire avec le Groenland a fait chuter de 52% à 20% l’opinion favorable des Danois, auxquels le Groenland appartient depuis 1039 ans, à l’égard des États-Unis.

Au-delà des simples opinions, les résultats financiers de l’économie américaine n’ont pas non plus satisfait tout le monde. La croissance du PIB américain est désormais estimée à -2,5 %, tandis que le S&P 500 a chuté de 9,3 %. Tout cela fait passer le second mandat de Trump pour la pire présidence américaine depuis 70 ans. Mais ce n’est que le début des mauvaises nouvelles, car la guerre commerciale que Trump a déclarée au monde entier, qu’il a qualifiée de « jour de la libération » et qui consiste à imposer des droits de douane à tous ses partenaires commerciaux proportionnellement à leur excédent commercial avec les États-Unis, a déclenché une réaction en chaîne qui entraînera une forte inflation des prix à la consommation, une chute du dollar américain, une hausse des taux d’intérêt et des rayons vides dans les magasins. Mais il pourrait s’agir d’un simple mauvais timing. Les États-Unis enregistrent d’énormes déficits commerciaux depuis des décennies et Trump a ressenti le besoin de faire quelque chose pour y remédier — une volonté louable, même si le résultat sera inévitablement très impopulaire auprès des masses.

Jusqu’à présent, ses efforts ont été vains et le déficit commercial a récemment atteint un nouveau record. Trump est bien meilleur golfeur qu’économiste. Jeffrey Sachs est un meilleur économiste, mais il n’est pas un spécialiste du stalinisme économique et n’est donc pas vraiment à même de comprendre les performances exceptionnelles des économies planifiées telles que celles de la Chine ou de la Russie. Comme l’a dit Sachs, « le déficit budgétaire est le déficit commercial ». C’est l’excédent constant de dollars fraîchement imprimés qui a permis aux États-Unis de vivre au-dessus de leurs moyens pendant de nombreuses générations tout en accumulant une dette nationale colossale, dont les intérêts sont désormais la deuxième charge la plus importants après les paiements des retraites par la sécurité sociale. Les étrangers investissent ensuite cet excédent dans des actions, des obligations et des biens immobiliers américains, provoquant une inflation des actifs.

Retirez n’importe quel élément de ce puzzle, et le résultat sera un effondrement financier immédiat. Ne rien faire, c’est obtenir le même résultat à un moment imprévisible. Jusqu’à présent, Trump s’est avancé au bord du précipice, a regardé en bas et a reculé de quelques pas : dans sa lutte contre les déficits commerciaux, il a annoncé ses droits de douane, les marchés se sont effondrés, et il a reporté ou réduit ses droits de douane. Dans sa lutte contre les déficits budgétaires, l’initiative DOGE menée par Musk a réussi à obtenir des réductions importantes, mais loin des mille milliards de dollars nécessaires pour changer la donne.

Mais nous ne sommes pas ici pour discuter des échecs de Trump ; nous souhaitons le féliciter pour ses succès. Y en a-t-il ? Ils sont énormes, mais ils sont quelque peu occultés par ses échecs, qui sont bien moins importants. Qu’importe s’il n’a pas réussi à mettre fin à la guerre dans l’ancienne Ukraine — il peut simplement cesser d’armer le régime de Kiev et laisser les Russes en finir. Qu’importe s’il n’a pas réussi à annexer le Canada ou le Groenland — qui en a besoin de toute façon ? Et alors, si les Panaméens ne veulent pas rendre la zone du canal aux États-Unis et que les Chinois ne veulent pas vendre leurs ports panaméens ? Et alors, si les tribunaux américains refusent d’extrader des criminels qui sont des étrangers en situation irrégulière ? Et ainsi de suite…

Ce qui est vraiment significatif, c’est que Trump a réussi en 100 jours à rendre la guerre nucléaire beaucoup moins probable. Il a hérité d’une Maison Blanche dirigée par une bande d’idiots de classe mondiale qui pensaient que l’Ukraine, armée et commandée par des officiers de l’OTAN, pouvait vaincre la Russie. Ces idiots pensaient qu’il était tout à fait inutile de maintenir les canaux de communication ouverts avec la Russie. En conséquence, le monde était à deux doigts d’un échange nucléaire dans lequel la Russie aurait subi des dommages mais aurait survécu (ses armes stratégiques sont toutes neuves et elle est extrêmement bien défendue contre tout type d’attaque), tandis que les États-Unis auraient été complètement détruits (leurs armes stratégiques sont obsolètes et leurs défenses stratégiques inexistantes). En 100 jours, l’équipe de Trump a rétabli le dialogue et les contacts de haut niveau avec la Russie, rendant une telle guerre accidentelle extrêmement improbable. Il s’agit là d’une grande réussite que la presse occidentale ignore totalement, ce qui est scandaleux.

Il est également très significatif que Trump et les membres de son administration aient fait certaines admissions clés :

  • Que la guerre en Ukraine est une guerre par procuration entre l’OTAN et la Russie, provoquée par l’administration Biden et à laquelle Trump veut mettre fin le plus rapidement possible
  • Que cette guerre est de toute façon impossible à gagner pour l’Ukraine et que si elle se poursuit, elle entraînera la disparition de l’Ukraine de la carte politique
  • Que la Crimée est un territoire russe. Ce dernier point peut sembler trivial (la Crimée est russe depuis 241 ans), mais il fait voler en éclats la fenêtre d’Overton en ce qui concerne le redécoupage des frontières nationales sur la base du principe d’autodétermination. Avant même de s’en rendre compte, le Kosovo redeviendra serbe, Vilnius (Wilno) polonaise et la Belgique sera divisée entre la France et la Hollande (alias les Pays-Bas). Le simple fait de poser (et de répondre) à la question “À qui appartient la Crimée ?” conduira inévitablement à d’autres questions, telles que “À qui appartient Odessa ?”, “À qui appartient Kiev ?” et “À qui appartient Constantinople ?”.


Le 30 Avril 2025, Club Orlov – Traduction du ‘Sakerfrancophone

 

Note du Saker Francophone

Depuis quelques temps, des gens indélicats retraduisent “mal” en anglais nos propres traductions sans l’autorisation de l’auteur qui vit de ses publications. Dmitry Orlov nous faisait l’amitié depuis toutes ses années de nous laisser publier les traductions françaises de ses articles, même ceux payant pour les anglophones. Dans ces nouvelles conditions, en accord avec l’auteur, on vous propose la 1ere partie de l’article ici. Vous pouvez lire la suite en français derrière ce lien en vous abonnant au site Boosty de Dmitry Orlov.