Le Sénat US contre le F-22 et la vraie position “anti-guerre” dans cette affaire

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Le Sénat a adopté hier l’amendement McCain sur le projet de loi budgétaire pour le budget FY2010 pour le Pentagone, qui supprime les fonds notamment destinés à produire sept F-22 de plus. Le résultat est remarquablement favorable à la position de l’administration et contre la poursuite de la production du F-22, par 58 voix contre 40. Ce résultat est une surprise majeure par rapport aux pronostics qui, la semaine dernière encore, annonçaient une défaite pour l’administration.

Pour autant, l’affaire n’est pas terminée puisque la Chambre a voté un projet de budget prévoyant la poursuite de la production du F-22 par une majorité encore plus considérable de 389 voix contre 22. Les deux chambres doivent trouver un compromis entre leurs deux versions de la loi budgétaire du Pentagone. Dans ce compromis, bien que l’affaire F-22 tienne une infime partie budgétaire de la loi, elle tiendra évidemment un rôle politique important. La position de l’administration Obama a été de mettre un poids extraordinaire dans cette affaire, pour des raisons qui ne sont pas toujours jugées compréhensibles (le sénateur Chambliss, partisan du F-22, observait après le vote: «We’ve been fighting a headwind from the White House and the Pentagon leadership for weeks now. For whatever reason, the White House expended a lot of political capital to seek to terminate the F-22 program.») Le vote du Sénat rend encore plus complexe la situation, notamment dans la difficulté d’appréhender la position des parlementaires telle qu’elle évoluera, et d’autant plus difficile de déterminer l’issue de cette bataille.

Sur le fond, l’ambiguïté du cas F-22 est plus forte que jamais, notamment de la part de ceux qui appartiennent au camp anti-guerre et anti-interventionniste et appuient la fin du programme F-22. Il est intéressant, par contre, de découvrir le cas d’un commentateur relativement peu connu, certainement peu informé sur les questions de défense et qui ne prétend certes pas l’être, qui s’affiche “anti-guerre” et qui juge assez illogique, pour cette position, de soutenir la position du gouvernement contre le F-22.

Joshua Kucera expose, le 21 juillet 2009, «The anti-war case for fighter jets». S’il accepte évidemment le principe de l’opposition à une telle dépense du point de vue “anti-guerre”, il s’interroge par contre sur son aspect pratique, ou disons tactique. Il observe que le F-22 est un avion de combat qui n’est pas utilisé dans les guerres expansionnistes actuelles, définies par les théories “anti-insurectionnelles” en vogue à Washington, et sur lesquelles s'appuie Robert Gates. Au contraire, le F-22 est présenté comme un avion de domination aérienne, dont l’un des rôles principaux est notamment de contrôler l’espace aérien national, donc un rôle purement défensif et justifié. De ce point de vue, estime Kucera, il est préférable de produire quelques F-22 de plus que d’ajouter 20.000 hommes à l’U.S. Army, comme l’a décidé Gates, qui vont renforcer le corps expéditionnaire US en Afghanistan. Comme rien n’est prévu dans la programmation du Pentagone pour le F-22, une décision de poursuivre la production aboutirait objectivement à réduire d’autant les sommes d’argent affectées aux structures expansionnistes et bellicistes du Pentagone. (Kucera ne dit évidemment pas un mot de l’opposition F-22-JSF, qu’il ne peut d’ailleurs prétendre connaître puisqu’il se reconnaît lui-même fort peu informé. Il n’empêche qu’on retrouve dans cette opposition la même logique que lui-même formule en mettant en opposition les F-22 en plus et les 20.000 hommes en plus: en abandonnant le F-22, on favorise les structures interventionnistes, dont le JSF est également partie prenante. C’est une position cohérente qui rencontre ce qui devrait être la logique de la position anti-guerre concernant le cas F-22.)

«But the second justification, that the F-22 is not suited for fighting counterinsurgencies, is more troubling. I’m not much of a military analyst, but pretty much everyone knows the danger of fighting the last war (or two wars, as the case may be). That should be especially true when the last wars have been utter debacles and should never have been undertaken in the first place (except, you could argue, the first couple of months of Afghanistan, the amount of time it took to dislodge al Qaeda).

»Getting good at counterinsurgencies is not a good thing if it makes us more likely to try to attempt more counterinsurgencies, and smarter people than me think that is the danger of going down this road we’re on. To use another defense-related cliché, when all you have is a hammer, everything looks like a nail. When we get really good at defeating local rebellions against governments that are friendly to us, you can bet that is going to look a lot more tempting. Andrew Bacevich:

»“According to a currently fashionable view, the chief operative lesson of the Iraq War is that counterinsurgency works, with U.S. forces having now mastered the best practices required to prevail in conflicts of this nature. Those who adhere to this view expect the Long War to bring more such challenges, with the neglected Afghan conflict even now presenting itself as next in line. Given this prospect, they want the Pentagon to gear itself up for a succession of such trials, enshrining counterinsurgency as the preferred American way of war in place of discredited concepts like “shock and awe.” Doing so will have large implications for how defense dollars are distributed among the various armed services and for how U.S. forces are trained, equipped and configured. Ask yourself how many fighter-bombers or nuclear submarines it takes to establish an effective government presence in each of Afghanistan’s 40,020 villages and you get the gist of what this might imply.

»”Yet given the costs of Iraq-now second only to World War II as the most expensive war in all U.S. history-and given the way previous efforts to pacify the Afghan countryside have fared, how much should we expect to spend in redeeming Afghanistan’s forty thousand villages? Having completed that task five or ten years hence, how many other villages in Pakistan, Iran, Syria and Egypt will require similar ministrations? And how many more accidental guerrillas will we inadvertently create along the way?”

»Is a military oriented, by contrast, toward fighting “peer competitors” less likely to get us into trouble? Air power has not been much of a factor in our recent adventures: When The Atlantic wrote its paean to the F-22 earlier this year, the “ace” it profiled - the man who has the most air combat kills in the U.S. Air Force - had shot down a whopping three enemy planes, two in 1991 in Iraq and one in Kosovo. (He pilots an F-15, which has been plenty capable enough for the two-bit dictators and their third-rate air forces we have been picking on since the end of the Cold War.)

»But, imagine an alternate reality where we subscribe to the old-fashioned notion that the Defense Department is actually oriented toward defense, rather than to “project power” (Pentagon-ese for “getting in other countries’ business”). Then sophisticated fighter jets actually are useful, as defense against an air attack. Ground troops - like the 22,000 additional that Gates asked for this week - are less useful, unless relations with Canada or Mexico decline quite a bit.»


Mis en ligne le 22 juillet 2009 à 09H41