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Article : Deux Su-57 sur les plate-bandes du Pentagone

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La version russe du F-35, alias JSF...

Alexis Toulet

  23/02/2018

S'il faut être un peu direct, le Su-57 est pour l'essentiel la version russe du F-35. Ambitions et rodomontades similaires, planning de production décalé et réduit - d'ailleurs, encore faudra-t-il faire voler le premier exemplaire de production, avant de songer à en fabriquer d'autres.

Le jugement apparaît un peu dur ? Oui peut-être. Après tout, les Russes n'ont du moins pas commencé la production en série d'un appareil qui ne marche pas. Et le Su-57 n'a pas (encore ?) pris autant de retard que le F-35. Un très joli ratage cependant : avoir dégoûté les Indiens qui ont préféré se retirer du programme commun pour développer cet avion - après avoir émis moult critiques - et acheter plutôt… eh bien du Rafale naturellement.

Un point commun indubitable avec le F-35 : on "déploie" des prototypes ou appareils "de série" qui ne fonctionnent pas afin de jouer au supergrand. Comme les Etats-Unis. Et sans plus d'effet que de communication : les personnes informées savent bien à quoi s'en tenir. 

Containment

Ni Ando

  24/02/2018

Le retournement est intéressant. Le pays qui vit naître le prince qui, pour plaire à son impératrice en inspection dans son empire, faisait poser de fausses façades dans les villages sur des bâtiments décrépis afin de donner une impression de prospérité, semble désormais vivre dans le réel. A l'inverse, point de prince Potemkine à Boston et une vieille tradition de croyance presque infantile dans les bienfaits du scientisme. Pourtant, les Etats-Unis semblent s'enfoncer chaque jour plus profondément dans les marais du virtuel. On peut prédire au Su 57 un destin très différent de celui, funestement prévisible, du F35. En amont, lors de la conception à Komsomolsk-sur-l'Amour, il y a eu certes une profusion d'intelligence technologique et de créativité, mais aussi beaucoup de bon sens. Les ressources financières du CMI russe sont limitées au regard des besoins et du rôle géopolitique mondial de ce pays. Le gaspillage de celles-ci dans des projets sans utilité prouvée est devenu rare en Russie. Les matériels sont longuement testés avant la production en série. Quand le prototype, bien que superbe sur un plan technique, prouve qu'il ne répond pas au besoin défini, il est abandonné. On ne trouve pas en Russie ce phantasme du technologisme  sur la base du seul critère de la technique pure. A l'instar des matériels de qualité que le CMI produit maintenant depuis quelques années on peut parier sans grand risque que sur les 100 ou peut-être 200  Su 57 que l'Etat russe commandera sur quelques années la plupart seront des machines opérationnelles et efficaces, contrairement au F 35 (sauf erreur un Su 57 peut en théorie abattre un adversaire à 200 km de distance contre 120 km pour le F-35). Le rapport prix/qualité joue largement en faveur de la Russie (à priori 70/80ME pour le Su 57 vs 120/130ME pour le "fer  à repasser", "frais de mise en service compris" si l'on prend comme exemple la dernière offre faite par Lockheed Martin Corp au gouvernement belge. Enfin, les caractéristiques spécifiques de ces appareils n'exigent pas qu'ils soient produits en grand nombre pour peser efficacement en cas d'affrontement. Face à un régime qui n'entend que la force brute le Su 57 aura certainement son rôle stabilisateur à jouer. Les outils du "containment" de la puissance étasunienne semblent se mettre en place étape par étape.
 

Deux de plus.

Ni Ando

  24/02/2018

Deux Su57 supplémentaires auraient atterri hier ou ce jour à Hmeymim portant à quatre le nombre d'appareils. Quatre, c'est trop pour tester les capacités opérationnelles. Il est possible que le gouvernement russe pose les bases d'une domination complète du ciel syrien avec des missions d'interdiction aériennes confiées aux nouveaux appareils.  Si c'est confirmé c'est un démenti aux commentaires de la presse MS qui indiquait que l'armée russe en Syrie n'avait pas les moyens d'assurer sur place la maintenance de ces avions, ou que ces appareils n'étaient pas encore aptes au combat. Une décision a été prise à Moscou, sans doute portant sur le respect de l'intégrité territoriale syrienne.    

Remarques sur les rodomontades du SU-57

Mad Max le chauffeur d'avions

  27/02/2018

Monsieur Alexis Toulet, vous vous amusez beaucoup et c'est bien agréable : le SU-57 pourtant ...en parade au-dessus de la Syrie, pour faire oublier son échec en Inde (?), pour épater la galerie, pour le plaisir de « déployer » des prototypes ou appareils de série qui ne marchent pas, ou pour « jouer au supergrand » comme les Etats-Unis sans plus d'effet que de « communication » sont paragraphes cruels pour les humains qui tentent de comprendre quelque chose aux affaires ! Mettez la grosse bête russe sur la même étagère que le F-35 au rayon « défense » du casino, et voilà que vous opérez un petit dérapage de très intrépide nature.
 
