L’ombre terrifiante du Dust Bowl

Bloc-Notes

   Forum

Un commentaire est associé à cet article. Vous pouvez le consulter et réagir à votre tour.

   Imprimer

 1497

L’ombre terrifiante du Dust Bowl

La Grande Dépression des années 1930 aux USA fut accompagnée de terribles conditions météorologiques, comme si le Ciel conjuguait ses efforts aux erreurs humaines pour démontrer le catastrophique engrenage du “déchaînement de la Matière”. La sécheresse frappa tous les États agricoles du Middle West, entraînant une pénurie agricole interférant sur de terribles conditions économiques et entraînant un exode vers l'Ouest (la Californie) de la population rurale plongée dans la plus extrême misère. (On reconnaît le sujet des Raisins de la colère, le livre de John Steinbeck porté à l’écran par John Ford en 1939.) Au-dessus de cela, avec la terre asséchée transformée en poussière, se révéla un terrible phénomène, à la fois par sa puissance dissolvante des conditions normales de fécondité agricole, à la fois par un aspect symbolique d’une terrifiante puissante substantivé dans de formidables tempêtes et tourbillons de poussière : le Dust Bowl, qui dura de 1933 à 1939. (Voyez les terribles images du Dust Bowl, effectivement phénomène naturel du à la sécheresse mais fortement favorisé par les pratiques de l’agriculture intensive mise en œuvre aux USA, selon les conceptions générales du Système, mécanisation et rentabilisation hors des normes de l'évolution naturelle.)

La question se pose aujourd’hui de savoir si l’on ne s’achemine pas vers un phénomène similaire, à l’occasion d’une formidable sécheresse qui frappe les mêmes vastes régions du centre des USA, dans le cours d’une tendance générale de sécheresse de plus en plus marquée, et qui fait craindre d’abord une réduction considérable de la production de blé, de soja, et de céréales en général. Les conséquences directes sur la vie économique devraient être très importantes, notamment avec une augmentation du prix des céréales et ses effets sur tous les produits dérivés, avec les conséquences sociales à mesure.

• Le 9 juillet 2012, le site The Economic Collapse reprend, dans un long article, une appréciation générale de la situation. Il signale cette crainte du Dust Bowl dans un article du New York Times du 5 juillet 2012Crop insurance agents and agricultural economists are watching closely, a few comparing the situation with the devastating drought of 1988, when corn yields shriveled significantly, while some farmers have begun alluding, unhappily, to the Dust Bowl of the 1930s…»). The Economic Collapse rappelle qu’il avait lui-même anticipé cette crainte, le 27 février 2012. Dans l’introduction de son article du 9 juillet, The Economic Collapse résume les conditions agricoles et économiques actuelles aux USA, dans cette période de sécheresse.

«All over America the corn is dying. If drought conditions persist in the middle part of the country, wheat and soybeans will be next. Weeks of intense heat combined with extraordinarily dry conditions have brought many U.S. corn farmers to the brink of total disaster. If there is not significant rainfall soon, many farmers will be financially ruined. This period of time is particularly important for corn because this is when pollination is supposed to happen. But the unprecedented heat and the extremely dry conditions are playing havoc with that process. With each passing day things get even worse. We have seen the price of a bushel of corn soar 41 percent since June 14th. That is an astounding rise. You may not eat much corn directly, but it is important to realize that corn or corn syrup is just about in everything these days. Just look at your food labels. In the United States today, approximately 75 percent of all processed foods contain corn. So a huge rise in the price of corn is going to be felt all over the supermarket. Corn is also widely used to feed livestock, and if this crisis continues we are going to see a significant rise in meat and dairy prices as well. Food prices in America have already been rising at a steady pace, and so this is definitely not welcome news.»

• Le 14 juillet 2012, le site WarNews présente un article (accès payant) du Financial Times du même 14 juillet 2002

«Is the world on the brink of another food crisis? It has become a distressingly familiar question. With the price of agricultural staples such as corn, soyabeans and wheat soaring for the third summer in five years, the prospect of another price shock is once again becoming a prominent concern for investors and politicians alike. The debate marks a dramatic shift from just a few weeks ago, when traders were expecting bumper crops and policy makers were comforting themselves that – if nothing else – falling commodity prices would offer some relief to the troubled global economy.

»But since then, scorching heat and a paucity of rain across the US has withered the country’s corn and soyabean crops, with the US Department of Agriculture this week making the largest downward revision to its estimate for a corn crop in a quarter of a century…»

• Le site WhatDoesItMeans, que nous prenons toujours avec précaution, s’empare du sujet le 10 juillet 2012, dans des termes qui valent d’être notés, notamment parce qu’ils se rapportent à certains faits confirmés et qu’ils impliquent des supputations qui paraissent logiques. Nous devons garder à l’esprit l’extension de cette circonstance que suggèrent les diverses indications données dans cet article, tant sur la corrélation avec la situation russe de production et d’exportation des céréales que pour les effets au niveau intérieur US avec une montée des prix et une aggravation des conditions économiques au moment des élections présidentielles. Comme toujours dans ses textes, WhatDoesItMeans démarre avec une référence à un “rapport alarmant” (startling report) “circulant dans les couloirs du Kremlin”.

