Les USA en Syrie : perfection & perspectives de l'infâme

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Les USA en Syrie : perfection & perspectives de l'infâme

Il apparaît de plus en plus plausible que l’administration Obama doive être considérée comme un concurrent très sérieux, en compétition directe avec l’administration GW Bush et son aventure irakienne, pour le développement d’une stratégie totalement faussaire et infâme conduisant à une catastrophe stratégique pour les USA dans la crise syrienne. On ne trouve aucun épisode où les USA, depuis 2011, ait pris une décision sage et moyennement intelligente. Même la considérable puissance des USA, ses bases outremer, ses connexions d’influence avec les principaux pays, ont constitué un puissant supplément d’activisme pour rendre la catastrophe encore plus catastrophique (ou “les catastrophes encore plus catastrophiques” puisqu’en même temps se développèrent d’autres crises, notamment la crise ukrainienne, où les USA montrèrent un aveuglement et une incompétence semblables).

Dans ces constats, le caractère d’Obama apparaît bien comme on le ressent si souvent : indécis, hésitant, croyant ses conseillers sans rien vérifier, indolent à certains moments, – mais excellent dans les conférences de presse et les discours pleins de suffisance, et bien entendu les parcours de golf. Il est effectivement bien placé dans la course au “pire président qu’ait eu les USA”, – distinction qui se calcule bien entendu en fonction des circonstances imposées par les obligations stratégiques de cette puissance.

C’est Gareth Porter qui retrace les divers épisodes de la catastrophe syrienne pour les USA, Porter qui est une excellente source, qui a déjà montré la valeur de ses informations et des contacts qu’il a dans les milieux de sécurité nationale. Il rapporte les épisodes essentiels de cette espèce de politique syrienne des USA, allant avec une régularité de métronome d’erreur en erreur, n’apprenant rien à chaque nouvelle phase de l’erreur précédente, mais au contraire en aggravant les conditions ; et, au-dessus de tout cela, un chef flottant, hésitant, indécis, réticent, puis cédant finalement en partie, c’est-à-dire un homme combinant tous les aspects possibles pour aggraver une dynamique de désordre due à son autorité chancelante sinon indifférente, et pourtant une politique incapable de libérer quelque énergie que ce soit à cause de son autorité passive dressant les entraves qui l'interdisent. Jamais sans doute n’y eut-il pire politique par ses erreurs et son manque de sens, ni pire chef pour laisser faire tout en retenant ce qu’il fallait pour que ce “faire” n'ait pas le moindre sens.

Voici un long passage du texte de Gareth Porter, du 27 décembre 2016 sur le site CommonDreams.com. (Il ne nous sera d’aucune sorte d’apaisement de rappeler que les Européens ne firent ni pire ni meilleur, qu’ils se tinrent tous,  chacun dans leur style, dans le même mode de l’absurdité, de l’impuissance, de l’affectivisme, pour réussir à construire sur un océan grouillant de Fake-News les conditions du martyre d’un peuple, à partir de la manipulation de bandes armées par eux-mêmes, représentant le crime organisée dans la version postmoderniste. Si le Diable n’a pas eu sa part, alors c’est qu’il n’existe pas et qu’il n’existera jamais ; mais nous avons bien qu’il y eut sa part, tant les caractères faibles et veules des dirigeants du bloc-BAO sont incapables à eux seuls d’enfanter un monstre si difforme et si cruel.)

« ...In August 2011, national security officials began urging Obama to call on Assad to step down, according to the former official. Obama did make a statement suggesting that Assad should step aside, but he made it clear privately that he had no intention of doing anything about it. “He viewed it as simply a suggestion, not a hard policy,” the ex-official said.

» But soon after that, a bigger issue arose for the administration’s policy: how to respond to pressure from Turkey, Saudi Arabia and Qatar for a US commitment to help overthrow Assad. In September 2011, the Saudis and Turks not only wanted the US to provide arms to the opposition. “They wanted the US to provide anti-aircraft missiles and anti-tank missiles,” recalled the ex-official. Turkey even offered to send troops into Syria to overthrow Assad, but only if US and NATO agreed to create a “no-fly zone” to protect them.

» But Obama refused to provide US arms to the Syrian rebels and also opposed the Sunni foes of Assad providing such heavy weapons. “He wasn’t willing to go along with anything except small arms,” said the former official. Apparently to assuage the dissatisfaction of the Sunni allies, then-director of the CIA David Petraeus devised a plan, which Obama approved, to help move the small arms from Libyan government stocks in Benghazi to Turkey. Confirming the 2014 story by Seymour Hersh, the ex- official, recalled, “It was highly secret but officials involved in the Middle East learned of the programme by word of mouth.” The combination of those two policy decisions committed Obama – albeit half-heartedly- to the armed overthrow of the Assad regime. 

