Trump et la haine du Diable

Journal dde.crisis de Philippe Grasset

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Trump et la haine du Diable

28 mars 2019 – Trump a fait un lapsus dans son petit discours improvisé, hier, dans lequel on trouve une menace adressée aux Russes qui font épouvantablement acte d’“ingérence” au Venezuela. Il a dit ceci, où l’on voit qu’il confond les mondes où il vit, où nous vivons, où les autres vivent et ainsi de suite…

« Venezuela was one of the richest companies, certainly, and now it’s one of the poorest comp… countries or the world », s’est-il exclamé, ce que nous avons traduit approximativement pour le texte d’Alexandre Antonov de RT.com de cette façon : « Le Venezuela était certainement l'une des compagnies les plus riches, et c'est maintenant l’une des compa… heu, l’un des pays les plus pauvres du monde. »

Antonov écrit à cette occasion une sorte de pastiche, une satire qui ne manque ni de justesse, ni d’ironie, – mais dans laquelle je ressens comme presque de l’amertume, l’on verra plus loin, – ce qu’est exactement le monde pour Trump et ses acolytes, la façon qu’il fonctionne, la forme que prend son simulacre, etc. (C’est le texte que vous trouvez ci-dessous, en annexe et illustration de mon propos.) Ce n’est évidemment pas faux, et il me paraît assuré que la psychologie de Trump est complètement fabriquée, mâchouillée, compressée, colorée et même colorisée dirais-je, par le concept, l’opérationnalité, la supériorité incontestable, la sublimité incroyable et quasi-divine du capitalisme.

Il me paraît également assuré que tous, tous les autres de ce monde américaniste, compères et complices notamment mais aussi adversaires et censeurs, ils sont affectés de la même forme affreuse de la psychologie. Tout au plus jugera-t-on Trump plus impulsif, ou bien plus inattentif, ou bien encore plus cynique que sais-je… Et du coup, lui ne se cache de rien, et il lapsusse à qui mieux mieux, ce qui signifie qu’il nous dit leur vérité à eux tous (lui-même y compris) bien plus souvent qu’à leur tour ils ne nous la disent.

D’où en vérité l’absence dans mon propos de cette amertume que je crois ressentir dans le texte d’Antonov, et illustrée par les déclarations de la fin, de Sara Flounders. Certes, l’on peut ressentir de tels emportements contre le cynisme et la crudité infâme du comportement mais, sur le fond, ne me dites pas qu’Hillary, ou n’importe lequel des autres à Washington D.C. hors quelques extraordinaires et exceptionnelles aberrations, n’est pas aussi féru de capitalisme et infecté de lui que ne l’est Trump. Tous deux,ils ont dans le sang, absolument chevillé au corps, infectant l’esprit, – et dans l’âme elle-même s’ils en ont une, – la corruption de tous ordres, par le pouvoir de l’argent ou le pouvoir par l’argent et rien d’autre que des rimailleries autour de ces deux mots

Il y a quelque chose de magique, de l’ordre de la magie noire, dans la façon que cette idée-idéale, ou idée-idéalisée du capitalisme-moderniste et de la mesure de tout par l’argent, a complètement structuré et orienté la psychologie dans ce pays (aux USA), si bien qu’à mon sens je crois que l’on peut parler d’une psychologie de l’américanisme, ou psychologie américaniste, comme l’on parle de “psychologie animale” ou de “psychologie déviante” comme d’une catégorie spécifique.

(Comme l’on sait, j’utilise cette idée de la spécificité de la psychologie américaniste, et du caractère par conséquent, depuis un temps assez long, et donc convaincu de la chose, – notamment avec les concepts d’ inculpabilité-indéfectibilité. Il s’agit d’ailleurs, dans le chef de la psychologie de l’américanisme, d’une sorte d’expression presque la plus pure de ce doit être la psychologie moderniste, mais avec l’avantage de ne pas se cacher derrière de la philosophie, du charlatanisme conceptuel, etc.)

Aussi y a-t-il un mystère considérable dans le spectacle de les voir  continuer à s’entretuer à “D .C.-la-folle”, essentiellement à cause de la personne de Donald Trump ; incapable d’écarter ces blagues du populisme, de l’extrême-droite, ne voyant pas qu’ils ont avec lui, s’il était laissé à ses tendances naturelles et avec juste les indicateurs qu’il faut, le meilleur conducteur qu’on puisse trouver de l’énorme Titanic capitaliste, qui actuellement fend les flots avec rage et impudence, avec une imprudence et un aveuglement tragiques, – impudence et aveuglement pour lui-même, pour ce Titanic, bien entendu, et c’est la cause de mon absence d’amertume, presque de ma satisfaction, – qu’il continue, qu’il continue, à toute vapeur !

