De The Economist aux souverainistes, même combat

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The Economist est un hebdomadaire connu, prestigieux et idéologiquement très marqué parce qu’identifié sans hésitationcomme un défenseur de la globalisation, du marché libre et de l’ouverture des frontières. Dans son numéro qui salue les deux référendums, il nous offre un plaidoyer ferme pour le “non”. C’est un signe convainquant de la confusion qui accompagne la signification et la caractérisation des choix, au contraire de la netteté du caractère révolutionnaire de la campagne référendaire.

Un courrier officieux européen nous donne cette analyse du contenu de l’éditorial du magazine britannique:

« L'influent hebdomadaire économique britannique The Economist appelle vendredi Français et Néerlandais à voter non à la Constitution européenne, assurant qu'un tel rejet permettrait “une pause pour réfléchir”, et ne constituerait nullement une catastrophe pour l'union. “‘Non’ serait la bonne réponse lors des référendums français et néérlandais (...) et une bonne réponse pour l'Europe”, déclare l'hebdomadaire dans son éditorial. “Une défaite de la Constitution ne serait pas la catastrophe que certains europhiles semblent penser: la vie suivrait son cours, même à Bruxelles, et une Union qui a vécu pendant près d'un demi-siècle est certainement assez forte pour s'accommoder d'une rebuffade occasionnelle des électeurs. Si elle répond en faisant une pause pour réfléchir, cela pourrait même être profitable”, affirme The Economist.

»  Le journal estime que “les divergences de vues et les préjugés nationaux dans l'Union européenne sont tellement importants qu'il est erroné de tenter de faire entrer de plus en plus de domaines dans un cadre unique”. Un tel processus centralisateur “a des limites”. “Un processus éloigné des gens a peu de chances de rester longtemps populaire. Et une Union plus large, qu'elle soit comme avant à 15, aujourd'hui à 25, ou même plus grande dans l'avenir, a plus de chances de s'éloigner que de se rapprocher (des populations), surtout si elle adopte de plus en plus de politiques communes”. The Economist affirme également que la réforme envisagée par le traité constitutionnel est “très ambiguë”. “Il va transférer de nouveaux pouvoirs, des gouvernements nationaux vers l'Union, mais avec des effets dont personne ne peut être sûr”. »

C’est une caractéristique très forte de la crise actuelle que les effets de la polémique de la Constitution renvoient dans un même camp des groupes totalement opposés dans leurs conceptions, — comme, pour ce cas, The Economist comparé, par exemple, aux souverainistes ou aux altermondialistes français. Il est remarquable de constater combien chacun lit dans la Constitution ce qui le préoccupe, — plutôt que ce qui l’arrange, — même s’il s’agit de choses complètement opposées. C’est un signe préoccupant quant à la validité de cette Constitution qui est le salmigondis qu’on sait : elle ne parvient qu’à fixer sur elle tous les mécontentements possibles, au lieu de rassembler les satisfactions (alors que les uns et les autres peuvent y trouver leur dû).

Par ailleurs, et quelles que soient les arrière-pensées de The Economist, certainement vastes et complexes, l’argumentaire dont on a lu un extrait peut être considéré comme marqué d’un excellent bon sens. Cela ne signifie pas que The Economist a raison pour la globalisation et le reste mais que ses journalistes sont intelligents, — nul n’en a jamais douté — et qu’il y a quelque chose d’évident dans l’opposition à la Constitution, — ce qui est le handicap le plus grand de ce texte.


Mis en ligne le 28 mai 2005 à 06H00