«A startling report prepared by the Ministry of Agriculture that is circulating in the Kremlin today states that the Obama regime has begun making “strident overtures” for Russia to expand it grain exports this year as the United States faces its worst agricultural disaster in over a quarter century, and perhaps its greatest since the Dust Bowl era of the Great Depression.

»Fears of another Russian grain export ban were raised this past week after the catastrophic floods that hit Russia's Black Sea coast and wrought chaos on major road and rail links to the main grain export outlet at the port of Novorossiisk. Further fears were raised after Russia, Ukraine and Kazakhstan announced their combined wheat crop would fall 22 percent to 78.9 million tonnes this year from 2011, with the biggest impact on yields from winterkill and spring drought in Russia and Ukraine. Barely 2 years ago then Prime Minister Putin ordered a total ban on grain exports after more than a third of cultivable land in Russia was destroyed due to an historic drought and wildfires.

»The concerns raising alarms among Obama regime officials, this report says, is that the US President will be faced with unprecedented rises in food prices during the exact same time Americans will be voting for a new leader in November that could very well lead to his defeat, and possibly mass civil unrest…»

Si nous plaçons notre texte sous l’“ombre terrifiante” du Dust Bowl, c’est parce que ce phénomène constitue une calamité naturelle très spécifique aux USA, une calamité née d’une autre calamité (la sécheresse) et qui lui ajoute une dimension majeure, absolument effrayante, de dissolution des éléments naturels assurant la production agricole et formant la base de la prospérité de la vie courante ; une calamité naturelle qui a une dimension immédiate d’aggravation de la situation économique, et une dimension symbolique formidable aux USA, avec son lien immédiat fait avec la Grande Dépression qui est cette événement historique qui a profondément marqué la conscience nationale ; enfin, une calamité naturelle qui, au travers de ces divers éléments, établit un lien puissant avec la situation de déconnexion tragique et en constante aggravation, du fait du “désordre climatique” par rapport aux normes de contrainte de notre contre-civilisation, entre notre situation économique de crise terminale et les conditions de la destruction de l’environnement dans toutes ses orientations et toutes ses conséquences. Il apparaît évident qu’à cette lumière, et considérant effectivement les ravages imposés à l’environnement, et l’éloignement suicidaire par son antagonisme prédateur de notre contre-civilisation des conditions naturelles du monde, les diverses querelles sur le global warming dont nous avons été accablés ces dernières années sont pathétiquement accessoires, sinon utilisables comme une voie de détourner toute la concentration nécessaire pour observer et bien comprendre les manifestations et les conséquences de notre grande crise de l’effondrement du Système. Par contre, comme nous le suggère le cas du Dust Bowl qui occupe une place symbolique puissante dans la mémoire collective aux USA, les multiples facettes de cet aspect symbolique qui existe dans cette sorte de crise vont effectivement peser d’un poids de plus en plus formidable sur les psychologies collectives, aggravant tragiquement les crises internes en cours.

Si les évaluations les plus pessimistes se confirment, notamment concernant une crise alimentaire où les USA seraient les premiers atteints, et où effectivement serait confirmé un appel des USA à la Russie pour un accroissement des exportations de céréales, on rencontrerait effectivement une autre interférence majeure : celle du désordre climatique avec ses conséquences sur la politique de grande déstabilisation en cours, qui place les USA et la Russie en position d’affrontement, – avec la crise syrienne comme référence évidente. Le cas illustre la vanité des conceptions de survie évoquées par les uns et les autres, notamment pour expliquer les politiques en cours, – explications auxquelles nous ne souscrivons guère si elles sont présentée comme un élément rationnel de planification (d’ailleurs absurde dans sa finalité puisque ne débouchant sur aucune situation stabilisée et constructive) ; nous-mêmes voyant plutôt dans ces soi-disant “politiques de survie” l’effet du désordre et de la confusion profondes des esprits avec des déformations psychologiques de plus en plus fortes dues aux pressions autodestructrices du Système. Pour schématiser en résumant les arguments qui conduisent à des contradictions de situation insupportables, et en ne prenant pourtant qu'une partie d'une situation générale de désordre qui en compte bien d'autres : qu’est-ce que signifie une politique expansionniste de “sécurisation” des réserves pétrolières extérieures, comme feraient les USA selon ces explications, si les mêmes USA se trouvent devant des situations intérieures catastrophiques dues à l’effet du désordre climatique sur leur production alimentaire, avec les conséquences économiques et sociales à mesure ? Dans le premier cas, ils se trouvent en confrontation agressive avec la Russie sur divers théâtre, dans le second ils ont besoin de l’aide de la Russie… Et ce type de situations contradictoires ne va cesser de se multiplier à mesure que la destruction de l’environnement va accumuler les occurrences de mise en cause de la survie hors de toute référence à la puissance temporelle des acteurs en présence.


Mis en ligne le 16 juillet 2012 à 05H26

Donations

Nous avons récolté 1210 € sur 3000 €

faites un don