Et pourtant, non, ils se déchirent et ils le déchirent, et ils continueront, plus fort que jamais, par tel ou tel biais, faisant passer le Procureur Mueller à la moulinette s’il le faut parce qu’il n’a pas réussi à créer ces “preuves” si évidentes contre Trump, déversant d’invraisemblables torrents de haine à son propos, entretenant et faisant grandir le terrible désordre dans leur propre ontologie invertie, – cette ontologie en train de devenir non-être à cause de ses propres excès. A-t-on jamais vu conduite plus suicidaire ? Surpuissance-autodestruction !

On dirait que le Diable, dans une ultime marque de sa propre haine contre les sapiens, en est arrivé à trahir ceux-là même qu’il avait créés pour défendre ses intérêts et achever son dessein. Pas si malin, le Diable pris à son propre piège… Voyons-répétons ce qu’en dit Guénon, ainsi complètement confirmé en son propos : « On dit même que le diable, quand il veut, est fort bon théologien; il est vrai, pourtant, qu’il ne peut s'empêcher de laisser échapper toujours quelque sottise, qui est comme sa signature...»

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America Inc. et Venezuela Corp.

Donald Trump semble prendre très au sérieux l'idée de “diriger le pays comme un business”. Pour quelle autre raison qualifierait-il le Venezuela, un pays que son administration a choisi comme plus récente cible pour son activité de regime change, de “compagnie” ? Le lapsus, que certains qualifieraient de freudien, s'est produit mercredi, alors que le dirigeant américain rencontrait l'épouse du “président intérimaire” autoproclamé, Juan Guaido.

« Le Venezuela était certainement l'une des compagnies les plus riches, et c'est maintenant l’une des compa… heu, l’un des pays les plus pauvres du monde », a déclaré l’animateur de la réception.

Lorsqu'elle est décrite en termes de ‘business’, la politique de Washington à l'égard du Venezuela a beaucoup de sens, pourrait-on dire. Pensez-y comme à une prise de contrôle hostile, visant à créer une filiale à partir d’une entreprise en difficulté financière, qui possède également des actifs pétroliers potentiellement très rentables.

America Inc. a passé des années à miner d’une façon très agressive l’économie du Venezuela en dissuadant d’autres compagnies de faire affaire avec lui. Bien sûr, cela n'a pas empêché l'achat de produits vénézuéliens dont les États-Unis avaient besoin. Mais dernièrement, Washington a déclaré qu'il ne paierait plus pour l'approvisionnement en pétrole, parce que la gestion à Caracas est mauvaise et qu'on ne peut pas leur faire confiance pour gérer les profits. Mais ne vous inquiétez pas, il n'y a rien qu’un petit nombre de changements dans la direction de la compagnie ne puisse régler.

En janvier, l'attaque a commencé sérieusement sous le contrôle d'Elliot Abrams, un arrangeur expérimenté, avec des décennies d’activité dans l’organisation des choses en Amérique latine. Ce type, qui a vendu des armes à des militants nicaraguayens et a menti au Congrès américain à ce sujet, sait certaines choses intéressantes sur le genre d’affaires que Washington fait maintenant au Venezuela.

Juan Guaido, un manager de bas niveau et peu connu mais avec un bon carnet d’adresse, s'est nommé PDG par intérim du Venezuela et a commencé à proposer de futurs contrats lucratifs. La revendication n'a même pas nécessité un vote au Venezuela, même pour obtenir le soutien indéfectible des grands patrons de Washington.

Il y a aussi le gourou des relations publiques Marco Rubio, qui ne fait peut-être pas partie du conseil d'administration actuel de la Maison-Blanche, mais qui est certainement d'accord avec les plans d’investissement du Venezuela. Il a occupé son temps à dire à tout le monde qu’envoyer des voyous saisir les biens de quelqu’un est une chose tout à fait acceptable, du moment que vous qualifiez la victime de socialiste. Ce n'est pas du vol de grand chemin, c’est simplement le mode de fonctionnement du capitalisme, en mettant les personnes les plus efficaces aux commandes !

Bien sûr, la dernière chose que vous voulez voir dans une telle situation, c'est le personnel de sécurité d'une compagnie concurrente s’installant au siège social de celle dont vous voulez vous saisir. D'où la menace très explicite de Trump prononcée lors de la réunion de mercredi d’envoyer son propre personnel de sécurité pour expulser les Russes.

Guaido, quant à lui, a annoncé sa prochaine grande tentative de d’investissement du conseil d’administration du Venezuela le 6 avril. Il se peut qu’il n’en ait guère les moyens à ce moment-là, compte tenu de la fréquence des pannes d’électricité qui affectent le pays depuis quelques temps. C’est un peu comme si les infrastructures suivaient le scénario sur la façon de prendre le pouvoir écrit il y a quelques années par les anciens profs de Guaido.

Sara Flounders, qui dirige le groupe anti-capitaliste International Action Centre, a déclaré que la politique de Trump vis-à-vis du Venezuela est celle d’un homme « représentant la classe capitaliste aux Etats-Unis ». « Trump ne s'intéresse absolument pas à la vie des gens au Venezuela », a-t-elle dit à RT. « Il s'intéresse aux affaires, à l'argent et à la maximisation des profits. »

Alexandre Antonov

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