Sur la défensive? Brusquement, GW joue gros avec les WMD

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Sur la défensive ? Brusquement, GW joue gros avec les WMD


7 juin 2003 — La lecture de la newsletter que le Weekly Standard adresse chaque samedi à ses abonnés est toujours instructive. (The Weekly Standard, hebdomadaire qui diffuse les conceptions et “messages” divers des néo-conservateurs.)

Le numéro de ce samedi 7 juin est encore plus intéressant. Par rapport au vrai sujet pour les néo-conservateurs, la guerre contre la terreur (c’est-à-dire ce qui se passe en Irak et ce qu’on espère pour au-delà, en Iran par exemple), les sujets proposés sont soit hors de propos (John V. Last sur le football américain), soit complètement marginaux (Rena Perderson sur la Birmanie). Par contre, de plus d’intérêt pour nous est le véritable “message”, le point principal que propose cette édition, la très courte note en forme d’édito de Fred Barnes. Le voici, sous le titre « The Hail Mary » :


« Why are Democrats hammering away at the failure to find weapons of mass destruction in Iraq? Polls show the public doesn't care. But there is method to the Democrats’ madness. President Bush’s greatest political strength is his reputation for truthfulness and integrity. If information turns up in congressional hearings that indicates he knew WMDs weren't likely to be found in Iraq — an incriminating memo perhaps, or notes from of an Oval Office meeting — it could severely damaged his reputation. That’s what Democrats are praying for. It probably won’t happen, but Democrats haven’t got much else to work with. »


C’est un mini-édito étrange à plus d’un égard, qui montre un état d’esprit singulièrement “sur la défensive”. Il y a une reconnaissance implicite de la possibilité que Bush soit pris officiellement en flagrant délit de mensonge sur la question des WMD, à partir de documents existants (« If information turns up in congressional hearings that indicates he knew WMDs weren't likely to be found in Iraq — an incriminating memo perhaps, or notes from of an Oval Office meeting — it could severely damaged [the GW Bush’s] reputation »). La réfutation d’une telle possibilité est assez molle, par rapport à la véhémence habituelle des néo-conservateurs lorsqu’il s’agit d’encenser GW (« It probably won’t happen »).

On peut mettre ces remarques néo-conservatrices à la fois prudentes et non sans inquiétude en parallèle avec un long article du juriste John Dean (ex-conseiller juridique de Nixon, démissionnaire pour protester contre le Watergate). Dean s’interroge sur les possibilités d’“impeachment” de Bush s’il s’avérait qu’il a menti sur la question des WMD, et si ce mensonge était officiellement mis en évidence lors des auditions parlementaires. Sa conclusion est extrêmement pessimiste :


« As I remarked in an earlier column, this Administration may be due for a scandal. While Bush narrowly escaped being dragged into Enron, it was not, in any event, his doing. But the war in Iraq is all Bush's doing, and it is appropriate that he be held accountable.

» To put it bluntly, if Bush has taken Congress and the nation into war based on bogus information, he is cooked. Manipulation or deliberate misuse of national security intelligence data, if proven, could be “a high crime” under the Constitution's impeachment clause. It would also be a violation of federal criminal law, including the broad federal anti-conspiracy statute, which renders it a felony “to defraud the United States, or any agency thereof in any manner or for any purpose.” »


On pourrait assister à un étrange enchaînement. Alors que le public (US) est indifférent à l’affaire des WMD introuvables, alors que Blair paraît en bien plus mauvaise posture que Bush, voilà que s’enclenche un mécanisme (les auditions du Congrès) qui, par son caractère juridique et officiel, peut très rapidement déraper dans la plus grave des circonstances. Dans ce cas, en effet, tout “dérapage” a des conséquences juridiques.

Inversons le problème qui nous a agités pendant des mois : existe-t-il un “smoking gun” contre Bush, comme on a affirmé qu’il en existait contre Saddam (les WMD, justement) ? Curieusement, Barnes, pourtant ferme soutien de GW, n’écarte pas cette possibilité (un “smoking gun”, ce serait « an incriminating memo perhaps, or notes from of an Oval Office meeting »). Si cela devait être le cas, brusquement apparaîtrait l’hypothèse de l’impeachment (voir John Dean). On comprend évidemment que les démocrates vont manoeuvrer pour tenter de sonder dans ces eaux glauques, — et, éventuellement, faire payer aux républicains l’aventure de l’impeachment abracadabrant de Clinton en 1998-99.

Curieuse perspective, — après un aller express Washington-Bagdad, un retour inattendu, comme un vol de boomerang (ce que les spécialistes de la CIA appellent blowback), Bagdad-Washington. Ce serait une étonnante manière, de la part du semi-fantôme de Saddam, de s’offrir, 11 ans après, le scalp du second Bush.