Forum

Article : Les conspirations d’Israël Shamir

Pour poster un commentaire, vous devez vous identifier

complot sous le complot.

jean-luce Morlie

  23/05/2020

Deux historiens de qualité, Carlo Ginzburg et Alexandre Adler ont abordé le thème du complotisme  dans l'Histoire sous le même angle.

Il y a complotisme parce que précisément, un complot sous-jacent nous cache les éléments d'une claire compréhension des faits et que nous n'avons donc  d'autre explication que d'en inventer une de toute pièce.
 

Hourya

Hourya Slimani

  23/05/2020

Effectivement certaines infos de cet auteur sont à prendre avec des pincettes. Le taux de mortalité mondial officiel est de 43,5 mort par million d'habitant soit 0,oo435 % de la population mondiale au samedi 23 mai 0h00 GMT, ce qui est tout de même très faible alors qu'était prédit un taux de 0,5 à 3 % selon ce que j'ai pu lire. Mais on ne sait jamais l'année n'étant pas terminée, ces apprentis Cassandre peuvent encore voir se réaliser leurs prédictions. En ce qui concerne le sujet de l'article, je m'étais fait la même remarque sur la tendance de nos sociétés à vouloir donner un sens logique aux choses là où mes parents auraient parlé de la volonté de Dieu.

La pente cachée du logos ?

jc

  23/05/2020

PhG: "Je précise, pour être moi-même sûr de la juste exposition de mon sujet, qu’on prend ici le concept de Logos comme il faut, c’est-à-dire comme celui de “raison” dans notre langue, – c’est-à-dire, selon  Wiki : « Dans la pensée grecque antique, le logos (grec ancien λόγοςlógos “parole, discours, raison, relation”) est au départ le discours parlé ou écrit. Par extension, logos désigne également la raison... »

Le terme grec classique "logos" recouvre, on le sait bien, une multitude de sens. Signifiant à l'origine "rapport" (la racine indo-européenne initiale "leg" signifiait "lier", sens que l'on retrouve dans les "ligases" de nos biologistes moléculaires), le sens a bifurqué soit du côté du nombre, de l'arithmétique (les "αλογα" d'Eudoxe sont nos "irrationnels" modernes), soit du côté de la raison, du discours, de la parole en général (le Verbe). Comment s'expliquer que la pensée grecque classique -en qui beaucoup voient, sans doute à juste titre, l'un des sommets de l'activité créatrice de l'homme-, ait pu s'accommoder d'une telle ambiguïté? À notre époque, quoi de commun entre l'art de l'avocat et les performances de l'ordinateur? Si des penseurs aussi pénétrants que les Présocratiques, Platon ou Aristote ont si abondamment employé ce terme, ne serait-ce pas plutôt que la polysémie du logos -ce πολλαχος λεγομενον- les servait?
  Les quelque trente-cinq articles réunis dans ce volume jalonnent le spectre continu sous-tendant l'ambiguïté du terme. J'aimerais faire comprendre à mon lecteur combien il est fécond de revenir à cette source du logos, où une raison profondément une se revêt tour à tour de l'appareil mathématique (en général rudimentaire et mutilé, car la générativité du nombre ne peut s'y déployer) ou de la déduction verbale, langagière -non formalisée- du "bon sens". Mais le choix qui s'opère entre ces deux versants du logos, n'a rien d'arbitraire. On le sait bien: en mathématique, il n'y a pas d'élément sémantique individué jouant le rôle du concept sous-jacent au substantif de la langue. À peine le point géométrique -impalpable entité, localisation pure sémantiquement vide-, peut-il jouer ce rôle: tout le reste n'est que relation, opération, construction. Dans la langue, les relations syntaxiques visibles sont d'une effrayante pauvreté, d'une monotonie qui prend peur d'elle-même et stoppe toute générativité (éviter la répétition, manifestation de l'instinct de mort selon Freud…). Par contre, les éléments de base -noms, verbes, ou adjectifs (et j'emploie à dessein une terminologie naïve mais à validité très probablement universelle)- sont sémantiquement très riches, ils désignent des concepts dont la signification, comme le montre la consultation des grands dictionnaires, est d'une richesse qui dépasse l'imagination. C'est dire que ces deux modes d'expression reposent chacun sur une capacité de résumer, par un symbole ou une opération, une situation d'une très grande complexité.
  Mais la complexité mathématique repose sur la répétition, la monotonie. On sait, depuis Zénon d'Élée, que le continu géométrique est susceptible d'accueillir une infinité d'opérations, toutes identiques. La complexité du concept, elle, qualitativement très variable, se trouve contrainte par une individuation, plus exactement une intentionnalité qui en assure l'unité, donc l'individualité; les structures syntaxiques peuvent alors s'interpréter comme des conflits entre ces intentionnalités. Il y a par conséquent, dans le langage, une prévalence de l'intentionnalité accrochée à chacun des pivots syntaxiques, qui ne se rencontre guère -voire pas du tout- dans l'objet mathématique, lequel n'existe que par sa propre forme, son équation, sa définition. De là vient que le formalisme mathématique (sous sa forme topologico-algébrique, celle de la théorie des catastrophes) est particulièrement bien approprié à la description des situations, en général conflictuelles, où se heurtent et se désagrègent progressivement les intentionnalités constitutives des concepts.
  Ce n'est pas un hasard si, finalement, l'une des meilleures applications de la théorie des catastrophes est encore le modèle de l'agressivité du chien proposé par Christopher Zeeman. Malgré son caractère non quantitatif, qui a suscité la dérision des scientifiques professionnels, il a l'avantage inestimable de montrer ce qui fait la supériorité d'un modèle géométrique sur une construction conceptuelle. Expliquer linguistiquement son contenu oblige à des paraphrases compliquées dont la cohérence sémantique n'est pas évidente.
  Ces deux pentes du logos manifestent sans doute une distinction irréductible entre deux modes d'appréhender l'existence. Le mode métaphysique, celui d'Aristote -l'être comme acte ("on agit comme on est" dit saint Thomas)-, et le mode géométrique: la forme visible dans l'étendue. Ces deux modes existent bel et bien l'un et l'autre, et à leurs frontières subsiste un no man's land où se déploient les catastrophes. L'exploration de ces marches, où se heurtent vouloir et étendue, n'est pas chose aisée et je suis sûr que de nombreux lecteurs trouveront parfois que mes textes exigent un effort intellectuel excessif. Ceux qui ne se laisseront pas rebuter en retireront, je l'espère, quelque bénéfice. À une époque où fleurissent les apologistes du Chaos, on peut trouver préférable d'explorer certaines faces -encore trop peu connues- du logos.
(Apologie du logos, Envoi, pp. 31 à 33)