Après l’embargo, Galileo: la charge (US) continue

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Après l’embargo, Galileo: la charge (US) continue


19 avril 2005 — L’article paru aujourd’hui dans l’International Herald Tribune indique que les intentions de Washington à l’encontre de l’Europe sont une complète soumission des décisions stratégiques européennes aux consignes américanistes, notamment et principalement vis-à-vis de la Chine. Cet article est une critique rétrospective violente de la décision de l’UE, prise en 2004, d’associer la Chine au système de navigation par satellites Galileo.

Il s’agit d’une offensive concertée, qui est effectuée par le biais d’experts de confiance cités dans l’article, prenant le biais de la situation stratégique avec en substance l’accusation principale lancée contre l’Europe de participer de manière décisive au renforcement de la puissance stratégique de la Chine. On peut comprendre in fine que ce constat implique le soupçon porté systématiquement contre la Chine de préparer un conflit stratégique contre Taïwan et contre les Etats-Unis (et éventuellement, le laisser entendre ne mange pas de pain, contre l’Europe, perçue dans ce cas comme suivant l’habituelle politique “munichoise”, thème principal de la propagande américaniste).

Quelques extraits de l’article.


« Analysts who study the People's Liberation Army say that the skill China would gain from participating in the system's development would allow it to close an information gap that now gives the United States the advantage in the precise targeting of missiles and ‘smart weapons.’ The system would also allow Chinese military leaders to greatly improve their command and control of forces in the field.

» China's acquisition of the Galileo system is seen by these analysts as a major setback to U.S. efforts to limit China's access to advanced military technology. Critics of China's participation in the Galileo project say that the EU is, in effect, assisting China's military modernization despite the embargo.

(...)

» “Access to secure navigation satellite signals is absolutely essential to the PLA realizing its vision,” said Rick Fisher, vice president of the Washington-based International Assessment and Strategy Center. Fisher, an expert on China's military modernization, was referring to the People's Liberation Army. “With secure access to Galileo, the EU is playing a critical role in helping the PLA fight its future wars,” Fisher said.

(...)

» The United States and its allies use the network of Pentagon-developed Navstar global positioning system, or GPS, satellites to navigate with a high degree of accuracy almost anywhere on the earth's surface and to guide weapons to their targets over long distances. Signals from the GPS system are also available free to civilian users, but the United States can restrict their availability in selected areas if it believes there is a threat to its security.

» Richard North, a military analyst with a London-based anti-EU research institution, the Bruges Group, said China's participation in Galileo subverted the arms embargo. “You are handing a gift to the Chinese, which makes them a very formidable enemy,” he said. »


L’article attaque notamment l’affirmation selon laquelle Galileo est essentiellement un système civil, et que c’est de ce point de vue que les Chinois y participent. Ce faisant, l’attaque touche essentiellement ceux qui, au sein de l’UE, veulent réduire au maximum le rôle militaire et stratégique de l’Europe, — c’est-à-dire essentiellement les Britanniques et les Néerlandais, meilleurs alliés des USA. C’est évidemment un effet paradoxal courant de toutes ces attaques. Pour être efficaces et justifiées, ces attaques US ou par relais des USA sont fondées sur le fait présupposé que l’UE est déjà une puissance stratégique; l’UE n’est pas encore cette puissance stratégique, grâce à l’action efficace des amis britanniques notamment, mais ces attaques tendent à renforcer cette orientation, au grand dam des amis britanniques. Ainsi va la vie.

L’article fait donc un sort brutal à l’affirmation que Galileo n’est qu’un système civil, sans capacités militaires, comme les Britanniques eux-mêmes l’avaient affirmé en octobre-novembre 2004. Dans ce cas, cette démonstration sert la critique contre de prétendus liens UE-Chine. Mais, ce faisant, elle renforce également l’idée d’une “Europe-puissance” en train de se développer. C’est là tout le sel de l’offensive américaniste: pour frapper fort contre l’Europe, il faut que le poids stratégique de l’Europe le justifie, donc on fait tout pour affirmer ce poids…

Voici le traitement que l’article réserve à la querelle “Galileo non-militaire”:


« Senior EU officials have rejected suggestions that China could gain a military advantage from Galileo. They note that the network was designed primarily for civilian commercial use and could earn €250 billion a year by 2010.

» A more accurate encoded signal is to be available for EU police and military forces to fight crime and illegal immigration. This signal, known as the Public Regulated Service, or PRS, would be withheld from China and any other non-EU participants in the system.

» However, critics of Chinese participation in Galileo believe the EU would find it extremely difficult to discriminate against a China with increasing economic and political power if it insisted on access to the service.

» Even if the PRS signal and receiver equipment is off limits to China, North believes that Chinese technicians with inside knowledge of the technology will find it relatively easy to reverse engineer receivers. They could also gain access to the codes, North said.

» ''They are going to know a lot about the system,'' he said. Defense experts also argue that research work on Galileo will assist China in developing its own, independent satellite navigation system. »


Toute la rhétorique développée dans le cas Galileo est fondée sur une analyse dont la conclusion est connue par avance, dont cette conclusion constitue même la seule justification et le fondement de l’analyse: la Chine est en train de s’armer jusqu’aux dents pour mener des guerres stratégiques, principalement contre les USA (en passant par Taïwan, of course), accessoirement contre l’Union européenne. Une fois admise cette conclusion qui nous est imposée comme une vérité révélée, le reste (ce qui précède et doit mener en principe à la conclusion, mais que nous importe l’empire de la logique) va de soi, notamment et surtout l’attaque contre l’UE.

En effet, la réalité est d’abord anti-européenne. L’affaire de la levée de l’embargo n’est qu’un hors d’œuvre dans l’offensive américaine. Le rappel de l’existence du problème Galileo dans ce contexte stratégique indique que le système américaniste entend mettre sur la table tous les cas susceptibles de renforcer un acte d’accusation contre l’Europe. Avec cette nouvelle vague naissante de contestation du système Galileo, on devrait passer à un stade supérieur de l’attaque contre les liens en train de s’établir entre l’UE et la Chine. C’est en effet l’objectif général ponctuel de la poussée américaniste sur ce point: prévenir tout lien stratégique entre Chine et UE. Dans cette stratégie de destruction, Galileo a une place importante. Pour les USA, le dossier Galileo n’est pas clos. L’action américaniste dans ce domaine, comme dans tous les autres, sera d’une tentative systématique de déstabilisation et de déstructuration.