La guerre du président

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La guerre du président


16 juin 2002 — Mauvaise semaine, a-t-on dit. Il est vrai que les événements se sont bousculés, ces sept derniers jours, pour faire à la Maison-Blanche et au statut de GW un sort peu enviable. Tous les commentateurs, les malveillants et ceux qui prétendent voir les choses du monde avec de la distance, ont été prompts à mettre en évidence les événements des sept jours passés. «  Something has gone awry in George Bush's White House... », écrit sur un ton acide Julian Borger, dans le Guardian de Londres, en date du 15 juin.

Suit une description apocalyptique de la façon dont les membres les plus en vue du Cabinet se contredisent, font gaffe sur gaffe, prennent des initiatives douteuses, interviennent publiquement de telle façon que la Maison-Blanche doit rectifier. Ce n'est même plus la guerre interne entre les factions qui est en cause, ni le défilé ininterrompu des scandales ou soupçons de scandales et de manipulations de la Guerre contre la terreur, des actes sans fin d'incompétences dans le traitement des informations sur le terrorisme et ses menaces, désormais c'est la confusion, le désordre, la perte de contrôle du gouvernement. Lisons Borger :

« Something has gone awry in George Bush's White House. The administration's once impermeable self-confidence is beginning to show cracks. A string of blunders has revealed that it is increasingly unsure of itself.

» Donald Rumsfeld, the defense secretary, who has epitomized the administration's sense of infallibility, embarrassed himself on a visit to South Asia with speculation about al-Qaida's role in Kashmir which he was quickly forced to retract. Back home the White House acidly disowned the views of two senior cabinet members - the attorney general, John Ashcroft and the secretary of state, Colin Powell.

» The issues at stake could not have been more serious. Mr Rumsfeld was speaking from the hip at the flashpoint of a potential nuclear confrontation. For his part, Mr Ashcroft claimed to have foiled a plot to detonate a ''dirty bomb'', possibly in central Washington. As Americans contemplated the prospect of a radioactive cloud drifting over their capital and sent off for anti-radiation pills, the White House press secretary, Ari Fleischer, insisted that the country's top law-enforcement official had over-reached and ''lurched to the worst-case scenario''.

(...)

» Then on Wednesday it was the secretary of state's turn to be slapped down. Colin Powell had told the Arabic newspaper al-Hayat that the president would back the rapid establishment of a provisional Palestinian state. Mr Bush had said almost as much himself, and White House officials confirmed yesterday that a declaration along those lines was expected next week. But Mr Fleischer went out of his way to belittle Mr Powell's observations, pointing out drily that the secretary of state had the ''prerogative'' to say what he liked. »

Le spectacle est particulièrement édifiant, et particulièrement consternant. Il s'agit bien, en effet, des trois principaux ministres de GW, la nouveauté étant que Rumsfeld, jusqu'ici ''homme de fer'' sans peur et sans reproche, se fait prendre comme un collégien dans le feu croisé des tentatives (réussies, semble-t-il) de désinformation indiennes et pakistanaises, au cours de ses discussions pour désamorcer la crise. (Paul McGeough, du Sidney Morning Herald, nous donne le 15 juin un excellent rapport des mésaventures de Rumsfeld.)

Cette situation est évidemment rendue possible par la position du président, par son absence de choix entre les différentes tendances qui déchirent son cabinet, par ses hésitations, sa temporisation, par son incapacité à discipliner ou à contrôler ses ministres, — bref, par son absence d'expérience et d'autorité et des qualités qui font généralement un chef de gouvernement, voire un homme d'État acceptable. On ne peut parler d''une surprise. GW apparaît aujourd'hui tel qu'il est, un président sans réelle importance, mis où il est par la conjonction de forces diverses et de rassemblements d'intérêts particuliers ; mais un président sans importance désormais placé au coeur d'une situation d'une importance et d'une gravité considérables, au coeur de la Grande Guerre contre la Terreur issue du 11 septembre.

Que faire ?

Chacun apporte sa réponse et d'autres dirons plutôt que la question est sans réponse (on voit où va notre préférence). Dans tous les cas, les réponses suggérées ici et là ne sont pas encourageantes. Tous ces conseils ressemblent bien à des exhortations de fuite en avant ou à des solutions du désespoir, pour tenter de transcender la présidence GW parce que cela paraît être la seule possibilité de lui éviter de sombrer et se perdre dans une spirale d'incidents, de blocages, de querelles internes, et peut-être pire encore, de situations déstabilisantes qui pourraient mettre en péril la stabilité du régime.

Comme exemple assez acceptable parce que bien dans la manière des temps, voici le conseil de Mark Steyn, du Spectator (de Londres) du 15 juin. Il consiste à dire : faites la guerre extérieure, monsieur le président, sinon vous perdez votre guerre intérieure. Ce que Steyn désigne comme : A Fight to the finish.

« Readers may recall my insane predictions during the 2000 presidential campaign. Recently, in the Speccie’s North American sister papers, I dusted off my crystal ball and predicted that Bush would invade Iraq some time between the G8 summit in June and the first anniversary of 11 September, and that, if he hadn’t got things underway by early fall, his political prospects would be less and less certain. Even a right-wing madman like me isn’t saying you should invade countries just to improve your party’s showing, but, if he hasn’t been fine-tuning his Iraq-flattening plan these last few months, it’s hard to know quite what it is he has been doing. This is a war presidency or it’s nothing.

» Of course, he could take his generals’ advice, give up on Iraq, and hope to get lucky in November. There are very few competitive races, but, typically, Ralph Nader’s Green party has decided to run a candidate against the most liberal Democrat, Minnesota senator Paul Wellstone, and psephologists are predicting that the guy will siphon off enough votes to throw the seat and the Senate to the Republicans — just like Nader supposedly did with the presidency in 2000.

»That’s the choice: you can sit around hoping lightning will strike twice or you can take out Saddam. I know what I’d bet on. »