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Article : Frédéric Schiller et la faillite occidentale

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Verre à moitié vide ou à moitié plein .

Christian Feugnet

  26/10/2018

Et si la decadence consistait justement en  cet effarouchement , ( peur ?) devant  cette béte inhumaine qui surgit et s'élance . Aux origines on s'affronte aux dragons et Titans et là , on s'écrase ? se resigne ? se complaint ? se répand en nostalgies ? . Plutot que relever le défi !

Le conflit des forces et des formes

jc

  26/10/2018

C'est ce à quoi me fait penser le présent article où NB fait ressortir chez Schiller le conflit Nature/Culture: "(...) la beauté ne fonde sa domination que sur la disparition de vertus héroïques.". Alias, pour moi, conflit entre la force vitale brute de la matière -la pulsion créatrice- et la forme qui la limite, qui la canalise et la tempère. (Alors qu'il me semble que PhG voit la chose en quelque sorte inversée (peut-être…, on verra…): "Dans cette lutte prodigieuse entre la matière rétive et la volonté créatrice"*.)

Il me semble intéressant de confronter cet article de NB avec l'article de Thom: "L'art, lieu du conflit des formes et des forces?" (AL)

Il ne fait guère de doute pour moi que la puissance créatrice (alias les vertus héroïques de Schiller?) s'émousse à mesure que la matière prend forme. De deux chose l'une:

1. la forme finalement obtenue est parfaite et n'a donc plus besoin de force pour la maintenir, elle est alors immortelle (Jérusalem céleste);
2. la forme est imparfaite et s'effondre dès qu'elle n'a plus suffisamment de forces pour la maintenir (Dans la bible Caïn a fondé la première ville, la première Jérusalem terrestre.).

Aristote: "D'une façon générale, il est visible que l'être engendré est imparfait et en marche vers son principe; par suite le dernier selon la génération doit être le premier selon la nature.".

Notre condition humaine nous fait "naturellement" penser l'évolution comme un vieillissement, une solidification (idéalement depuis le Paradis terrestre jusqu'à la Jérusalem céleste, pratiquement du Paradis terrestre à une quelconque Jérusalem terrestre, Hénoch ou New York par exemple). Il nous faut, je crois, essayer de penser l'évolution comme un rajeunissement, comme un "à venir"**. Car pour construire durablement il faut d'abord correctement fonder. Aristote l'a dit à sa façon: "D'une façon générale, il est visible que l'être engendré est imparfait et en marche vers son principe; par suite le dernier selon la génération doit être le premier selon la nature.". Sic transit gloria mundi?

Quelques citations thomiennes pour finir:

"(...) il m'est difficile de voir pourquoi un être pleinement différencié ne pourrait être immortel."

"Les actes finalisés comportent donc souvent une morphologie de jonction (c'en est presque une caractéristique contrairement à l'acte fondateur, qui, lui, "sépare" comme l'entéléchie d'Aristote)." (ES p.222)

"En permettant la construction de structures mentales qui simulent de plus en plus exactement les structures et les forces du monde extérieur -ainsi que la structure même de l'esprit- l'activité mathématique se place dans le droit fil de l'évolution. C'est le jeu signifiant par excellence, par lequel l'homme se délivre des servitudes biologiques qui pèsent sur son langage et sa pensée et s'assure les meilleures chances de survie pour l'humanité." (SSM, 2ème ed., p.320)

"On pourrait rapporter tous les phénomènes vitaux à la manifestation d'un être géométrique qu'on appellerait le champ vital (tout comme le champ gravitationnel ou le champ électromagnétique), les êtres vivants seraient les particules ou les singularités structurellement stables de ce champ."


*: phrase de Daniel Rops à propos du Balzac de Rodin, dont PhG écrit -à la fin du tome II de "La Grâce de l'Histoire"- "La parabole de Rodin fera l'affaire. J'y trouve tout ce qui m'importe pour constituer la base du travail final." (p.410). Peut-être est-ce comme ça que PhG voit le "Balzac" de Rodin: à mi-chemin entre matière et forme, entre puissance et acte? (Cf. p.407)

**: Cf. "La Grâce" tome II, p.420