» The former administration official confirmed the recollections of both former secretary of state Hillary Clinton and former Pentagon official Derek Chollet that Obama’s advisers believed Assad’s fall was inevitable. Some of those advisers believed Assad lacked the “cunning and fortitude” to remain in power, as Chollet put it.

» More importantly, when Obama was making crucial Syria policy decisions in September 2011, no one on his national security team warned him that Iran had a very major national security interest in keeping the Assad regime in power that could draw the Iranians into the war, according to the former official. Obama’s advisers assumed instead that neither Iran nor Russia would do more than offer token assistance to keep Assad in power, so there was no risk of an endless, bloody sectarian war. “Both Hezbollah and Iran had made noises that they were displeased with Assad’s handling of the crisis, and [Hezbollah leader Hassan] Nasrallah even said publicly he should take a softer approach,” the ex-official recalled, “so it was believed Iran would not intervene militarily to save him.”

» In fact, however, Iran regarded Syria as crucial to its ability to resupply Hezbollah, whose large arsenal of missiles was in turn a necessary element in Iran’s deterrent to an Israeli attack. “Syria had been Iran’s and Hezbollah’s security in depth,” the ex-official said, but Obama's advisers “didn’t have a clue” about Iran’s overriding national security interest in preventing Assad’s overthrow by the overwhelmingly Sunni opposition backed by a Sunni international coalition with US support.

» That major error of omission become obvious as the war unfolded. After the city of Qusayr near the Lebanese border was taken over by the Free Syrian Army in July 2012, opposition forces in southern Syria were able to get military supplies from across the border in Lebanon.  It became clear in the months that followed that al-Nusra Front forces were heavily involved in that front of the war. In May 2013, Hezbollah troops from the Bekaa Valley intervened in support of a regime counteroffensive to retake the city – obviously at Iranian urging. That Iranian-Hezbollah intervention resulted in the biggest defeat of rebel forces of the war up to that time.

» But instead of questioning the soundness of the original decision to cooperate with the Sunni coalition’s regime change strategy, Obama’s national security team doubled down on its bet. Secretary of State John Kerry put strong pressure on Obama to use military force against the Assad regime. That resulted in a public commitment by the Obama administration in June 2013 to provide military support to the opposition for the first time. The deepening commitment nearly led to a new US war against the Assad regime in September, after the chemical attack on the Damascus suburbs in August 2013.

» The Obama administration even agreed to the Sunni states’ provision of anti-tank weapons to an armed opposition now openly dominated by al-Qaeda’s Nusra Front. That culminated in a Nusra Front-led command’s conquest of Idlib province and the subsequent Russian intervention, which the administration’s national security team obviously had not anticipated either. Obama and his advisers blundered on Syria in thinking that they were not getting into a high-risk war situation... »

On notera la fin de cette description (ci-dessous), qui avance une ultime explication, s’ajoutant aux précédentes pour les renforcer et nullement, ni pour les déforcer en aucune manière, ni encore moins pour les contredire. Cette dernière explication constitue le faite de l’échec de la puissance, et même une situation archétypique de ce que nous nommons parfois “l’impuissance de la puissance” : les USA n’agissant pas d’une façon qui pourrait déplaire à leurs alliés arabes conservateurs (Turquie, Arabie, pays du Golfe) à cause des positions stratégiques qu’ils occupent dans ces pays, notamment avec leurs grandes bases militaires.

Ainsi l’inversion devient-elle complète, comme est complet l'infamie-foutoir dont nous faisons la description par le biais de la plume alerte de Gareth Porter : des atouts stratégiques majeurs (base d’Incirlink, de Bahrain, etc.) deviennent des freins pour une politique essentielle, jusqu’à être, pour une bonne partie, la cause de l’échec de cette politique... L’“atout stratégique majeur” comme cause de l’échec stratégique majeur” : nous voilà au bout de la route pour ce qui est de la valeur et de la signification de cette énorme puissance militaire US, de cet amas de ferraille militaire empilée et répartie de part le monde, dans plus d’un millier de bases, comme autant de liens serrés par les Lilliputiens et ligotant à mesure le formidable Gulliver... Pour ce cas, ce n’est même pas directement de la faute de ce président sans divertissement, mais directement de la faute du Système ; mais quoi, l’un et l’autre vont bien ensemble.

« But there is a deeper level of explanation for the willingness of Obama and his advisers to go along with the inherent risk of another regime change policy – even if Obama was half-hearted about it at best and limited direct US involvement in it. The administration was unwilling to be at cross-purposes with its Sunni allies, the former official recalled, because of the direct US military interests at stake in its alliances with those three states: the Saudis effectively controlled US access to the naval base in Bahrain, Turkey controlled the airbase at Incirlik, and Qatar controlled land and air bases that had become central to US military operations in the region. What was a disastrous blunder in terms of the consequences for the Syrian people, therefore, was the only choice acceptable to the powerful national security institutions that constitute what has become the US permanent war state. Their first concern was to ensure that existing military and intelligence arrangements and relationships were not jeopardised. And Obama was not prepared to override that concern, despite his well-known skepticism about any arming of anti-Assad rebels in light of the blowback from America's support for the Afghan Mujahidin in the 1980s. »