Un article publié dans la revue Aerospace Daily & Defense Report et daté du 20 septembre 2017 ( http://aviationweek.com/defense/will-us-retrofit-older-f-35s-fight-or-buy-new ) avait décrit le mieux le théâtre technico-obsessionnel américain dont le F-35 est le produit emblématique. Il y a été rappelé que cet « avion » n'est en l'état ni un vrai prototype, ni un appareil de série. C'est « autre chose ». Les plus ou moins 270 F-35 déjà livrés soulèvent une question qu'on n'aurait même pas imaginé envisageable (même pour rire) dans un complexe économique et industriel normal : « Que va-t-on en faire ? »
 
Quand on fabrique des prototypes, on en fait cinq ou six, parfois un peu plus, on les teste, on les casse éventuellement, on les met de côté à la fin et quand le programme est au point, on produit des appareils de série forts différents avec les cascades de modifications imposées par les essais. Le F-35, montagne de technos et de mécaniques fort ésotériques a bénéficié de cette très jolie idée qui consiste à produire les appareils de série en grand nombre tout de suite. Les essais ? On verrait bien plus tard. Malins les gens chez Lockheed Martin : aucun retour en arrière possible, les usines (pardon : les « laboratoires ») tournent à plein régime et l'argent rentre tout de suite.
 
Et on voit : le produit final après essai des « choses » produites est tellement différent de celui qu'on espérait (pardon : qu'on a lancé au début) que retrofiter les 280 appareils déjà livrés (c'est-à-dire modifier l'original pour qu'il fonctionne normalement) sera finalement plus cher que… de les mettre à la casse et de les refaire en entier.
 
Hollé !
 
Du joli travail, très « complexe militaro-industriel » à la Eisenhower puisque la planche à billets tourne à plein régime : 280 « avions » payés, dont un bon nombre par les gentils Européens. 280 à refaire et à repayer (« pas chers, promis ! ») et un produit final qu'on a peine à appeler un système d'armes tant il donne des sueurs froides aux aviateurs (quand ils ne tombent pas tout simplement dans les pommes parce que l'air qu'il respirent dans le cockpit leur empoisonne les poumons).
 
On s'amuse un peu mais le refrain est connu. Pour parler gentiment à monsieur Alexis Toulet, disons juste que ce refrain américain est connu jusqu'à l'overdose par les collègues russes. Depuis dix ou vingt ans ils voient le théâtre guignol de la techno pieuvre s'emparer avec gloutonnerie de l'ex-excellence aéronautique américaine pour en faire des choses étranges dont ils ont le secret (enfin un vrai secret !) comme le F-35. Le spectacle est très vivant et très hollywoodien, les Russes le connaissent et comme ils veulent faire eux aussi un très bon show, ils se gardent comme de la peste de toute imitation (éviter les copyrights peut-être ?) et font un truc à eux : le SU-57 par exemple. Comme le loup, il ressemble au F-35, il a les yeux du F-35, il a la tête du F-35 ...mais ce n'est pas un F-35 : c'est un avion, un vrai, qui vole un moment en s'appelant « prototype », qu'on essaie un peu et qui finit par voler tout court. Pas trop usine à gaz on espère, mais un bon truc russe, solide, avec de grosses machines dedans - y compris de belles trouvailles high-tech parce que ça marche bien, sans laboratoire de recherche insonorisé, sous atmosphère stérilisée et sans cage de faraday pour le garer le soir.
 
D'ailleurs monsieur Toulet, sans vouloir vous vexer (on reste amis) : le SU-57 n'est pas fait pour affronter le JSF F-35 ! C'est pour faire des grimaces au F-22. Avion d'appui tactique pour l'un (le F-35 camion à bombes); avion de supériorité aérienne pour les autres (F-22 et SU-57).
 
Le F-22 donc (le vrai frère de l'air du SU-57) été produit pour un parc annoncé de 750 avions. On a arrêté les frais après 187 appareils, 400% plus chers que prévus, les chaine sont démantelées. Il n'aurait d'ailleurs pas été exportable (avant un F-44 peut-être de 68ème génération). Le SU-57 probablement non plus avant un petit temps. Le F-35 se vend bien, merci, pour une seule raison : ses concepteurs ont obligé les heureux clients à s'engager (et à financer) le programme dès le lancement. Coincés. Sauf les Belges, s'ils arrivent à faire cesser leur jalousie dévorante de ne pas avoir été coincés comme tout le monde au bon moment en se coinçant maintenant, na !
 
Alors si les Russes déploient des avions de génération hollywoodienne, c'est parce qu'ils savent jouer aux échecs et surtout – surtout – parce qu'ils sont aux antipodes des modèles de développement industriels de la défense américaine ! On fabrique, assez peu cher (pas mal le SU-57 avec un budget de la défense dix fois inférieur au Pentagone), on essaie de pas trop charger en techno inutiles, on teste assez vite, si ça marche pas on laisse tomber et on fait autre chose.
 
Les « rodomontades » russes ont ceci de particulier qu'elles sont quotidiennement soumises à l'hypothèse du test de vérité (le vrai cette fois) : qu'un général américain veuille démontrer (et ils auront de plus en plus besoin de démontrer) qu'il est le plus fort et qu'il peut faire un carton sur les Russes. Si le SU-57 « ne marche », c'est embêtant. Mais il n'est pas là pour ça (et encore ?) Il communique un peu, il est beau mais surtout pour « les personnes informées (qui) savent bien à quoi s'en tenir » ses prototypes vont (avant les vrais) titiller l'US Air Force là où elle pense régner sans partage : les longueurs d'onde, les signatures, les petites choses dont US Air Force (Air Farce ?) va vite se voir confirmé qu'elle ne les possède plus toute seule – voire qu'il en existe d'encore plus pétillantes… On fait le pari ?
 
Le SU-57 en Syrie, c'est comme le lièvre et la tortue. Avec le corbeau et le renard en plus. Les personnes informées (qui) savent bien à quoi s'en tenir, cher monsieur Toulet, comprendront : on ne court jamais très vite avec un fromage.