Pas de “doctrine Trump” mais une “méthode Trump”

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Pas de “doctrine Trump” mais une “méthode Trump”

Au fond, rien de mieux qu’un businessman-analyste qui vient du monde politique pour mieux nous expliquer le comportement de Trump, – la “méthode Trump”, justement, qui nomme et licencie ses collaborateurs les plus proches et les plus importants à tout va. (Cela, essentiellement à propos de la nomination de Bolton comme directeur du NSC et conseiller du président pour la sécurité nationale, le troisième à ce poste en quatorze mois). SputnikNews s’est donc tourné, pour une interview radiodiffusée vers Michael Patrick Flanagan, ancien député (Chambre des Représentants) passé aux affaires comme fondateur et PDG (CEO) de Flanagan Consulting, et sans nul doute admirateur de Trump.

Pour Flanagan, Trump engage et licencie ses collaborateurs selon ses besoins et les politiques qu’il veut conduire... Son explication correspond assez bien à ce que nous pensons nous-mêmes du point de vue opérationnel, de la “méthode” justement : « Ainsi lorsqu’un super-faucons comme Bolton est appelé à un poste de cette importance, cela ne signifie pas nécessairement un tournant de la politique de Trump dans le sens voulu par Bolton, ou représenté par Bolton, mais cela pourrait aussi bien signifier qu’il s’agit d’un “opérateur” qui a plu à Trump pour des raisons insondables, et qui peut être aussi vite et cavalièrement “jetable” qu’un Tillerson ou qu’un McMaster si l’humeur du président en décide ainsi. »

Ainsi n’y a-t-il pas de “doctrine Trump” mais plutôt une “méthode Trump”, comme l’explique Flanagan. A première vue, cela conduit à faire plutôt compliment à Trump, qui serait moins fou que prévu, – mais c’est un compliment à l’effet très court, — on comprend le “comment” mais on ne sait rien du “pourquoi”. Si la “méthode” est cohérente et se comprend, il n’en résulte pas du tout pour autant que la politique choisie, les perceptions, les changements d’orientation, en seront vertueux. Bref, Trump agit comme un PDG, et pourquoi pas dans une époque aussi folles où l’on voit les catastrophes dont accouchent les présidents-politiciens, mais il arrive également, et plus souvent qu’à leur tour, que les PDG se trompent complètement, font des erreurs colossales, accouchent de catastrophe, etc., et ils sont en général au moins aussi sensibles à l’hybris que les politiciens.

Voici des extraits de l’interview diffusé le 24 mars 2018.

Sputnik : « Que pensez-vous de la nomination de John Bolton? Qu'est-ce que cela signifie pour la politique étrangère de Washington ? »

Michael Flanagan : « Je pense que la politique étrangère de cette administration continuera d'être très axée sur Trump. Vous allez avoir beaucoup de difficultés à trouver l’équivalent d’une doctrine Bush, une doctrine Reagan ou une doctrine Clinton à l'intérieur de cette politique étrangère. Trump est très motivé et il a besoin d'aide, d'assistants, de secrétaires, de membres du Cabinet autour de lui, qui peuvent l'aider à exprimer ce qu'il veut faire personnellement. Je pense que ces nominations et ces départs que vous voyez chez M. Trump sont tout à fait dans cette veine et qu'elles ne devraient pas poser problème.

» Il a une mentalité de PDG sur la façon dont il nomme et licencie ses collaborateurs. Contrairement à un politicien qui fait beaucoup d'efforts pour avoir les mêmes personnes autour de lui, année après année, pour la continuité, pour assurer la stabilité, les PDG changent souvent leur équipe à mesure que la situation change ; pour un PDG normal, c’est pour suivre les changements du marché, et dans le cas [de Trump, PDG devenu président], pour suivre la vision qu’il de la situation du monde il besoin d’hommes différents pour des actions différentes. Je pense que Trump nomme et licencie dans cet esprit-là. Ça a l’air capricieux mais je pense qu'il y a de la méthode dans cette folie. »

Sputnik : « John Bolton n'est pas particulièrement pro-Iran. Que signifie cette nomination pour l'accord avec l'Iran ? »

Michael Flanagan : « Le président n'a jamais caché son mépris pour l'accord avec l'Iran, mais il l'a ratifié. Nous n’aurons plus cette attitude bienveillante qui était la marque de l'administration Obama, avec sa tendance à suivre de manière encourageante tout ce que faisait l’Iran. Je pense qu’ils suivront au contraire d’un œil très attentif et critique tout ce que fera l’Iran fera. Si l’on veut que l’accord tienne, l’Iran devra le respecter à la lettre ; mais au moindre écart, ils y mettront fin aussi rapidement que possible et Bolton est le type idéal pour faire cela. »

 

Mis en ligne le 25 mars 2018 à 13H04