Pendant que se déroulait cette “politique” telle que nous la rapporte Porter, le Général Flynn, selon ses propres mots, toquait désespérément à la porte de la “narrative-infranchissable” interdisant l’entrée de la Maison-Blanche aux diverses synthèses de la DIA avertissant que la susdite “politique” conduisait inéluctablement à la formation de groupes terroristes islamistes puissants, quelque chose comme Daesh/EI. Très-dernièrement, Obama s’est plaint de n’avoir pas été averti par ses conseillers de la naissance et de l’expansion de Daesh, ce qui conduit à se poser la question, sous forme de diverses possibilités : les conseillers d’Obama étaient-ils (et sont-ils) toujours des incompétents ? Le président n’écoute-t-il que d’une oreille et est-il seulement capable d’entendre ? L’administration Obama s’est-elle intéressée réellement à la politique extérieure ou a-t-elle simplement suivi un scénario de relations publiques aussi bien pour la consommation intérieure (progressiste) et le legs du président, où l’affectivisme tenait le rôle principal ? Tout cela a-t-il vraiment un sens selon le tour qu’on lui donne (politique extérieure et sécurité nationale) et mérite-t-il la peine qu’on se pose des questions à cet égard face à ces gens dont la psychologie exacerbée est fermée à réflexion comportant l’engagement de la responsabilité du jugement, et la fermeté du caractère dans cette responsabilité ?

L’affaire syrienne semble figurer le comble de l’irresponsabilité en politique, c’est-à-dire le comble de l’“anti-politique” suivie par le bloc-BAO depuis 2008-2010 et le début du “printemps arabe” où l’on a vu les USA et l’Europe se ranger exactement sur la même ligne de l’affectivisme pour susciter une suite ininterrompue de catastrophes dont les effets se font directement sentir sur les territoires des pays du bloc-BAO. Il n’y a pas de complot, il n’y a même pas d’incompétence, il y a une situation psychologique qui ne peut se décrire que comme pathologique, et une exacerbation et un paroxysme continuels pour entretenir l’hystérie qui constitue le principal moteur de l’affectivisme. Le résultat, en plus des désordres et des tueries, a été un effondrement catastrophique de la puissance effective et de l’influence diplomatique et de communication des pays concernés dans cette région, exactement comme on l’a vu décrite par Porther pour les USA : les pays du bloc-BAO ne jouent aujourd’hui plus aucun rôle diplomatique au Moyen-Orient et se contentent de poursuivre ce qui leur reste d’actions subversives possibles pour aider aveuglément et le plus possible les groupes islamistes préparant leurs opérations terroristes sur leurs propres territoires (ceux des pays du bloc-BAO), tout en tentant d’arracher des miettes contractuelles (ventes d’armement et d’autres babioles) aux magots des pays pétroliers.

On doit par conséquent attendre une chose absolument essentielle de la part du président Trump, s’il est sérieux, – lui qui, au moins, semble écouter le général Flynn devenu son conseiller en matière de sécurité nationale : qu’il prenne acte publiquement de cette situation qui est aujourd’hui un fait acquis de la situation au Moyen-Orient, qu’il envisage de travailler avec les “gens sérieux” de la région, – y compris les Iraniens, dont il devrait revoir sa position à leur propos sous peine d’ouvrir un nouvel enchaînement catastrophique. Dans le prolongement de cette logique, on en arrive à ce qui devrait être finalement sa tâche principale, cette “chose absolument essentielle”, qui serait d’établir la vérité-de-situation de cette catastrophe, c’est-à-dire d’expliquer sérieusement, et non plus seulement comme un slogan de campagne, comment Obama, et avec lui les pays du bloc-BAO, ont littéralement fabriqué Daesh et les divers autres groupes terroristes islamistes.

Trump devrait le dire et le faire savoir publiquement, notamment lors des réunions publiques (G-7/8, G-20, OTAN, etc.), y compris dans les communiqués officiels de ces réunions qui, de ce fait, acquerraient pour la première fois une certaine utilité. C’est, pour ce cas, qu’on pourrait mesurer l’aspect véritablement “révolutionnaire” de ce président : arriver à imposer dans la narrative officielle le contraire de ce qui a été psalmodié pendant des années, proclamer les responsabilités à cet égard, – et il ne serait pas étonnant que cette sorte d'initiative soit envisagée par son équipe. A notre sens, il s'agit d'un des aspects essentiels de la politique étrangère et de sécurité nationale, et le seul moyen de briser l’espèce d’emprisonnement-Système où se trouvent aujourd’hui les pays du bloc-BAO, pour placer leurs directions face à leurs opinions publiques, avec leurs responsabilités dans la situation courante largement exposées.

 

Mies en ligne le 28 décembre 2016 à 17H06

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