Qui est l’ennemi: Fox.News ou les talibans?

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Effectivement, Glenn Beck, un des présentateurs vedettes de Fox.News et l’un des plus féroces critiques de BHO, jusqu’à des violences et des insinuations de langages qui choquent beaucoup d’observateurs habitués aux formes légalistes du système, Beck justifie la question que nous posons: «[The White House] is more worried about the war on Fox than the actual war in Afghanistan…». Dans tous les cas, dans cette guerre-là, contre Fox.News, BHO est plus rapide à se décider…

C’est ainsi que le Guardian décrit, le 14 octobre 2009, les conditions de l’ouverture des hostilités avec Fox.News, bien plus rapide que la décision concernant l’envoi de troupes supplémentaires en Afghanistan.

«Like many wars, it wasn't hard to see this one coming, but the formal declaration of hostilities still caught almost everyone off guard. Anita Dunn, the White House communications director, fired the first shot of the formal conflict at the weekend when she said that Obama had refused to appear on Fox News last month – at a time when he was doing a round of interviews on other stations to promote healthcare reform – because the most-watched cable news channel in America dealt in rightwing propaganda, not news.

»“Fox News often operates either as the research arm or the communications arm of the Republican party,” she said. “They take their talking points, put them on the air; take their opposition research, put them on the air. And that's fine. But let's not pretend they're a news network the way CNN is ... We're going to treat them the way we would treat an opponent.”»

L’article décrit les turpitudes innombrables et bien connues de Fox.News, les attaques de Beck, celles de O’Reilly, autre présentateur-vedette du réseau, et ainsi de suite. Pour autant, tout le monde n’est pas d’accord avec la tactique d'Obama. L’article se termine sur cette note critique, des alliés même de BHO.

«Yet even some of those sympathetic to the White House's view of Fox question the wisdom of open confrontation with a major news network. Fox News is revelling in the publicity, using it to portray itself to a growing viewership as the only network prepared to stand up to the president. It has some commentators repeating an old adage about newspapers, repeated by Bill Clinton when he was president: “Never pick a fight with people who buy ink by the barrel.”»

@PAYANT La décision d’Obama de n’avoir aucun rapport avec Fox.News est aisée à comprendre, lorsqu’on a quelques échos des interventions courantes de Fox.News; elle est aussi très inhabituelle et risquée, dans un pays où la “liberté (formelle) de la presse” et l’accès (formel) aux dirigeants politiques sont de règle. Sa rapidité et son caractère abrupt surprennent, bien qu’on ne voit pas comment Obama aurait pu agir autrement, placé devant les sollicitatins de Fox.News. L’opportunité de la décision n’est pas évidente et justifie un débat. De toutes les façons, en observant qu’Obama “est plus prompt à faire la guerre à Fox.News qu’en Afghanistan”, Beck n’a pas tort stricto sensu. L’attitude décisive d’un cas contraste avec l’indécision de l’autre. On dira que la différence presque caricaturale des causes et de leurs conséquences justifie cette différence; certes oui, mais pas seulement, et l’on n’aura pas complètement raison; cette remarque, notamment parce que l’indécision d’Obama concernant l’Afghanistan concerne, justement, des aspects qui ont à voir indirectement avec sa guerre-éclair lancée contre Fox.News, puisqu’il s’agit également, et peut-être majoritairement, d’une indécision qui prend en compte d’abord l’opinion publique, l’opposition, bref tout ce qu’on nomme “la communication” dont l’affaire Fox.News fait partie.

Alors, il s’agit de l’illustration d’un dilemme et d’un comportement caractéristique d’une époque et d’un système pervertis, c’est-à-dire d’une politique complètement faussaire. Cette politique est décidée le plus souvent, presque exclusivement, pour des motifs très indirectement liés aux cas apparemment concernés, souvent au seul niveau des effets indirects sur d’autres domaines, très souvent sans rapport d’analyse avec les “cas concernés”. En ce sens, la remarque ironique et sarcastique de Beck trouve une certaine justification. Plus encore, la décision d’Obama, si inhabituelle par rapport au comportement auquel il nous a habitués, nous montre combien il est, finalement, bien plus préoccupés de sa position intérieure, des attaques dont il est l’objet, du mécontentement intérieur ici et là, que des affaires extérieures (sauf pour leurs effets intérieurs). Cette situation est si évidente pour l’Afghanistan, à côté des grandes théories pompeuses sur les grands intérêts stratégiques et les “Grands Jeux” qu’on nous cite souvent, qu’on voit difficilement comment une telle guerre peut aboutir à une issue autre que catastrophique tant elle est considérée pour tant d’autres choses que ce qu’elle est. Certes, il y a de belles thèses, des instants de panique, lorsqu’on cite la géopolitique de l’énergie, les craintes pour le nucléaire pakistanais, et même le terrorisme auquel certains doivent tout de même croire, mais ce ne sont que des accidents de la délibération et une justification des experts de leurs salaires et de leur importance à leurs propres yeux. L’essentiel de la décision est aujourd’hui menée pour toutes les raisons du monde, dans ses modalités, dans ses caractéristiques, sauf pour des raisons opérationnelles objectivement appréciées pour elles-mêmes. Cela nous conduit à la conclusion plus générale, déjà suggérée ou affirmée tant de fois par nous, que, quoi qu’il en soit, les crises fondamentales sont aujourd’hui au cœur du système et nullement dans les aventures extérieures folles et nihilistes que ce système a lancées. Ces aventures n’ont d’effet politique réel que par leurs effets sur ces crises intérieures.

…Ce qui ne fait pas pour autant de la décision d’Obama vis-à-vis de Fox.News une décision avisée. Effectivement, comme le dit la conclusion citée plus haut, elle risque bien d’encore plus exacerber l’action anti-Obama du réseau Fox.News et de ses alliés de la droite nihiliste du parti républicain. D’autre part, la réaction d’Obama se comprend… Etc., etc., tout et son contraire car la situation est depuis si longtemps infectée par le virtualisme, la “politique de l’idéologie et de l’instinct” et tout ce qui va avec qu’aucune décision ne peut plus apporter de satisfaction complète ni s’avérer réellement avisée.


Mis en ligne le 15 octobre 2009 à 10H22

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